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Syrie : pourquoi l'alliance franco-américaine est surprenante

Les deux pays ont des relations fortes mais à l'histoire souvent tumultueuse. Le "non" britannique à une intervention militaire est pour beaucoup dans ce rapprochement inattendu.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Le président américain Barack Obama et son homologue français François Hollande lors d'une réunion en marge au G8, le 18 juin 2013, à Enniskillen, en Irlande du Nord.  (BERTRAND LANGLOIS / AFP)

Ils semblent tous deux déterminés à lancer des frappes aériennes. François Hollande s'est entretenu pendant 45 minutes avec Barack Obama de la crise syrienne, vendredi 30 août. L'alliance entre le président français et son homologue américain sur une intervention militaire contre le régime de Bachar Al-Assad a de quoi surprendre à première vue. Francetv info vous explique pourquoi.

Parce que François Hollande et Barack Obama se dédisent sur l'ONU

Les deux hommes ont toujours juré d'agir par le canal unique de l'ONU. Or, ils pourraient se lancer dans une intervention sans le feu vert des Nations unies, car ils affirment partager, avant même le rapport des inspecteurs de l'ONU, "la même certitude sur la nature chimique de l'attaque" du 21 août près de Damas "et la responsabilité indubitable du régime"

La France a pourtant toujours déclaré qu'elle agirait sous résolution du Conseil de sécurité. Et comme le rappelle Slate, le député François Hollande, en 2003, avait réclamé un vote du Parlement sur un sujet similaire : la guerre en Irak. Cette fois-ci, le débat au Parlement sur l'intervention en Syrie ne donnera pas lieu à un vote. Barack Obama s'était également fait remarquer dès 2003 par son opposition à la guerre en Irak.

Parce qu'ils ne sont pas du même bord politique

Le principal allié des Américains est un président socialiste. Et ce détail n'est pas sans importance aux Etats-Unis, où les Français sont globalement pris de haut et où Barack Obama a dû répondre à de nombreuses reprises à des accusations de "socialisme" venant des républicains.

Jeudi soir, les observateurs américains évoquaient le fait que les Etats-Unis puissent faire cavalier seul, en oubliant que la France s'était déclarée "prête" à mobiliser des forces militaires.

Parce que l'allié historique des Etats-Unis est la Grande-Bretagne

Le refus surprise des Britanniques de participer à d'éventuelles frappes aériennes contre le régime syrien a pris de court les Etats-Unis et précipité ce rapprochement avec la France. Mais la Grande-Bretagne n'a guère apprécié la sortie du secrétaire d'Etat américain. Francophile et francophone, John Kerry a rappelé vendredi que la France était "le plus vieil allié" des Etats-Unis, une référence au rôle des Français en 1776 au moment de la guerre d'indépendance. Le marquis de La Fayette avait combattu les Britanniques aux côtés des Américains.

Une "gifle diplomatique" pour Londres, selon le Telegraph. Comme le rapporte Le Monde.fr, les médias britanniques se sont émus des propos de John Kerry, qui enterrent, selon eux, "la relation spéciale" qui unit les Etats-Unis et la Grande-Bretagne. The Sun a été jusqu'à publier en une un avis de décès de ces relations privilégiées.

Parce qu'ils ont un passé commun tumultueux

Ironie dans l'affaire syrienne, cet engagement déterminé de la France au côté des Américains intervient dix ans après la crise irakienne qui avait provoqué une tension sans précédent entre Washington et Paris, flamboyant opposant à l'invasion américano-britannique en Irak. A l'époque, les Français étaient régulièrement traités de "singes capitulards bouffeurs de fromage". Et la conseillère du président George W. Bush pour la sécurité nationale, Condoleezza Rice, résumait le sentiment ambiant à Washington en déclarant : "Il faut ignorer l'Allemagne, pardonner à la Russie et punir la France."

Décision symbolique, les frites, appelées "french fries" aux Etats-Unis, avaient même été rebaptisées par la droite américaine "Freedom fries".

Mais aujourd'hui, "on est dans une situation exactement inverse à celle de 2003", souligne Bruno Tertrais, de la Fondation pour la recherche stratégique. "Les Etats-Unis n'ont besoin de personne sur le plan militaire. Mais il est extrêmement important pour eux de ne pas être seuls sur le plan politique", estime-t-il. Reste à savoir quel sera l'engagement concret de la France et quels moyens elle mettra à disposition des Etats-Unis. 

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