Le "syndrome de La Havane" serait lié au renseignement russe, selon une enquête journalistique

Perte d'équilibre, maux de tête, troubles de la vision... Depuis 2016, plusieurs diplomates occidentaux ont été victimes de ces troublants symptômes. Une enquête journalistique révèle les agissements d'une unité du renseignement militaire russe.
Article rédigé par franceinfo avec AFP
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L'ambassade des Etats-Unis à La Havane (Cuba), le 21 février 2018. (ADALBERTO ROQUE / AFP)

Son nom de code : GRU29155. Sa spécialité : des opérations clandestines à l'étranger, assassinats ciblés et ingérences étatiques. Une enquête journalistique menée conjointement par The Insider, CBS et Der Spiegel révèle, lundi 1er avril, les sombres agissements d'une unité du renseignement militaire russe. Elle est soupçonnée d'avoir utilisé des micro-ondes ou des ultrasons comme armes secrètes à l’origine de ce qui a été baptisé le "syndrome de La Havane". 

A partir de 2016, des dizaines de diplomates américains et canadiens en poste à Cuba ont dit être frappés de troubles, notamment des migraines, vertiges, nausées, troubles de la vision... Ces "incidents anormaux de santé", selon la terminologie employée aux Etats-Unis, ont ensuite été signalés ailleurs dans le monde, en Chine, en Allemagne, en Australie, en Russie, en Autriche, et même à Washington.

Des soupçons d'utilisation "d'armes à énergie dirigée"

L'affaire a entraîné dès le début de vastes spéculations sur son origine. Certains responsables américains ont minimisé au départ les symptômes, parfois attribués au stress, d'autres évoquant en privé de possibles attaques et soupçonnant déjà des pays comme la Russie. Le renseignement américain avait jugé en mars 2023 "très improbable" qu'une puissance étrangère ou une arme soit à l'origine du mystérieux trouble.

Mais, selon l'enquête journalistique, qui a duré plus d'un an, ces diplomates ont pu être la cible d'une arme sonique de la Russie. Les trois médias disent avoir "découvert des éléments suggérant que ces incidents anormaux de santé (...) pourraient provenir de l'utilisation d'armes à énergie dirigée, maniées par des membres de l'unité 29155" du GRU, le service de renseignement militaire russe.

Moscou rejette une enquête "sans fondement"

Cette unité GRU29155 s'est déjà retrouvée au centre de plusieurs affaires. Elle a été accusée notamment de la tentative d'empoisonnement de l'ancien espion russe Sergueï Skripal au Royaume-Uni en 2018. "Son champ d'action est mondial pour la conduite d'opérations létales et d'actes de sabotage", a déclaré à The Insider un ancien haut responsable de la CIA, agence américaine de renseignement.

Moscou considère ces révélations "sans fondement". "Ce sujet a été gonflé dans la presse depuis plusieurs années déjà. Et depuis le début, c'est souvent associé à la Russie", a déclaré le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, lors d'une conférence de presse. "Mais personne n'a jamais publié de preuve convaincante."

L'enquête des trois médias avance que les premiers cas de syndrome de La Havane se seraient produits en Allemagne deux ans avant ceux rapportés à Cuba en 2016. A Francfort, un employé au consulat des Etats-Unis aurait ainsi perdu connaissance en raison de ce qui s'assimilerait à un "fort rayon d'énergie". Une agente du FBI travaillant dans le contre-espionnage explique, elle, avoir été victime en 2021 d’une expérience troublante chez elle en Floride. "Dans mon oreille droite… boum, un son métallique aigu (…) qui m’a projetée en avant à un angle d’environ 45 degrés", raconte-t-elle à CBS.

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