Médias : « Fiertés », une série réalisée par Philippe Faucon, jeudi 3 mai à 20h50 sur Arte
De la veille de l’arrivée de François Mitterrand au pouvoir à l’adoption du mariage pour tous, une fresque intime et familiale en trois épisodes. Retour sur les combats pour les droits des minorités sexuelles en France à travers trois destins d'hommes sur plusieurs générations.
De la dépénalisation tardive de l’homosexualité au début des années 80, dans la foulée de l’élection de François Mitterrand, à l’adoption de la loi Taubira en 2013, Philippe Faucon retrace, au travers du destin de Victor (Benjamin Voisin puis Samuel Theis) et des siens, le combat en France des minorités sexuelles pour leur reconnaissance et leurs droits. Une histoire contée en douceur et centrée sur le récit intimiste d’une famille et d’un couple, sans oublier pour autant la violence symbolique et concrète subie par les homosexuels. Au sein d’un casting de choix, où chacun incarne son rôle, petit ou grand, avec une intensité retenue, le trio de tête constitué par Samuel Theis (« Party Girl », « Un village français »), Stanislas Nordey (directeur du Théâtre National de Strasbourg) et Frédéric Pierrot (« Un homme est mort », « Les Revenants ») porte ce récit émouvant.
Extrait d’entretien avec Philippe Faucon, réalisateur de la série
En toute discrétion et avec une intransigeante simplicité, Philippe Faucon tourne des films depuis bientôt 30 ans. Après la consécration de « Fatima », « Fiertés » apporte une nouvelle pierre à une oeuvre en prise avec la société française, qui s’attache à mettre en lumière les gens qu’on ne regarde pas.
Qu’est-ce qui vous a incité à vous associer à ce projet, d’abord imaginé par les scénaristes José Caltagirone et Niels Rahou ?
D’abord le fait qu’il s’agissait de trois époques que j’ai connues, qui étaient là évoquées à travers l’évolution d’un couple d’hommes. J’ai trouvé qu’il y avait une importance à revenir sur cette histoire, au travers de ces trois périodes. Comme beaucoup de gens, j’ai été assez abasourdi de voir qu’en 2013, en France, des centaines de milliers de personnes ne semblaient avoir rien d’autre à faire de leurs vies que de s’opposer, de façon aussi acharnée et continue, aux droits évidents et naturels des autres.
La forme de la série télévisée vous a-t-elle semblée particulièrement pertinente pour raconter cette histoire ?
Oui, car le récit par épisode permet de se centrer sur une succession de segments, chacun consacré à un personnage, une époque, un événement, sur un temps que le format unitaire ne permettrait pas. En même temps, comme il s’agit d’une mini-série, les trois épisodes sont censés être regardés successivement, au cours de la même soirée. L’ensemble constitue donc un récit continu, au sein duquel chaque épisode vient relancer l’intérêt pour le suivant.
Qu’ont en commun les personnages de « Fiertés » avec ceux de vos autres films ?
Ces personnages partagent le fait qu’ils ont à affirmer ce qu’ils sont, en opposition à des regards qui les réduisent ou les enferment, ou qui tentent de les maintenir en dehors de l’espace commun, dans la marge. J’ai souvent mis en avant des personnages de femmes, ici ce sont des destins masculins. Peu importe : il s’agit toujours de les faire exister en leur apportant une densité, une profondeur. Je peux avoir – comme les autres auteurs du projet – une compréhension plus immédiate envers des personnages proches de moi, ou une curiosité plus forte envers des personnages différents de moi, mais cela ne recoupe pas forcément le fait qu’ils soient hommes ou femmes. Il y a des hommes qui me sont étrangers et des femmes qui me sont comme des miroirs !
Entre chaque épisode, il y a une ellipse de plusieurs années. Vous faites de ces « lacunes » une force, car en laissant des choses en creux dans le récit, vous leur donnez une autre résonance…
L’ellipse est une figure très particulière au cinéma. En choisissant des segments dans un récit, en montant des images et des sons, on a le pouvoir de donner à certaines choses une présence souterraine, mais une présence certaine. Un peu comme en musique, lorsque un motif secondaire intervient en arrière-plan d’un motif principal. Comme en musique, il s’agit de trouver le juste rapport de l’un à l’autre, ni trop « elliptique », ni trop interférent. Dans Fiertés, on peut prendre l’exemple de la maladie de Serge : elle est dite, mais en sourdine, et non criée avec rage, comme elle l’a été dans d’autres films plus contemporains de l’apparition du SIDA. Elle interfère par son inéluctabilité sur ce récit de vie, d’amour et de combat, sans en prendre la place.
Plus d’informations sur le site d’Arte
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