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Le port de Gênes à l'épreuve de l'effondrement du pont : sa compétitivité "risque évidemment d'être remise cause"

Le port de Gênes était, jusqu'ici, l'un des plus dynamiques d'Europe. Il attirait quelque 75 millions d'euros de capitaux chaque année, révèle la professeure Marie-Madeleine Damien. La catastrophe du pont Morandi pourrait, selon elle, mettre un frein à son développement.

Article rédigé par franceinfo
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Le port de Gênes. (MARCO BERTORELLO / AFP)

Gênes est l'un des principaux ports de la Méditerranée et le plus grand port industriel et commercial d'Italie. Mais l'effondrement du pont Morandi, mardi 14 août, ayant entraîné la mort de plusieurs dizaines de personnes, peut avoir de lourdes conséquences pour ce carrefour maritime. Marie-Madeleine Damien, professeure émérite à l’Université des sciences et technologies de Lille et auteure de Les ports européens et la mondialisation (L’Harmattan, 2009), a expliqué vendredi 17 août au micro de franceinfo que "ce port attirait et attire encore tous les capitaux chinois et allemands pour sa modernisation à un rythme que beaucoup de ports européens n'ont pas, avec presque 75 millions d'euros par an. Donc en plein développement, évidemment que ceci risque de remettre en cause sa compétitivité".

franceinfo : Quel est l'importance du port de Gênes ?

Marie-Madeleine Damien : Le port de Gênes est le quatrième port de la Méditerranée, après Algésiras, Valence et Marseille. C'est un port à conteneurs très important, c'est le treizième port européen, au même niveau que celui du Havre. C'est un port pétrolier, de pêche, de vrac, de marchandises diverses, de passagers, avec quatre millions de passagers par an, un port de croisière, avec deux millions de croisiéristes. C'est un port d'attache et de plaisance aussi, avec chaque année 9 500 escales. Aujourd'hui, 86 navires sont dans le port, dont 24 sont au départ. Donc ce port a une place cruciale sur la façade maritime méditerranéenne, c'est le port de l'Europe du sud grâce à son excellente position stratégique. Même s'il est coincé entre la montagne et la côte, il a su développer un hinterland vers la Lombardie, la Suisse, la Bavière et l'Autriche et devenir vraiment le grand port de cette partie de la côte.

Quelles conséquences va avoir l'effondrement du viaduc dans le trafic maritime dans la région de Gênes ?

Ce port attirait et attire encore tous les capitaux chinois et allemands pour sa modernisation à un rythme que beaucoup de ports européens n'ont pas, avec presque 75 millions d'euros par an. Donc en plein développement, évidemment que ceci risque de remettre en cause sa compétitivité, parce que ça risque d'entraîner un allongement du temps de manutention et de transport des marchandises depuis l'arrière-pays jusqu'au port et du port vers l'arrière-pays et donc un surcoût dans la manutention. D'autant plus que ce trafic vers l'hinterland est très contraint : 17% est effectué par le trafic ferroviaire qui lui aussi risque d'être perturbé et 77% par la route. Bien sûr, il va y a avoir un report vers des ports situés plus à l'ouest et un report sur l'autoroute A7. Actuellement, on n'observe pas de report d'escale, tout fonctionne normalement, sauf que les employés mettent évidemment plus de temps pour venir travailler. Pour l'heure, on n'a pas de répercussion.

Comment ça va se passer dans les prochains jours, lorsque les vacanciers vont rentrer vers le port de Gênes, dans cette ville meurtrie ?

Un plan est en train de se mettre en place parce qu'il y a des possibilités éventuellement de détournement sur le port de Civitavecchia, ou sur des ports plus proches. Mais les conséquences vont être prises en main progressivement, pour les passagers assez rapidement, mais pour le trafic de marchandises, on va voir les effets un petit peu plus tard, dans environ un ou deux mois. Je pense qu'il y aura un détournement de trafic vers le port de Rotterdam ou Anvers. Mais je ne pense pas qu'il y aura un profit pour Marseille.

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