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Israël: la vidéo d'une exécution publique d'un Palestinien

L’image est terrible et semble indiscutable. Un soldat israélien arme tranquillement son fusil et tire sur la tête d’un homme allongé à terre, dans une rue de Cisjordanie occupée, au milieu d’autres soldats ou civils. La scène témoigne de la tension qui règle en Israël depuis le début de «l’intifada des couteaux» avec plus de 200 Palestiniens et 28 Israéliens tués depuis le 1er octobre.
Article rédigé par Pierre Magnan
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Palestinien abattu à Hébron (capture écran de RT) (B'tselem)

Hébron, Cisjordanie occupée. Jeudi 24 mars, un soldat israélien prend son fusil et tire sur un homme à terre, déjà, semble-t-il, blessé. Autour de lui, d’autres soldats semblent à peine surpris de son geste. Officiellement, l’homme abattu aurait attaqué, avec un complice, au couteau un soldat israélien, avant d’être blessé d’où sa présence à terre.

L'armée s'était contentée initialement de rapporter la mort de deux Palestiniens abattus après avoir gravement blessé un soldat. Plus tard, elle a annoncé le placement en détention du tireur et l'ouverture d'une enquête.  Elle a assuré que les investigations avaient été lancées avant que les images ne se propagent. Une vidéo tournée par un habitant qui l'a envoyé au mouvement de défensse des droits de l'homme israélien B'tselem. Comme le note l'organisation israélienne, les soldats et officiers israéliens présents semblent à peine réagir au coup de feu.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a affirmé que l'armée «attendait de ses soldats qu'ils agissent calmement et respectent les règles d'engagement»,  alors que son ministre de la Défense Moshé Yaalon a promis «la plus grande  sévérité».

«Enfants perdus de la génération d'Oslo»
L’Onu a immédiatement condamné cet acte. «Je condamne fermement l'apparente exécution extrajudiciaire d'un  assaillant palestinien à Hébron, en Cisjordanie occupée», a dit dans un communiqué l'envoyé spécial de l'ONU au Proche-Orient, Nickolay Mladenov.

Les faits semblent être l'un des cas les plus flagrants d'usage excessif de la force par les forces israéliennes au cours des violences, connues sous le nom d'«intifada des couteaux» commencées depuis bientôt six mois. Une vague d'attaques qui a déjà fait de nombreuses victimes: 200 Palestiniens et 28 Israéliens tués depuis le 1er octobre, selon un décompre de l'AFP. Ce bilan a provoqué des interrogations. La ministre suédoise des Affaires étrangères, Margot Wallström, s'était publiquement inquiétée de ces chiffres, suscitant une vive controverse entre les deux pays.

Ces attaques crééent une véritable psychose en Israël. «La moitié des 228 attaques palestiniennes « au couteau » recensées depuis le 1er octobre 2015 ont été le fait de jeunes de moins de 20 ans, dont 10 % avaient moins de 16 ans. Près de 90 % avaient moins de 25 ans, et les femmes constituaient 11 % d’entre eux», notait un rapport israélien, publié à la mi-février 2016. Ce sont les «enfants perdus de la génération d’Oslo», estime Amira Hass, la correspondante du journal israélien Haaretz dans les territoires palestiniens occupés.

«Qui essaie d'assassiner des juifs mérite de mourir»
La multiplication des attaques et la diversité des situations rendent toute réponse sécuritaire difficile, tant du côté israélien que palestinien. En Israël même, le chef d'état-major, le général Gadi Eisenkot, avait divisé les esprits en février en déclarant ne pas vouloir voir un soldat «vider son chargeur» sur une Palestinienne de 13 ans armée d'une paire de ciseaux, même si elle attaquait des soldats. De son côté, Amnesty International a affirmé que l'Etat hébreu a un «long passé» d'exécutions extrajudiciaires en parlant d'une «culture de l'impunité».

Seule la droite de la droite a relativisé les faits. Avigdor Lieberman, l'ancien ministre des Affaires étrangères, connu pour ses prises de position incendiaires, a jugé «hypocrite et injustifié de se liguer contre le soldat». « Mieux vaut un soldat qui commet  une erreur mais reste en vie qu'un soldat qui se fait tuer par un terroriste  parce qu'il a hésité», a-t-il dit. «Moralement parlant, un terroriste qui essaie d'assassiner des juifs mérite de mourir», a dit Bezalel Smotrich, député du Foyer juif, parti nationaliste religieux appartenant à la majorité de M. Netanyahu. 

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