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Quatre choses à savoir sur Geert Wilders, le populiste anti-islam qui pourrait remporter les élections aux Pays-Bas

Le leader du Parti pour la liberté, qui veut interdire le Coran et fermer les mosquées de son pays, talonne le parti du Premier ministre, Mark Rutte, dans les sondages.

Article rédigé par Louis Boy
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 9min
Le candidat aux élections législatives néerlandaises, Geert Wilders, lors de l'un de ses rares déplacements en public, à Heerlen (Pays-Bas), le 11 mars 2017. (JOHN THYS / AFP)

Mercredi 15 mars, Geert Wilders pourrait devenir l'homme à la coiffure la plus improbable à remporter une élection depuis Donald Trump. Et ce n'est pas le seul point commun entre les deux hommes : le néerlandais aussi est "antisystème", hostile à l'islam et adepte des déclarations provocatrices. Il a un temps fait la course en tête dans les sondages sur les élections législatives aux Pays-Bas, et son Parti pour la liberté (PVV) conserve une chance de devenir la première force politique du pays.

Un tel succès serait historique aux Pays-Bas. Et représenterait un signe positif pour Marine Le Pen, à quelques semaines de l'élection présidentielle française. Cependant, Geert Wilders, 53 ans, ne devrait pas accéder au poste de Premier ministre, faute d'alliance possible avec d'autres partis. Franceinfo fait le portrait d'un politicien à l'influence néanmoins grandissante.

Il est encore plus virulent contre l'islam que Le Pen ou Trump

Geert Wilders est entré en politique, au début des années 1990, au sein du VVD, le parti de droite libérale de l'actuel Premier ministre qu'il cherche à détrôner, Mark Rutte. Mais il s'est rapidement inscrit en rupture avec son parti, en particulier sur la place des musulmans dans son pays, claquant la porte de la formation politique en 2004 avant de former son propre parti en 2006.

Dans son programme actuel, outre des mesures protectionnistes et anti-Union européenne, le Parti du peuple propose d'interdire l'entrée aux Pays-Bas des ressortissants de certains pays à majorité musulmane, de fermer toutes les mosquées du pays, et d'interdire à la vente le Coran, un livre qui, selon lui, "contient plus d’antisémitisme que Mein Kampf". Sur Twitter, il ne cache pas son intention de viser non seulement les musulmans radicaux mais bien l'islam tout entier.

En 2014, lors d'un meeting, il avait demandé à la foule si elle souhaitait "moins de Marocains" dans le pays, une déclaration qui lui a valu une condamnation deux ans plus tard. Geert Wilders s'en prend également aux Turcs, la deuxième plus importante communauté d'origine des musulmans des Pays-Bas. En interdisant des meetings de ministres turcs pro-Erdogan dans le pays, le Premier ministre, Mark Rutte, est soupçonné d'avoir voulu couper l'herbe sous le pied de son rival islamophobe, qui avait manifesté devant l'ambassade de Turquie à La Haye.

Une affiche de Geert Wilders et son slogan, "Rendez-nous les Pays-Bas", le 11 mars 2017 à Heerlen, aux Pays-Bas. (JOHN THYS / AFP)

Son rejet de l'islam s'est notamment développé lors d'un voyage d'un an en Israël, avant même son entrée en politique. Après avoir observé les tensions communautaires avec les Palestiniens, il en est revenu un fervent défenseur de l'Etat hébreu. Plus tard, il est fortement marqué par deux assassinats : celui, en 2002, de Pim Fortuyn, précurseur de sa ligne politique, par un activiste d'extrême gauche, et, deux ans plus tard, celui du cinéaste Théo van Gogh, par un Marocain qui lui reprochait sa critique de l'islam. Le tueur listait Geert Wilders parmi ses cibles potentielles.

Il aurait de mystérieuses origines indonésiennes

Né dans une famille catholique à Venlo, dans une zone rurale des Pays-Bas, Geert Wilders ne manque pas de mettre en avant ces origines. Mais ce partisan de la fermeture des frontières s'attarde moins sur une autre pan de son histoire familiale. Selon Meindert Fennema, biographe cité par Le Figaro, la grand-mère paternelle du polémiste est originaire des Indes néerlandaises, aujourd'hui l'Indonésie, pays à majorité musulmane. Un frère de Geert Wilders, qui dément cette version, confirme en revanche que son autre grand-mère a bien des origines indonésiennes.

Des origines qui pourraient expliquer, selon Le Monde, l'étonnante teinture peroxydée du candidat, qui chercherait ainsi à masquer ses origines asiatiques. Son frère Paul explique au Figaro, que ce look était au départ "une plaisanterie" dont il a fait "une marque de fabrique" lors de son entrée en politique, où son allure, couplée à ses positions radicales, l'ont aidé à vite se faire connaître.

Il vit coupé du monde à cause des menaces

La vie de Geert Wilders a basculé avec l'assassinat, le 2 novembre 2004, du cinéaste Théo van Gogh. Egalement menacé par les commanditaires, il est placé sous une protection permanente qui n'a jamais cessé depuis. En 2008, rapporte Der Spiegel (en anglais), il a été la cible de plus de 300 menaces de mort, un chiffre qui représente les trois-quarts des menaces reçues par des responsables politiques néerlandais.

Geert Wilders et ses nombreux gardes du corps, le 8 mars 2017, avant une manifestation devant l'ambassade de Turquie à La Haye (Pays-Bas). (YVES HERMAN / REUTERS)

Geert Wielders ne peut plus sortir spontanément dans la rue, et limite au maximum ses apparitions dans les meetings et les lieux publics. "Quand je vais au cinéma, la dernière rangée de sièges est réservée pour moi et mes gardes du corps", raconte-t-il notamment dans une autobiographie publiée en 2012. Son titre, "A abattre : la guerre de l'islam contre l'Occident et moi", montre comment il a su mettre en scène et lier étroitement la menace qui pèse sur lui et celle que représenterait l'islam pour le monde. "Il y a clairement un aspect personnel dans sa lutte contre l'islam", acquiesce le chercheur en sciences politiques Cas Mudde dans le Washington Post (en anglais)Il est devenu plus dur contre l'islam et ceux qui le 'défendent'."

S'il s'est emparé de Twitter pour s'adresser plus directement à ses soutiens et compenser son isolement, il se retrouve néanmoins coupé du terrain. C'est en tout cas ce que raconte Paul Wilders, très critique envers son frère Geert, à l'hebdomadaire allemand Der Spiegel, cité par Géopolis : "Il n’y a pas d’homme politique qui ait moins de contact avec le peuple que Geert. Il ne peut même pas faire un seul pas dans la rue. [...] Le monde de Geert est devenu très petit : [il est constitué] du Parlement, des réunions publiques et [de] son logement." Une attaque teintée de compassion mais cinglante contre celui qui se présente comme le candidat du peuple.

Il ne sera sans doute pas le prochain Premier ministre des Pays-Bas 

Dans un contexte de montée des extrêmes dans de nombreuses démocraties occidentales, la percée de Geert Wilders et son PVV dans les sondages ont braqué les projecteurs comme rarement sur l'élection néerlandaise. Leur résultat pourrait bien être historique : jamais le populiste n'était arrivé en tête d'une élection nationale. Mais, si le parallèle avec Donald Trump est tentant, ses chances de devenir le nouveau Premier ministre sont infimes. 

Rien n'assure, tout d'abord, que Geert Wilders remporte l'élection. Après avoir fait, un temps, la course en tête dans les sondages, le PVV accusait deux points de retard sur le parti de Mark Rutte (16% d'intentions de vote contre 18%) dans un sondage publié lundi, et réalisé après la polémique sur les meetings de ministres turcs.

Le candidat à l'élection législative néerlandais, Geert Wilders, et le Premier ministre des Pays-Bas, Mark Rutte, avant un débat télévisé, le 13 mars 2017 à Rotterdam. (YVES HERMAN / REUTERS)

Les projections lui accordent 24 sièges sur les 150 que compte le parlement néerlandais. Or, aux Pays-Bas, les partis sont obligés de s'allier pour composer un gouvernement, car il est presque impossible qu'un parti remporte la majorité à lui tout seul. Et alors que Mark Rutte avait invité le PVV dans son gouvernement entre 2010 et 2012, ce dernier a assuré qu'il y avait "zéro" chance qu'une telle alliance se reproduise cette fois-ci. Une position partagée par tous les grands partis du pays.

Même si Geert Wilders n'accède pas à la Tourelle, le bureau du Premier ministre néerlandais, une première place marquerait "la nécessité de composer avec des minorités populistes qui n’ont, jusqu’ici, pas été prises au sérieux dans nos démocraties", estime le sociologue néerlandais Paul Scheffer, interrogé dans Le MondeUn scénario qu'il compare à "un score de 40 % pour Marine Le Pen au second tour de la présidentielle en France".

Un journaliste du Financial Times (article payant) va encore plus loin, estimant que le score de Geert Wilders intéresse davantage les étrangers que des Néerlandais focalisés sur les coalitions à même de gouverner. "Même si Wilders terminait premier le 15 mars, avertit-il, préparez-vous à des mois de négociations ennuyeuses sur des coalitions, qui se termineraient par un gouvernement sans Wilders."

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