Le photographe Daniele Tamagni a sillonné l’Asie, l’Afrique et l’Amérique du Sud pour capturer les nouvelles identités de ceux qui, à travers leurs tenues vestimentaires, réécrivent les codes d’un monde en mutation.
Nous découvrons à travers les pages de son livre «Global style battle» (Dominique Carré éditeur/Editions La Découverte) une avant-garde que l'on croit trop souvent l'apanage des grandes capitales de la mode: Paris, Londres, Milan, New York. Mais derrière cette esthétique dite «du Sud » se cachent souvent de nombreux combats… un moyen d’exister.
Qu’ils soient rockers du Botswana, hipsters de Johannesburg, dandys du Congo… tous redessinent ce monde pluriel où tradition et modernité se confondent pour mieux se réinventer. La culture populaire a l’art et la manière de se réapproprier les codes de la culture «mainstream», de la mode occidentale et des grands couturiers internationaux. Que le kitsch devienne une forme d’élégance est aussi une manière de faire un pied de nez à la pauvreté.
Car pour transcender la misère, exorciser la pauvreté, quoi de mieux que de s'habiller comme une néo-princesse ou un chevalier du futur. Ici, il est bel et bien question de se réapproprier une fierté, d'être respecté et avant tout de garder son honneur.
«Tu peux venir du coin le plus sordide, la seule question c'est comment tu te vois. Comme un déchet ou comme de l'or ? Personne ne connaît ce que tu as laissé derrière toi. Ce qui compte, c'est comment tu vas te présenter au monde», raconte une jeune artiste sud-africaine au photographe italien Daniele Tamagni.
D’ailleurs, cette subculture populaire est souvent née dans l'adversité et le combat contre le conservatisme des sociétés ou les dictatures des Etats, contre toutes formes de pouvoir qui veulent soumettre l’individu. Cette lutte de l’underground contre l'establishment est souvent le terreau fertile de cette créativité.
Dans des pays souvent marqués par la violence et la misère, s’habiller de façon extravagante n’est pas seulement destiné à se faire remarquer, c’est aussi une manière de se réapproprier des traditions mais sans les rejeter, pour casser les stéréotypes sociaux. Ces nouveaux looks urbains se veulent le reflet d’une affirmation de soi et de son identité dans ce qu’elle a de plus spécifique.
Rosario Dawson et Abrima Erwah, cofondatrices et codirectrices du Studio One Eighty Nine (SOEN), expliquent dans la préface : «SOEN est né d’un voyage en République démocratique du Congo pour l’inauguration de la Cité de la Joie sous l’impulsion du mouvement V-Day. Rassemblement au cours duquel nous avons côtoyé des femmes qui avaient survécu à des situations terribles, mais conservé leur féminité et même continué d'assumer leur rôle de chef de famille. Ces femmes, victimes de violences sexuelles, avaient donné ce qui leur restait d'énergie pour créer leur affaire dans l'artisanat et la mode afin d'assurer un avenir et des conditions de vie durables à leurs enfants.»
Lauréat en 2007 du Canon Young Photographer Award grâce à un reportage sur les dandys congolais, Daniele Tamagni publie deux ans plus tard Gentlemen of Bacongo, préfacé par Paul Smith. Essentiellement concentré sur l'esthétique des différentes modes de la rue, le photographe remporte en 2011 le World Press Photo in Arts and Entertainment. Ses photographies ont été exposées dans les plus importants musées et galeries privées du monde.
Géopolis vous propose de découvrir 7 photos sur l’esthétique de ces différentes modes de la rue.
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