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Montebourg, Titan et la CGT Goodyear : échange d'amabilités en quatre actes

Vous avez manqué un épisode ? Francetv info revient en quatre actes sur cet échange d'amabilités peu ordinaire.

Article rédigé par franceinfo
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Un manifestant brandit un drapeau de la CGT à l'usine Goodyear d'Amiens (Somme), menacée de fermeture, le 12 février 2013. (GONZALO FUENTES / REUTERS)

Un courrier du patron de Titan, une réponse de la CGT à la radio, puis une réponse du gouvernement par lettre et enfin une interview du même patron dans un grand média français... La reprise de l'usine Goodyear d'Amiens-Nord (Somme) est l'occasion d'échanges virulents, parfois qualifiés d'"insultants", entre un repreneur américain potentiel et la France. Vous avez manqué un épisode ? Francetv info revient en quatre actes sur cet échange croisé peu ordinaire.

Acte 1 : le PDG de Titan brocarde les "soi-disant" salariés de Goodyear

Dans son courrier adressé au ministre du Redressement productif, le patron de Titan International raille les "soi-disant ouvriers" de l'usine de pneus Goodyear d'Amiens-Nord. "J'ai visité cette usine à plusieurs reprises, écrit Maurice M. Taylor. Les ouvriers français sont beaucoup payés, mais ne travaillent que trois heures. Ils ont une heure de pause au petit-déjeuner et au déjeuner, parlent pendant trois heures et travaillent pendant trois heures. J'ai fait part de cette remarque aux syndicats. Ils m'ont dit que ça marchait comme ça en France !" 

Maurice M. Taylor ironise ensuite : "Qu'a le syndicat fou ? Il a le gouvernement français (...) Le fermier français veut des pneus pas chers. Il se moque de savoir s'ils viennent de Chine ou d'Inde (...)". "Titan va acheter un fabricant de pneus chinois ou indien, payer moins d'un euro l'heure de salaire et exporter tous les pneus dont la France a besoin", menace-t-il. "Vous pouvez garder les soi-disant ouvriers."

Acte 2 : pour la CGT, le PDG est proche de l'"asile psychiatrique"

Au micro d'Europe 1, mercredi matin, Mickaël Wamen, le représentant de la CGT, majoritaire à l'usine Goodyear d'Amiens-Nord, a estimé que la lettre adressée par le PDG de Titan était une "insulte totale""Ce n'est pas une lettre incendiaire, c'est une lettre insultante", a-t-il réagi. Et le syndicaliste enfonce le clou : pour lui, le patron de Titan "envoie un signal fort, c'est que ce directeur d'une multinationale est plus près d'un asile psychiatrique que de pouvoir tenir les rênes d'une multinationale".

Pour Mickaël Wamen, cette lettre "conforte" le syndicat, accusé de porter une part de responsabilité dans le projet de fermeture du site, dans le fait qu'il a eu raison. "Il dit qu'on est un syndicat fou, que le gouvernement, c'est de la merde, que [le président américain Barack] Obama est un rigolo et qu'il va aller produire en Chine. Tout ça quand on le met bien dans l'ordre, ça ne veut pas dire grand chose", a ajouté le syndicaliste.

Acte 3 : Montebourg dénonce "l'ignorance parfaite" du patron de Titan

Mercredi soir, Les Echos ont publié la réponse écrite d'Arnaud Montebourg à Maurice M. Taylor (le texte entier est disponible ici). "Vos propos, aussi extrémistes qu'insultants, témoignent d'une ignorance parfaite de ce qu'est notre pays, la France, commence le ministre, de ses solides atouts, comme de son attractivité mondialement reconnue et de ses liens avec les Etats-Unis d'Amérique."

Le ministre poursuit avec véhémence : "Surtout, loin de vos propos aussi ridicules que désobligeants, l'ensemble de ces entreprises connaît et apprécie la qualité et la productivité de la main d'œuvre française, l'engagement, le savoir-faire, le talent et les compétences des travailleurs français." Arnaud Montebourg énumère ensuite une série de mesures destinées à accompagner la croissance et défend "la qualité du dialogue social en France".

La chute de sa lettre ne manque pas d'ironie : "En attendant, soyez assuré de pouvoir compter sur moi pour faire surveiller par les services compétents du gouvernement français avec un zèle redoublé vos pneus d'importation. Ils veilleront tout particulièrement au respect des normes applicables en matières sociale, environnementale et technique."

Acte 4 : l'étonnante interview du PDG de Titan au "Figaro"

Mais l'histoire ne s'arrête pas là. Le même jour, le PDG de Titan a accordé une interview au Figaro, publiée dans la soirée. "Je n'ai pas voulu insulter les Français, explique-t-il. Ce que j'ai voulu dire c'est que le syndicat de l'usine d'Amiens est tombé sur la tête. Je veux que les ouvriers travaillent. Si les ouvriers français travaillaient, ils seraient aussi compétitifs que les Allemands, les Britanniques ou les Américains (...) Le problème est que les Français sont trop chers à cause notamment de leurs avantages sociaux."

Sur le fond, Maurice M. Taylor assure qu'il n'est pas un amateur. "Je connais le pneu. Je ne passe pas mon temps dans les salles de réunion. Je descends dans les usines. Je me salis les mains. Je transpire. Je sais ce que c'est qu'une machine. Je peux parler aux ouvriers dans leur langue. Et pourtant, je ne parle pas de langue étrangère et je ne parle pas correctement l'anglais non plus!"

Et le patron de Titan d'adresser un message de réconciliation à la France. "J'aime la France. J'aime les femmes françaises. Je n'ai pas oublié que La Fayette nous a sauvés. Il faut que les Français comprennent : leur mode de vie va disparaître s'ils ne changent pas leurs habitudes."

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