La police américaine est-elle prête pour la "désescalade" ?
Des méthodes de la police américaine ont suscité l’incompréhension, la colère et ravivé les tensions raciales ces derniers mois à Ferguson, Baltimore, New York et ailleurs. Barack Obama a réclamé de sérieux changements dans la police avec notamment de nouvelles pratiques.
Les caméras embarquées acceptées
Il y a un point qui fait l’unanimité, ce sont les mini-caméras vidéo pour filmer les interventions. Ce système est déjà expérimenté dans de nombreuses grandes villes comme Los Angeles, Washington et New York. Il va être étendu grâce à un budget de dizaines de millions de dollars. L’équipement vidéo est notamment par Sean Smoot, qui dirige un des principaux syndicats de policiers américains. Il estime que, dans de nombreux cas, la vidéo permettra aux forces de l’ordre d’être lavées de tout soupçon.
"Je défends le principe de ces caméras depuis des années. On aurait l’intégralité de l’incident et avec une bonne qualité d’image. Je considère le professionnalisme des policiers comme au- dessus-de tous les autres. Je parierai un mois de salaire qu’il y a moins de mauvaise conduite chez les policiers, que chez les avocats, les médecins ou les prêtres."
La réflexion va bien au-delà du pari quand elle se fonde sur un constat. Nous ne sommes plus dans les années 80, la criminalité dans les grandes villes a plutôt reculé et les méthodes doivent évoluer. C’est ce que répond Chuck Wexler, président d’un centre de recherche de la police quand on lui demande ce qui ne va pas.
"C’est un ensemble de choses. Il y a d’abord l’entrainement et le recrutement. Il y a aussi une question de culture. Ce n’est pas parce que nous avons le droit de tirer que nous devons le faire. Nous cherchons des alternatives à l’utilisation de la force meurtrière. Il faut affronter cette réalité brutale : nous devons à l’avenir changer de méthodes."
L’usage rapide de la force au cœur du débat
C’est ce qui est mis en avant dans de nombreuses enquêtes officielles réclamant de nouvelles pratiques dans certains commissariats. C’est le cas par exemple dans la ville d’Oakland en Californie, qui est en quelque sorte sous surveillance. Le mot clé, c’est désescalade avec cette problématique : comment les policiers peuvent-ils empêcher une situation de dégénérer. Cela passe par des exemples très concrets comme une situation d’entrainement pour apprendre à ne pas tirer. Daniele Outlaw a mis en place ce stage de formation à Oakland
"Dans un de nos scénarios il y a une personne agressive avec une batte de base-ball. Là, le policier voit la batte et il s’assure qu’il a son taser à portée de main. Mais dans le même temps, il doit essayer d’engager un dialogue et s’efforcer de raisonner l’agresseur. Si l’homme pose sa batte, alors le policer doit réévaluer la situation et peut être mener une interpellation sans violence. C’est un changement radical dans nos méthodes d’entraînement."
Les limites du changement
Il n’est pas question pour les policiers de mettre en danger leur sécurité, en abandonnant le port de l’arme en toute circonstance. Dans une réunion récente, des policiers écoutaient le récit d’expériences menées ailleurs. Le chef de la police de Manchester en Grande Bretagne est venu expliquer que depuis deux ans, les policiers étaient désarmés. Le nombre d’incidents graves a baissé de façon significative. Ce constat a provoqué un grand silence dans la salle, suivi d’une petite leçon d’histoire de la part de Mickael Derden de la police de Houston.
"Vous devez savoir qu’aux Etats-Unis il y a une culture des armes. Les Américains respectent le droit de posséder une arme garanti par le second amendement de la Constitution. Donc, ça ne marcherait pas ici à cause de notre éducation."
Il y a effectivement plus de 300 millions d’armes en circulation aux Etats-Unis. Dans de nombreux Etats, il est parfaitement légal d’en garder une dans son véhicule. Tout cela bien sûr, ne contribue pas à faciliter la fameuse "désescalade" au centre de toutes les réflexions aujourd’hui.
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