Le pape François, le cardinal Bustillo et le président Macron... L'enjeu politique derrière l'aspect religieux de la visite papale en Corse

Le pape François est attendu par le cardinal Bustillo à Ajaccio, dimanche. Emmanuel Macron ne sera sur place qu'à la fin du déplacement pour un court entretien.
Article rédigé par Victoria Koussa
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Le pape François salue les pèlerins, avant la messe au stade Vélodrome de Marseille, le 23 septembre 2023. (CHRISTOPHE SIMON / AFP)

C'est une première dans l'histoire : le pape François se rend en Corse, dimanche 15 décembre, après Strasbourg, il y a dix ans, et Marseille, l'an dernier. Il assistera à une messe mais surtout à un colloque sur la piété populaire, lui qui n'a pas voulu se rendre à la réouverture de Notre-Dame de Paris. Derrière l'aspect religieux, sa venue a aussi une portée politique.

C'est d'abord l'histoire d'une rencontre entre le pape François et les Corses. Il y a un peu plus d'un an, quand l'évêque de l'île, François Bustillo, est arrivé au Vatican pour se faire élever au rang de cardinal, accompagné de trois avions Air Corsica, 800 invités des politiques, et des habitants qui se sont mis à chanter place Saint-Pierre, des chants corses. "Ton peuple fait du bruit", lance alors le pape au cardinal qui lui répond : "Mon peuple est vivant, le peuple corse".

"Bustillomania"

La connexion a lieu avant le travail de deux hommes, en coulisses : le cardinal Mamberti, très haut dans la hiérarchie au Vatican qui est corse et a donc prêché pour sa paroisse, et le cardinal Bustillo qui a joué un rôle central. Il est proche du pape et a réussi à connecter les Corses après avoir gagné leur confiance.

Avec un rythme de deux à trois messes par jour, il va dans tous les villages. "Il fait de la politique", confie le proche d'un élu de premier plan. Au point de parler de "Bustillomania". Le cardinal est même parvenu à sauver in extremis ce déplacement, menacé par un regain de colère sur l'île, avec une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux qui a ramené le calme.

Un revers pour Emmanuel Macron

Ce déplacement est aussi perçu comme un revers pour Emmanuel Macron parce que le chef de l'Etat n'a pas réussi à faire venir le pape à son grand événement : la réouverture de Notre-Dame de Paris. François avait été froissé par la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques avec la représentation de la Cène. Il aurait aussi vécu l'invitation à Notre-Dame comme une convocation.

"Il est enraciné dans les petits territoires, préfère le petit peuple aux grandes commémorations", décrypte un député. Signe peut-être d'une vexation réciproque : le président sèche quasiment toute la visite. Il ne sera en Corse qu'avant le départ du pape pour un court entretien.

Les Corses, eux, attendent une révision de la Constitution, qui n'arrive toujours pas, pour faire évoluer leur statut et aller vers plus d'indépendance. Un élu nous invite à tendre l'oreille, il espère entendre le pape dire deux, trois mots en corse et évoquer dans son discours le "peuple corse", un terme lourd de sens sur l'ile, signe pour les Corses de la reconnaissance de leur singularité.

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