Pourquoi l'Italie est la nouvelle victime de la crise
Le pays focalise désormais toutes les inquiétudes au sein de la zone euro. FTVi fait le point sur les différents facteurs qui ont aggravé sa crise économique.
D'abord qualifiée de "grecque", la crise de la dette va-t-elle bientôt devenir "italienne" ? Silvio Berlusconi s’est fait rappeler à l’ordre par les dirigeants européens dimanche 23 octobre. Le chef du gouvernement italien est accusé de n’avoir pas respecté ses engagements pour réduire la dette et relancer la croissance du pays.
La troisième économie européenne affiche en effet une dette de 1 900 milliards d’euros, soit 121 % de son produit intérieur brut (PIB). A titre de comparaison, celle de la Grèce ne pèse "que" 350 milliards d'euros (160 % du PIB), et celle de la France 1 600 milliards d'euros (84 % du PIB). Il y a donc urgence pour éviter un défaut de paiement.
Comment l’Italie en est arrivée là ? FTVi fait le point.
• Parce que sa croissance est atone depuis dix ans
Comme celle des autres pays de la zone euro, la dette italienne se creuse lors de la crise de 2008. Mais le manque de leviers pour relancer la croissance depuis dix ans a pesé davantage sur les comptes transalpins.
Lorsqu'elle décide de dégrader la note de l'Italie (de Aa2 à A2) début octobre 2011, l'agence américaine Moody's évoque "les risques négatifs croissants pour la croissance économique liés à des lacunes structurelles".
Un plan de relance est plus que nécessaire après les mesures d'austérité draconiennes adoptées cet été pour revenir à l'équilibre budgétaire en 2013. A tel point que les organisations patronales ont publié un manifeste pour la croissance fin septembre. "L'enjeu ce n'est pas l'austérité, mais la mise en valeur du potentiel de croissance de l'Italie, notamment par la création d'emplois pour les jeunes", a souligné le porte-parole de la Commission européenne pour les Affaires économiques, Amadeu Altafaj.
• Parce que sa situation politique est fragile
Empêtré dans les affaires judiciaires et des scandales sexuels, Silvio Berlusconi peine à rassembler sa majorité. Le Cavaliere a perdu "la confiance et les voix de nombreux électeurs de tradition catholique qui se sont pour certains tournés vers des partis beaucoup plus à droite, à l'image de la Ligue du Nord", explique Maxime Pinard, chercheur à l'Iris, au Nouvel Observateur. Or la Ligue du Nord freine des quatre fers sur certaines réformes, comme le recul de l’âge de départ à la retraite de 65 à 67 ans.
Les grandes figures de l’économie italienne ne cachent plus leur exaspération. Emma Marcegaglia, présidente de la Confindustria (le Medef français), a appelé à la démission du gouvernement s'il se montre incapable de réformer.
Diego Della Valle, président du groupe italien Tod’s, a publié une tribune dans les quotidiens intitulée "Politiciens, honte à vous". Le verdict de Jean-François Jamet, enseignant à Sciences Po et spécialiste de l'Italie, est sans appel dans Le Figaro : "L'Italie est capable de se réformer, elle l'a prouvé en 1992 et 1993. Mais elle en sera incapable si Silvio Berlusconi reste en poste."
• Parce que sa législation dissuade les entreprises
Autre point à réformer d’urgence : les règles administratives et législatives qui entourent le marché du travail, régi par un Code datant de 1970. Fiat, le fleuron automobile italien, a annoncé sa décision de quitter Confindustria début 2012, dénonçant un manque de flexibilité dans le pays. Le groupe menace même de faire fabriquer encore plus de voitures en Pologne, où les conditions de travail permettent une production deux fois plus élevée.
La Banque centrale européenne s’est elle-même récemment fendue d’une lettre pour sommer Rome de rendre plus flexibles les procédures de licenciement et de privilégier les accords au sein des entreprises aux conventions sectorielles négociées à l'échelon national. Plus largement, les autorités européennes appellent à une réforme du système judiciaire italien, jugé inefficace et favorisant les fraudes, notamment fiscales, y compris du côté des entreprises.
Selon plusieurs observateurs, l'Italie peut encore éviter de recourir à une aide européenne ou du Fonds monétaire international à l’Italie. Mais la pression politique s’accentue sur Silvio Berlusconi, qui n’a plus que quelques heures pour concoter un plan convaincant à présenter au sommet de Bruxelles mercredi 26 octobre.
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