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Election américaine : quatre recours judiciaires lancés par Donald Trump pour arracher la victoire à Joe Biden

Depuis mardi soir, le camp Trump a lancé un assaut judiciaire dans plusieurs Etats clés où les résultats serrés peuvent faire pencher la balance d'un côté comme de l'autre.

Article rédigé par franceinfo
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Des partisans de Donald Trump manifestent pour demander l'arrêt du décompte des votes dans le Michigan (Etats-Unis), à Détroit, le 4 novembre 2020.  (ELAINE CROMIE / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)

L'ancien homme d'affaires n'entend pas facilement lâcher l'affaire. Alors que l'issue du scrutin présidentiel qui oppose Donald Trump à son adversaire démocrate, Joe Biden, restait à déterminer vendredi 6 novembre, le président sortant n'a de cesse de crier à la fraude. Depuis la fermeture des bureaux de vote mardi dans la soirée, ses équipes ont lancé plusieurs procédures juridiques en vue d'une possible défaite dans certains Etats clés, où les résultats sont annoncés très serrés. 

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Les démocrates estiment ces plaintes sans fondement juridique. De leur côté, les experts de la vie politique américaine jugent la fraude électorale très rare aux Etats-Unis. Néanmoins, en fonction des décisions des juges, ces recours pourraient retarder de plusieurs jours, voire plusieurs semaines, l'officialisation des résultats, et mettre des bâtons dans les roues d'un éventuel président Biden. 

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Alors que les deux camps ont fait appel à des équipes de plusieurs centaines d'avocats, voici ce qu'il faut savoir des principales initiatives lancées par le président américain avec plus ou moins de succès. 

Un recomptage des bulletins dans le Wisconsin 

En quoi consiste la plainte ? Dès l'annonce d'une avance décisive de Joe Biden dans le Wisconsin, mercredi soir, les médias américains lui ont attribué les 10 grands électeurs correspondants. Aussitôt, l'équipe de Donald Trump a annoncé son intention de demander à la Cour suprême de l'Etat que tous les bulletins de vote soient recomptés. La loi du Wisconsin autorise en effet un candidat à demander un recomptage si l'écart est inférieur ou égal à 1% des suffrages. Or environ 20 000 voix séparaient jeudi les deux candidats, soit 0,624 % d'un total de près de 3,3 millions de bulletins de vote comptés dans cet Etat, rapporte Associated Press* (AP). 

Selon l'agence, le camp du républicain a également évoqué "des remontées concernant des irrégularités dans plusieurs comtés" du Wisconsin. De plus, le directeur de campagne du président, Bill Stepien, a fait état d'une erreur d'impression pouvant concerner jusqu'à 13 500 bulletins, lesquels ont dû être dupliqués le jour de l'élection (après intervention de la Cour suprême locale) puis introduits dans les machines de comptage. Selon un organisateur contacté par AP, le décompte de ces bulletins un peu particuliers a été réalisé sous l'œil d'observateurs ainsi que de membres de la garde nationale du Wisconsin. 

A-t-elle des chances d'aboutir ? "Si l'écart est de moins de 1%, ce qui pourrait être le cas, il faudra recompter", a déclaré sur franceinfo jeudi matin Simon Grivet, maître de conférences en histoire et civilisation des Etats-Unis à l’université de Lille. "Cela prendra de 24 à 48 heures. Il y aura des délais et il n'est pas exclu que, dans une semaine, on y soit encore." Toutefois, "les procédures locales sont suivies de manière très rigoureuse et quand on aura compté tous les bulletins, la victoire de Biden, même si elle est étroite, sera difficilement contestable", poursuit l'expert. Car si les recomptages de voix peuvent rattraper quelques centaines de bulletins, jamais une telle procédure n'a permis de combler un écart aussi important que celui qui sépare Trump de Biden, explique le site de la radio publique NPR*. 

L'arrêt du dépouillement dans le Michigan 

En quoi consiste la plainte ? Avant d'être attribué à Joe Biden, cet Etat clé semblait près de tomber dans l'escarcelle du président sortant à l'issue des décomptes effectués le 3 novembre, jour de l'élection. En déposant une plainte, l'équipe du président espérait parvenir à figer les résultats à cette date, afin d'empêcher la comptabilisation des votes par correspondance et procuration, qui s'avèrent très majoritairement à l'avantage de Joe Biden.

L'équipe du président a accusé la secrétaire d'Etat locale, la démocrate Jocelyn Benson, d'avoir autorisé le dépouillement de bulletins de vote par procuration en l'absence d'équipes bipartisanes d'observateurs. Un homme s'était plaint d'avoir été "de façon inappropriée conduit hors d'un site de comptage où il assistait au dépouillement des bulletins des votes par procuration", selon le quotidien Detroit Free Press*.

A-t-elle des chances d'aboutir ? A la suite d'une première audition par visioconférence, la juge de la cour des réclamations du Michigan chargée de l'affaire a déclaré que la plainte déposée par les avocats de Donald Trump serait formellement rejetée dans les jours à venir, a relaté CNN. Elle a déclaré ne pouvoir se baser sur de simples faits rapportés. L'avocate représentant l'Etat du Michigan a quant à elle fait valoir que, le décompte des bulletins dans l'Etat étant déjà terminé, la valeur de cette plainte était discutable, poursuit CNN. 

L'arrêt du dépouillement en Pennsylvanie 

En quoi consiste la plainte ? De toutes les initiatives judiciaires initiées par l'équipe de Donald Trump, c'est la volonté du président d'interrompre le dépouillement en Pennsylvanie qui a le plus de chances d'arriver jusqu'à la Cour suprême des Etats-Unis, la plus haute juridiction du pays. 

Bien conscient que le dépouillement des votes par correspondance réduit l'écart entre les deux candidats (à la faveur du démocrate), le camp Trump a demandé mercredi à la Cour suprême l'autorisation de venir se greffer à une plainte déposée par le Parti républicain local avant l'élection. Celle-ci vise à annuler une décision prise cet été par la Cour suprême de Pennsylvanie, permettant aux bulletins de vote arrivés par courrier jusqu'à la date du 6 novembre d'être pris en compte s'ils n'ont pas été postés après le jour du scrutin (le 3 novembre).

A-t-elle des chances d'aboutir ? Rien n'indique que la Cour suprême décidera de revenir sur la décision de sa "petite soeur". Les juges, alors au nombre de 8, avaient déjà été saisis en urgence par le Parti républicain le 19 octobre, sans parvenir à trancher, rapporte The New York Times*. Neuf jours plus tard, une demande du Parti républicain pour accélérer la procédure visant à déterminer si la Cour suprême de Pennsylvanie a agi en accord avec la loi avait été rejetée.

Si la Cour suprême américaine venait à se pencher de nouveau sur la question, la nouvelle juge nommée par Donald Trump, la conservatrice Amy Coney Barrett, devrait avoir un rôle décisif. En effet, elle n'avait pas pris part à la décision survenue dans ce dossier au lendemain de son investiture, le 27 octobre, arguant qu'elle n'avait pu suffisamment l'étudier. 

La mise à l'écart de bulletins supposés tardifs en Géorgie 

En quoi consiste la plainte ? En Géorgie aussi, l'avance de Trump s'est réduite comme peau de chagrin, le candidat républicain étant débordé par son rival vendredi matin, selon AP. Mercredi, l'équipe de campagne du président sortant a déposé une plainte exigeant que les bulletins arrivés en retard dans le comté de Chatham soient isolés et exclus du vote.

Dans cette plainte, détaillée par la chaîne locale WSB-TV*, un observateur du Parti républicain explique qu'une cinquantaine de bulletins dont il ignore la provenance ont été comptabilisés hors de sa supervision. Selon lui, ils ont pu être déposés après la fermeture des bureaux de vote à 19 heures, poursuit la chaîne, poussant le parti à mettre en doute le comptage des votes par correspondance.

"Nous ne permettrons pas aux organisateurs démocrates de voler l'élection du président Trump avec des bulletins tardifs et illégaux", clame un membre de l'équipe Trump cité par WSB-TV. Là encore, les autorités incriminées se sont défendues de toute pratique illégale, rapporte le site WTOC. 

A-t-elle des chances d'aboutir ? Le juge en charge de cette affaire a rejeté la plainte après avoir auditionné, jeudi, le président du conseil des officiers de l'Etat civil en charge de l'élection dans le comté. Selon le juge, il n'existe aucune preuve indiquant que la loi électorale n'ait pas été respectée dans ce comté. 

Cités par AP*, des membres de la campagne Trump assurent toutefois envisager de déposer des plaintes de ce type dans une douzaine de comtés à travers l'Etat.

*Le lien renvoie vers un contenu en anglais

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