Le numéro 2 du Hamas tué par une frappe attribuée à Israël près de Beyrouth : "une violation de la souveraineté libanaise", selon un politiste franco-libanais

Exilé au Liban depuis plusieurs années, Saleh al-Arouri a été tué avec ses gardes du corps dans la banlieue sud de la capitale libanaise, fief du Hezbollah. Six personnes en tout sont mortes.
Article rédigé par franceinfo
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Le chef adjoint du Hamas Salah al-Aruri lors de la signature d’un accord de réconciliation entre le Mouvement de résistance islamique (Hamas) et le Fatah, au Caire (Egypte), le 12 octobre 2017. (IBRAHIM EZZAT / NURPHOTO)

"C'est une violation de la souveraineté libanaise", déclare Ziad Majed, chercheur et politiste franco-libanais, professeur à l'Université américaine de Paris sur franceinfo mardi 2 janvier, alors que le Hamas annonce la mort de son numéro 2 dans une frappe de drone attribuée à Israël, près de Beyrouth. Selon lui, Israël s'en est pris "à la capitale libanaise", il s'agit donc d'un "évènement extrêmement dangereux", "avec tous les risques que cela engendre".

franceinfo : C'est une surprise qu'il puisse y avoir une frappe israélienne sur Beyrouth ?

Ziad Majed : C'est une surprise, dans le sens où les Libanais sont habitués à des attaques du côté du Sud-Liban, d'intensité basse ou moyenne. Une attaque comme cela, juste à côté de la capitale, dans l'un des quartiers les plus peuplés... C'est un événement extrêmement dangereux, parce qu'il vise une zone où il y a une densité démographique et une base sociale, la base politique du Hezbollah libanais qui avait déjà menacé de riposter si la banlieue sud était attaquée. Le quartier visé se trouve à quelques centaines de mètres de l'aéroport international de Beyrouth.

C'est donc un quartier extrêmement peuplé, ce qui explique les mots forts du Premier ministre libanais. Ce soir, Najib Mikati, dénonce un "nouveau crime israélien" ?

Absolument, car c'est une violation de la souveraineté libanaise. Cela va au-delà des messages politiques ou militaires que l'on a observés depuis le début du conflit entre Israël et le Hamas. C'est très dangereux, il faut s'attendre à d'autres développements. Surtout lorsque l'on s'intéresse au profil de la personne visée : Saleh al-Arouri, né en Cisjordanie. Israël a détruit la maison de sa famille récemment à côté de Ramallah. Il avait passé 18 ans dans les prisons israéliennes, il était l'un des membres de la délégation qui a négocié la libération du soldat israélien Gilad Shalit en 2011.

Dans cet événement, il faut prendre en compte le profil de la personne visée, la densité de population du quartier, qui est aussi le siège politique du Hezbollah. Pour le gouvernement, c'est une escalade et une volonté israélienne de ne plus se contenter de la territorialité du conflit, mais d'attaquer la capitale libanaise avec tous les risques que cela engendre.

Depuis le 07 octobre, l'attaque du Hamas sur le sol israélien, il y avait une grande prudence de la part du gouvernement libanais. Quelle est la position du Premier ministre libanais, vis-à-vis de la possible entrée en guerre de son pays ?

Il y a eu une prudence très longtemps, parce que le Liban ne souhaite pas entrer en guerre, même le Hezbollah a montré qu'il ne voulait pas voir l'intensité des combats s'accroître. Mais avec cet événement, la déclaration de guerre est de plus en plus explicite, côté israélien. Le gouvernement libanais sait qu'entre la crise politique libanaise, l'effondrement de l'économie, et la situation régionale, aujourd'hui, il y a la diaspora libanaise. Des centaines de milliers de Libanais sont dans le pays pour soutenir l'économie et les familles. On va probablement voir des départs à l'aéroport, il va y avoir une panique.

Le Premier ministre, même s'il n'a pas son mot à dire par rapport aux décisions israéliennes, va essayer de calmer le jeu à travers la France, le Qatar et certains pays de la région, la Turquie peut-être. Sinon, ça peut devenir extrêmement dangereux. Il faut rappeler qu'au Liban, il y a 300 000 réfugiés palestiniens chassés de leur terre, depuis 1949. Aujourd'hui, ce sont leurs descendants, une troisième génération. Il y a une colère et une frustration palestinienne, par rapport à tout ce qu'ils voient des massacres et des bombardements à Gaza.

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