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Quatre témoignages accablants de soldats israéliens sur la guerre à Gaza

L'ONG israélienne Breaking the Silence publie un document reprenant des dizaines de récits de militaires dénonçant un usage disproportionné de la force pendant l'opération "Bordure protectrice" de l'été 2014.

Article rédigé par Julie Rasplus
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Un soldat israélien, posté à Metoula (Israël), scrute la frontière avec le Liban, le 20 janvier 2015. (BAZ RATNER / REUTERS)

Le rapport de 240 pages compile des témoignages glaçants. L'organisation israélienne Breaking the Silence (en anglais) a publié, lundi 4 mai, des récits de plus de 60 officiers et soldats israéliens engagés dans la guerre à Gaza pendant l'été 2014, lors de l'opération "Bordure protectrice". Les soldats de Tsahal s'y montrent particulièrement critiques envers l'armée, accusée d'avoir recouru à la force sans distinction. 

Francetv info reprend quatre témoignages décrivant l'intensité des combats, les consignes données aux soldats israéliens et leur obsession d'avoir affaire à des combattants plus qu'à des civils. 

1"Même si nous n'entrons pas : obus, obus, obus"

Un lieutenant d'infanterie, en poste dans le nord de la bande de Gaza, raconte l'intensité des tirs lors de l'opération.  

"L'artillerie tire constamment. (...) En pratique, cela signifie que des obus sont tirés tout le temps. Même si nous n'entrons pas : obus, obus, obus. Une structure suspecte, une zone ouverte, un endroit où pourrait se trouver un tunnel : feu, feu, feu. (...) C'est quelque chose d'indéfinissable, qui dépend du commandant de la brigade et de son humeur du jour. 'Décidons de ce qui est raisonnable [en termes de pertes] et de ce qui ne l'est pas'."

2"Ils ont dirigé leurs armes sur ces filles, et elles ont été tuées"

Un soldat d'infanterie, déployé dans le sud de la bande de Gaza, se souvient d'une journée où les soldats ont été confrontés à deux femmes qui traversaient une zone proche de l'endroit où ils étaient postés. 

"Un soldat a identifié deux silhouettes en train de marcher dans un verger, à 800 ou 900 mètres du périmètre. C'était deux jeunes femmes. Le commandant a demandé de confirmer – 'qu'est-ce que vous voyez ?' – et si elles étaient incriminées ou non. C'était le jour, vers 11 heures ou midi. Les postes de surveillance ne pouvaient pas bien voir, donc le commandant a envoyé un drone pour regarder d'en haut et le drone les a mises en cause. (...) Ils ont dirigé leurs armes sur ces filles, et elles ont été tuées. (...) J'avais le sentiment que c'était des conneries. (...) Ils ont vérifié les corps et c'était deux femmes, de plus de 30 ans. Les corps de deux femmes, qui n'étaient pas armées. [Le commandant] est revenu et nous avons avancé, et elles ont été inscrites comme terroristes. On les avait abattues, donc évidemment, ce devait être des terroristes…"

3"Tirer si on se sent menacé est la chose la plus morale à faire"

Un sergent de la division blindée, en patrouille dans la zone de Deir Al-Balah, dans la bande de Gaza, explique les consignes que lui et ses collègues ont reçues pendant l'opération "Bordure protectrice". 

"N'importe qui dans la zone (...) est presque sûrement un combattant. Il ne va pas être innocent et le risque est suffisamment élevé pour tirer sur lui immédiatement. C'est aussi ce que nous disent les commandants et les officiers, juniors comme seniors. Ils nous disent : 'Pour faire court, tirer si on se sent menacé est la chose la plus morale à faire car la chance que ce soit un civil est infime', parce que tout le monde a été évacué."

4"J'avais vraiment, vraiment envie de lui tirer dans les genoux" 

Autre scène de confrontation entre soldats et civils, racontée par un sergent d'infanterie, en position dans le nord de la bande de Gaza. Elle montre comment les soldats israéliens se persuadent qu'ils ont affaire à des combattants du Hamas. 

"Il y avait cette fille handicapée mentale dans le quartier (...) et le fait que des tirs tombent à côté de ses pieds l'a fait rire. (...) Elle continuait à se rapprocher et c'était clair pour tout le monde qu'elle était retardée, donc personne n'a tiré. Personne ne savait comment gérer la situation. Elle errait autour des zones des compagnies d'avant-garde. (...) Je suppose qu'elle voulait juste rentrer chez elle, qu'elle avait échappé à ses parents, je ne pense pas qu'ils l'auraient envoyée là. [Mais] elle était peut-être manipulée (…). J'ai pensé que c'était un simulacre, et j'avoue que j'avais vraiment, vraiment envie de lui tirer dans les genoux (…). J'étais sûr qu'elle était envoyée par le Hamas pour tester notre vigilance, pour tester nos limites, pour voir comment on allait répondre aux civils."

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