Cet article date de plus de sept ans.

Dominique Wolton écrit un livre avec le pape, "un homme extrêmement cultivé qui parle avec une simplicité invraisemblable"

Dans un livre, le pape François se confie via des entretiens accordés à Dominique Wolton. Le chercheur français a été impressionné par sa "simplicité invraisemblable".

Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
Le chercheur français Dominique Wolton a réalisé une douzaine d'entretiens avec le pape pour en tirer un livre qui sortira le 6 septembre.  (VINCENT ISORE / MAXPPP)

Crise des migrants, laïcité, pédophilie dans l'Église ou rapports avec l'Islam... Le pape François se confie dans un livre à paraître le 6 septembre. Le souverain pontife a répondu à Dominique Wolton dans une série d'entretiens, "pas moins de douze rendez-vous sur un an". Le chercheur français retient que "cet homme qui est extrêmement cultivé parle avec une simplicité invraisemblable". 

franceinfo : Comment avez-vous convaincu le pape et pourquoi a-t-il accepté à votre avis ? 

Dominique Wolton : Je lui ai proposé le projet sans le connaître du tout. Je lui ai écrit en disant "Voilà qui je suis, ce que j'ai fait et je vous propose un livre sur la politique". J'ai joint le plan du livre que j'avais préparé. Ce qui l'a amené à accepter, c'est d'abord le fait que je suis un scientifique. Ça le rassurait par rapport à un journaliste, ce n'était pas la même problématique du tout. J'étais un laïc français, ce qui l'intéressait parce qu'il aime beaucoup la France et il aime bien le débat sur la laîcité. La deuxième chose, qui n'était pas prévue, c'est que quand nous nous sommes rencontrés, il y a eu une vraie rencontre humaine. Des atomes crochus ont existé entre nos deux histoires qui n'ont rien à voir l'une avec l'autre, mais ça a créé ce dialogue et cette communication.

Comment ça se passait ? Vous étiez en tête à tête ?

Oui. La première fois, on m'a fait attendre dans un petit bureau et j'avais un interprète pour m'aider parce que je ne suis pas un génie en italien ni en espagnol. La porte s'est ouverte et cet homme est arrivé en blanc. Ensuite, nous étions tout le temps seuls. Ce n'est pas facile de parler avec un pape ! 

Quel genre d'hommes avez vous eu en face de vous ? Un excellent communicant ? Un jésuite ? Le pape ? 

Ce qui m'a frappé tout de suite c'est la bonté, les yeux, la gentillesse, une espèce de tendresse incroyable, une volonté très forte, une lucidité réelle et une simplicité étonnante. On s'est branchés l'un sur l'autre intellectuellement. Tout de suite après, ça s'est développé sur un plan plus amical mais il n'y a eu aucune langue de bois ou en tout cas le minimum. Par rapport au nombre d'hommes politiques que j'ai vus, de présidents de la République, d'hommes politiques prétentieux avec leur langue de bois, lui c'est d'une simplicité ! C'est la raison de son succès mondial. Cet homme, qui est extrêmement cultivé, parle avec une simplicité invraisemblable. Il n'est pas représentatif de l'Église traditionnelle. 

Il vous a paru seul ? Lui même parle d'une cage... 

Oui, c'est la cage du Vatican ! Je n'avais pas réalisé combien on est enfermé même si, comme il le dit, c'est une cage très belle. Je pense qu'il n'est pas seul. Il y a une bonne partie des catholiques qui sont avec lui et une bonne partie des catholiques qui lui sont hostiles mais il a beaucoup plus de rencontres humaines, politiques et culturelles avec les athées et les agnostiques parce qu'il parle de politique. C'est pour ça que ça m'intéressait. Il est extrêmement sensible à la société : comme il le dit, "l'Église doit faire de la grande politique, pas de la petite 'politicaille'". Par conséquent, il déteste l'hypocrisie, la rigidité, les critiques sur les mœurs. Il a une vision de l'humain à la fois extrêmement chrétienne et en même temps sans illusion. Ce n'est pas un homme de rupture. Ce qui me frappe c'est que c'est vraiment de la grande politique, au sens où son obsession est de faire des ponts et non pas des murs, c'est-à-dire relier et ne pas exclure. Je trouve que c'est d'une intelligence politique extrême, dans le sens le plus grand du terme "politique". 

C'est un ami pour vous maintenant ? 

Je pense que ce que je peux représenter pour lui et ce que je peux lui dire est important, et inversement. Vous savez, c'est toujours comme ça dans ma vie. J'ai eu une relation très forte avec Raymond Aron, très forte avec Jean-Marie Lustiger, assez forte avec Jacques Delors et très forte avec lui. En tout cas, c'est cette rencontre humaine et cette espèce de lucidité, finalement cet optimisme, que je retiens. 

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.