: Reportage "Nous ne pouvons pas rester là" : en Syrie, la communauté alaouite s'inquiète face à la brusque montée des tensions
En peu de temps, des incidents secouent plusieurs villes du nord et de l’est de la Syrie majoritairement peuplées par des Alaouites, la communauté dont est issu l'ex-dictateur Bachar al-Assad. Des combats ont également eu lieu dans le bastion alaouite de Tartous, dans l'ouest du pays, faisant six morts parmi des fidèles de l'ancien président syrien. Ce regain de tension s'est propagé jusqu'à Damas et le quartier de Mezzeh, où réside également une majorité de cette communauté.
Des centaines d'Alaouites, dont Ali et Hussein, ont envahi mercredi 25 décembre la place des Omeyyades et le quartier de Mezzeh en signe de protestation. Habituellement calme, le secteur est désormais plongé dans l'angoisse. Les Alaouites ont peur. "Nous ne pouvons pas rester là, silencieux, quand les forces de sécurité piétinent les portraits de Nasrallah et insultent nos symboles sacrés. Nous avons une dignité, et on ne l’acceptera pas", s'emporte Ali.
"Nous avons souffert, tout comme tous les Syriens"
Les Alaouites redoutent d’être pris pour cible par la nouvelle administration syrienne, accusée de vouloir affaiblir leur communauté, autrefois protégée par le régime de Bachar al-Assad. "Au début de la révolution, on nous a harcelés. Aujourd’hui, tout le monde doit comprendre que nous avons souffert, tout comme tous les Syriens", explique Hussein.
Face à la montée des tensions, le groupe islamiste rebelle HTS a imposé un couvre-feu de 20 heures à 8 heures, pour protéger la population, selon eux. Mais à Damas, la peur est palpable. Imad Abou Talha, directeur des opérations sécuritaires au ministère de l'Intérieur syrien, tente de rassurer. Il affirme que les forces de l'ordre sont là pour protéger tout le monde : "Nous ne tirons pas sur des personnes désarmées. Nos opérations militaires visent à libérer les Syriens et à leur permettre de revendiquer leurs droits".
Le directeur reste malgré tout ferme. "Un groupe cherche à semer la discorde, et nous réclamons que le drapeau syrien soit hissé lors de telles manifestations", indique-t-il, en référence aux rassemblements alaouites.
Sur le terrain, la situation semble toutefois différente. Le gouvernement intérimaire accuse l’Iran, soutien historique du régime de Bachar al-Assad, de semer la division et la peur. La tension est palpable, les regards furtifs et les chuchotements dans les ruelles en disent long. De nombreux Alaouites confient se sentir de plus en plus isolés et abandonnés. Dans une situation toujours plus précaire, beaucoup ne croient plus en la promesse d’une sécurité totale.
Lancez la conversation
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour commenter.