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«Argo»: le régime iranien prépare sa riposte

Les autorités iraniennes préparent une riposte contre «Argo», film multi-récompensé de Ben Affleck. Inspiré de la crise des otages américains de 1979, ce long-métrage américain est qualifié d' «iranophobe» par la presse iranienne et de «publicité pour la CIA» par Téhéran. C'est une avocate française, Isabelle Coutant-Peyre, qui est mandatée par l'Iran pour porter l'affaire devant la justice.
Article rédigé par Dominique Cettour-Rose
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
 Hollywood : Ben Affleck (G) et George Clooney après la 85e cérémonie des Oscars 2013 qui a couronné Ben Affleck pour le film «Argo». (JOE KLAMAR / AFP )

Récompensé aux Oscars, aux Golden Globes et aux Bafta britanniques, Argo continue à faire parler de lui. Ce film dramatique, produit par Warner Bros en 2012, raconte un épisode de la crise iranienne des otages américains de 1979 à Téhéran, ce dossier ayant été classé «secret-défense» pendant de longues années. 


Estimant que le réalisateur et principal interprète, Ben Affleck, a «gonflé les choses hors de proportion et créé des scènes fausses», l’Iran s’emploie à «trouver les moyens judiciaires de stopper les productions américaines, mettant en cause le régime iranien», a expliqué Isabelle Coutant-Peyre. Des responsables au sein du ministère iranien de la Culture lui ont demandé de «voir s'il existe des moyens pour que la production spécifiquement anti-iranienne s'arrête».

«Falsification historique»
 Argo est, selon Me Coutant-Peyre, la «falsification historique» d’un film «supposé être basé sur des archives déclassifiées» du gouvernement américain. C'est un cas «de dénigrement, d'atteinte à l'honneur et à la considération» de l'Etat iranien et de sa population par les producteurs, a ajouté l'avocate.

Si l'Iran souhaite engager une procédure judiciaire contre le film, ce n’est pas pour le faire interdire, mais pour qu’il soit diffusé avec un bandeau «disant que les faits racontés ne correspondent pas à la réalité», a-t-elle précisé.
 
Le film raconte l'exfiltration de six diplomates américains en Iran, réfugiés à l'ambassade du Canada, suite à une prise d'otage à l'ambassade américaine, de Téhéran, le 4 novembre 1979. La rocambolesque libération aura lieu, le 28 janvier 1980, grâce aux autorités canadiennes et la CIA. Mais la cinquantaine d'otages détenue par des révolutionnaires khomeinistes à l'ambassade américaine ne seront, eux, libérés qu'au bout de 444 jours.


Un éventuel procès «permettrait un débat contradictoire pour rétablir la vérité et que l'opinion publique n'ai pas qu'un son de cloche», a estimé Me Coutant-Peyre. Si l'avocate parvient à contester le film devant un tribunal français, elle envisage d'utiliser «l'article 1382 du code civil, qui exige de réparation d'un dommage causé à autrui».

Le droit suisse punit également la diffamation d'un état étranger, a précisé cette avocate internationale, connue pour être la compagne d'Ilich Ramirez Sanchez, dit Carlos, condamné en France pour des attentats meurtriers dans les années 80.

Version iranienne
Mais l'Iran ne compte pas en rester là et prépare une contre-offensive cinématographique. Le réalisateur persan Ataollah Salmanian, proche du régime, serait en train de plancher sur la version iranienne de cette prise d'otages.

Son titre serait déjà trouvé : «Les chefs d'état-major». Quant au scénario, il «raconte la libération de vingt otages américains par les révolutionnaires iraniens au début de la révolution», expliquait M. Salmanian, en janvier.

Mais cette nouvelle version plaira-t-elle autant aux Iraniens qu'«Argo» ? Bien qu'interdit dans les salles de cinéma locales, les ventes de DVD piratés du film de Ben Affleck, sous-titrés en farsi, ont battu des records : «Plusieurs centaines de milliers de copies», ont été vendues à la sauvette, selon le Wall Street Journal.

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