Liban : le procureur général et trois magistrats inculpés dans l'affaire de l'explosion du port de Beyrouth, l'enquête rejetée par le parquet
Le juge chargé de l'enquête sur l'explosion au port de Beyrouth en 2020 a continué de défier le pouvoir, mardi 24 janvier, en inculpant le procureur général. Cette décision, inédite dans l'histoire du Liban, a été rejetée par le parquet. A la surprise générale, Tarek Bitar a décidé lundi de reprendre son enquête sur cette explosion qui a fait plus de 215 morts et 6 500 blessés, en août 2020, malgré les énormes pressions politiques auxquelles il est soumis.
Le juge a commencé par inculper lundi deux hauts responsables de la sécurité pour "potentielle intention d'homicide". Puis mardi, Tarek Bitar a inculpé le procureur général près la Cour de cassation Ghassan Oueidate, ainsi que sept autres personnes, parmi lesquelles trois magistrats.
Toutes les décisions rejetées par le parquet
Mais l'enquête de Tarek Bitar a tourné court. Le parquet a rejeté toutes les décisions du juge, lui signifiant qu'il ne pouvait pas reprendre son enquête, selon un document obtenu par l'AFP. "Nous avons appris le retour du juge Bitar par la presse. Puisqu'il considère le parquet comme inexistant, nous le considérons aussi comme inexistant", a affirmé le procureur Ghassan Oueidate à l'AFP.
Tarek Bitar avait déjà dû interrompre son enquête en décembre 2021, du fait d'une quarantaine de poursuites lancées contre lui par des responsables politiques, notamment ceux qu'il souhaitait interroger. Le juge indépendant n'a pas d'affiliation politique connue et s'est mis à dos la plus grande partie de la classe politique, particulièrement le puissant Hezbollah pro-iranien qui avait exigé son remplacement.
L'explosion du 4 août 2020 avait été provoquée par le stockage sans précaution de centaines de tonnes de nitrate d'ammonium dans un entrepôt au port. Elle a été imputée par une grande partie de la population à la corruption et la négligence de la classe dirigeante, accusée également par les familles de victimes et des ONG de torpiller l'enquête pour éviter des inculpations.
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