Quatre questions sur la détention du photojournaliste français Mathias Depardon en Turquie
Jeudi, le président turc, Recep Tayyip Erdogan, s'est entretenu avec Emmanuel Macron et a promis d'examiner "rapidement" le cas du journaliste, détenu depuis 17 jours et en grève de la faim.
C'est peut-être un tournant dans la situation de Mathias Depardon, détenu en Turquie depuis dix-sept jours. Emmanuel Macron est "intervenu en faveur" du photojournaliste français lors d'un entretien avec Recep Tayyip Erdogan, en marge d'un sommet de l'Otan à Bruxelles, jeudi 25 mai, et le président turc a affirmé "qu'il examinerait rapidement sa situation", selon l'Elysée. Franceinfo revient sur cette affaire en quatre questions.
Quand Mathias Depardon a-t-il été arrêté ?
Mathias Depardon a été arrêté le 8 mai à Hasankeyf, dans la province de Batman, dans le sud-est de la Turquie. Il y effectuait un reportage pour le magazine National Geographic. Âgé de 36 ans, il est installé depuis cinq ans en Turquie, où il a travaillé pour de nombreuses publications comme journaliste indépendant.
Il a rapidement été transporté à Gaziantep, également dans le sud-est du pays, où il est détenu depuis. Une décision d'expulsion a pourtant été prise à son encontre le 11 mai, mais elle n'a pas été appliquée, sans que les autorités turques n'expliquent pourquoi.
Que lui reproche la Turquie ?
Selon Reporters sans frontières (RSF), Mathias Depardon a été interpellé pour "propagande terroriste". "Il aurait pris des photos de jeunes militantes du PKK", explique le secrétaire général de RSF, Christophe Deloire, pour qui "prendre des photos de militants n'est pas de la propagande, ni se rendre complice de qui que ce soit". Ces accusations de soutien au parti kurde, classé "terroriste" par Ankara, pourraient conduire à une procédure judiciaire, selon le représentant de RSF en Turquie, Erol Onderoglu.
D'après ce dernier, les autorités turques reprochent aussi au photojournaliste de travailler sans carte de presse, sa demande de renouvellement n'ayant pas abouti. Ce qui peut conduire à son expulsion du pays, explique Erol Onderoglu.
Cette arrestation s'inscrit dans un contexte de répression contre les journalistes en Turquie. Depuis le putsch raté et l'instauration de l'état d'urgence, en juillet 2016, plus de 140 médias ont fermé, plus de 700 cartes de presse ont été annulées et plus de 100 journalistes sont emprisonnés, recense RSF. Selon un responsable local de l'organisation, plusieurs dizaines de journalistes étrangers ont été expulsés durant cette période.
Dans quelles conditions est-il détenu ?
A Gaziantep, Mathias Depardon a été transféré dans un centre d'accueil géré par la Direction des affaires migratoires. Selon sa mère, interrogée jeudi sur franceinfo, il n'a vu personne depuis le début de sa détention, à l'exception de son avocat turc. "Il n'a aucun téléphone, il est dans l'obscurité et il n'a reçu qu'un livre sur quatre qu'il avait demandés. Il a demandé du papier mais il n'a pas reçu de stylo, décrit-elle. Il n'est pas maltraité, mais qu'est-ce qu'être bien traité quand on est dans une cellule ?"
Le 21 mai, Mathias Depardon a entamé une grève de la faim. "Nous n'avons pas eu de ses nouvelles depuis", expliquait un responsable de RSF à franceinfo jeudi. "J'ai entendu qu'il n'allait pas bien", s'inquiète sa mère.
Qui se mobilise pour le défendre ?
La mère de Mathias Depardon et une dizaine de militants de RSF se sont rassemblés jeudi devant l'ambassade de Turquie à Paris pour protester contre sa détention, mais ils n'ont pas été reçus. Mercredi, RSF avait appelé la France à "faire monter la pression" sur Ankara. La mère du journaliste a expliqué, jeudi, "compter beaucoup" sur la rencontre entre Emmanuel Macron et Recep Tayyip Erdogan pour faire évoluer la situation.
Quelques heures plus tard, l'Elysée a indiqué que "le président Macron [était] intervenu en faveur" du journaliste français lors d'une entrevue avec Recep Tayyip Erdogan en marge du sommet de l'Otan à Bruxelles. Le président turc lui aurait promis "qu'il examinerait rapidement sa situation".
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