Cet article date de plus de neuf ans.

Russie : que vont devenir les Mistral ?

L'affaire des Mistral est «close», la France va rembourser la Russie pour les deux navires qu'elle avait commandé en 2011. Entre les déclarations sur les coûts d'entretien des navires et les spéculations quant à leur revente, il est temps de faire le point.
Article rédigé par Celia Mascré
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Le navire de guerre Mistral «Sébastopol» lors de ses premiers essais en mer, le 16 Mars 2015 au large de Saint-Nazaire. (GEORGES GOBET / AFP)

Match nul, et clap de fin. Le Mistral Gate est terminé, la France va rembourser la Russie. C'est ce qu'a annoncé jeudi 6 aout le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian sur RTL, indiquant que le montant du remboursement sera inférieur à 1,2 milliard d’euros. Mais que vont devenir les deux Mistral, Vladivostok et Sébastopol ?

Récupération des navires par la France, une option inenvisageable
Le premier cas de figure aurait été de les intégrer à la flotte française. Seul hic, le livre blanc rédigé en 2013, qui  fixe les orientations stratégiques de la France pour les quinze prochaines années, ne prévoit pas une telle mesure dans son budget. Cela impliquerait de réarmer ces deux navires, à savoir embarquer un équipage suffisant pour les faire fonctionner. Cela correspondrait environ à 170 personnes par bateau, chiffre à multiplier par deux pour assurer des permanences : au final, il faudrait embaucher 680 officiers, officiers mariniers, quartiers-maîtres et matelots. La France n'a pas les moyens, sachant qu'elle a déjà augmenté son budget pour les Opex (opérations extérieures) pour les actions qu'elle mène, principalement en Afrique.
Comme leur nom l'indique, les Mistral sont des «bâtiments de projection et de commandement» (BPC), mais plutôt que des navires de commandement, la France aurait besoin d'augmenter ses capacités défensives. Or, la flotte française ne possède qu'un seul porte-avion, le Charles de Gaulle. Plus que deux nouveaux Mistral, la France aurait besoin d'un second porte-avion permettant d'avoir une projection de force permanente.

Ecorché du navire de guerre Mistral, dont la France a reporté la livrason à la Russie. (PLD/DMK/FH K. TIAN/P. DEFOSSEUX / AFP)


Revendre les navires : oui mais à quel prix ?
Le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian s’est montré confiant jeudi 6 août, affirmant qu'«un certain nombre de pays, ils sont nombreux, ont fait connaître leur intérêt pour ces bateaux», sur RTL. Au même moment, lors de l'ingauguration du nouveau Canal de Suez, le Caire se serait déclaré candidat au rachat des deux navires. Vendre d'occasion ces bâteaux oui, mais à condition de s'aligner sur les prix pratiqués à l'international. En effet, l'Espagne et le Canada ont la réputation de fournir ce type de navire à plus bas coût que la France.
La revente des Mistral implique surtout une «dé-russification» des navires, adaptés aux spécifications de la marine russe. Il faudrait donc démonter des équipements, changer les systèmes de communication, les interfaces homme-machine et toute la documentation, qui est en langue russe. Le député Thierry Mariani estime le coût entre «200 à 300 millions d'euros», mais ces chiffres sont largement exagérés. Il suffirait en réalité d'engager quelques officiers pour retirer les équipements et les étiquettes sur les boitiers. Le coût d'une telle opération est clairement négligeable.


Vu leur coût de maintenance et de gardiennage, estimés à 5 millions par mois, leur destruction serait aussi envisageable.

L'affaire des Mistral reste un mystère pour les analystes. Il est difficile de concevoir que «seul» le conflit ukrainien soit la cause de l'annulation du contrat. D'ailleurs, nos voisins européens, qui avaient des contrats en cours avec la Russie avant l'embargo, se sont arrangés pour honorer leurs commandes avant celui-ci. Les relations historiquement privilégiées au plan diplomatique, entre la Russie et la France sont en train de prendre un sérieux coup. La France, qui s'est longtemps positionnée comme une zone tampon entre la Russie et les Etats-Unis, prend un violent virage dans ses relations avec Moscou.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.