Violences contre des supporters israéliens : "Si on commence à céder face à des menaces de ce type, elles se multiplieront", prévient le sociologue Michel Wieviorka
"Il faut maintenir ce match" de Ligue des nations à Saint-Denis, "une fois que la sécurité est assurée", estime, vendredi 8 novembre sur franceinfo, le sociologue Michel Wieviorka, professeur à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS), au lendemain des violences commises à Amsterdam contre des supporters israéliens en marge d'un match de football de Ligue Europa entre l'Ajax et le Maccabi Tel-Aviv, et à une semaine du match France-Israël prévu jeudi 14 novembre au Stade de France.
"Si on commence à céder face à des menaces, des risques, des inquiétudes de ce type, alors elles se multiplieront, et ça ira de mal en pis", poursuit-il. Si ce match ne fait pour l'instant pas le plein de spectateurs, il ne faut pas, selon le sociologue, "lire tous les problèmes de société à travers ce qui se passe sur les terrains de foot". "Ça nous dit certaines choses, mais ça ne nous dit pas le malaise profond qui existe en France en général sur ces questions." Il estime qu'il s'agit "simplement d'une vague d'inquiétude". Il précise que "lire les problèmes de l'antisémitisme en France aujourd'hui" ne fait que souligner "qu'il y a un problème, mais ça ne nous dévoile pas la complexité ou l'étendue de ce problème".
Michel Wieviorka se fait également critique de l'utilisation du mot pogrom pour qualifier les violences d'Amsterdam. Le président israélien Isaac Herzog a, lui, dénoncé "un pogrom antisémite". En France, l'eurodéputée Renew Nathalie Loiseau ou le chef de file des députés LR Laurent Wauquiez ont évoqué "un pogrom" dans les rues d'Amsterdam.
"La connaissance historique a disparu"
"Je me méfie de l'emploi de mots extrêmement forts, alerte Michel Wieviorka. Les pogroms, dans l'histoire juive, ce sont des dizaines, parfois plus, de morts. C'est un déferlement, sur une certaine durée, de haine. Les pogroms, la plupart du temps, c'étaient des masses populaires, orchestrées par un pouvoir." Dans le cas des violences contre les supporters israéliens à Amsterdam, "il y a de la haine antisémite, il y a de la violence antisémite, des choses inacceptables. Mais je n'utiliserais pas un vocabulaire aussi extrême".
"On plaque un vocabulaire, qui a une épaisseur historique très grande, sur des événements, sans se rendre compte qu'on mélange tout."
Michel Wieviorka, sociologuesur franceinfo
Le sociologue regrette surtout que "la connaissance historique" ait "disparu". "Si on connaissait mieux l'histoire, je pense qu'on introduirait plus de sens de la complexité et plus de capacité aussi de discuter", ajoute Michel Wieviorka. Il trouve que les "déferlements de haine" de jeudi soir aux Pays-Bas sont "terrifiants, non seulement de violence, mais de pauvreté intellectuelle".
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