A Clichy-sous-Bois, l'élection de Hollande suscite l'espoir mais les habitants attendent des actes

A Clichy-sous-Bois, François Hollande a obtenu 72,06% des votes. En Seine-Saint-Denis, le socialiste a obtenu plus de voix que dans son fief corrézien. Les quartiers se sont mobilisés, mais désormais, ils attendent le nouveau président au tournant.

De notre envoyée spéciale à Clichy-sous-Bois, Seine-Saint-Denis- La Seine-Saint-Denis a misé sur François Hollande. Lors du second tour de l'élection présidentielle, celui-ci y a obtenu plus de voix (65,3%) qu'en Corrèze (64,86%), département dont il préside le Conseil général. A Clichy-sous-bois, 72,07% des votants ont voté pour lui.

"Eviter le pire"

Pour Olivier Klein, le maire PS de la ville, les Clichois "ont montré leur volonté d'un changement de politique, et d'une vie différente". Selon lui, "Sarkozy a montré qu'il n'était pas en capacité d'écouter les quartiers".

Une perception que partagent de nombreux habitants qui ont exprimé leur rejet du président sortant dans les urnes.

Aux alentours du quartier du Chêne Pointu, un ensemble urbain à Clichy-sous-Bois composé de 1500 logements, habité par environ 6000 riverains et laissé à l'abandon, Farah et Leïla, 19 ans, attendent leur bus : "Sarkozy, il n'aime pas la communauté musulmane, il ne s'intéresse qu'aux riches. Hollande, il parle de changement, alors on attend."

Même son de cloche chez Fatoumata, 20 ans : "Sarkozy confond les islamistes, les immigrés, les délinquants, il les mets tous dans le même sac." "Dites à Hollande qu'on mise sur lui !", lance-t-elle.

Marouane, 26 ans, a lui été marqué par la mobilisation dans sa ville. "Il y avait beaucoup plus de monde dans mon bureau de vote. Moi, j'ai voté pour éviter le pire", dit-il.

73% de participation

M. Klein, qui "a vu beaucoup de jeunes voter pour la première fois", rappelle que la participation a été élevée. "A Clichy, il y a eu 73% de participation, c'est 6% d'écart seulement avec la moyenne nationale; ça n'a pas toujours été le cas", note-t-il. Et de souligner la mobilisation des partis comme des associations à l'image du collectif Ac Le Feu, pour que les quartiers aient un poids politique.

Depuis son "Ministère de la crise des banlieues", installé à quelques mètres du Chêne Pointu, Mohamed Mechmache, le président d'Ac Le Feu, a mené campagne à sa manière, pour lutter contre l'abstention. Objectif : faire comprendre aux habitants que "la société civile a un rôle à jouer". "La banlieue fait partie de cette France", ajoute M. Mechmache, et elle doit le montrer.

Comme le souligne le maire, "malheureusement, les politiques ont tendance à regarder le poids électoral d'un endroit, d'un quartier", avant de s'y intéresser.

Les attentes

Aujourd'hui, M. Hollande est attendu au tournant dans les quartiers populaires qui ont largement voté pour lui. A Clichy-sous-Bois, le maire rappelle qu'il y a urgence. Les priorités selon lui ? Les transports, et la mise en place d'un deuxième plan de rénovation urbaine (PRU) pour le Chêne pointu notamment.

"Quand un quartier aussi grand au coeur de la ville va mal, c'est toute une ville qui va mal", assène-t-il. Ascenseurs en panne depuis des mois, locaux délabrés, insalubrité, marchands de sommeil et surtout misère. Près de 70% des habitants de cet ensemble vivent sous le seuil de pauvreté.

"Il faut une nouvelle méthodologie, avec des signes concrets d'amélioration du quotidien", ajoute-t-il.

Et dans cette ville isolée géographiquement, les attentes se portent aussi sur les transports, le chantier du tramway et du métro automatique.

Farah et Leïla ont raté leur bus. "On n'a pas eu le 603, le prochain n'arrive que dans une heure. Pour aller à Paris aussi c'est une galère, tous les bus ne vont pas à la gare du Raincy", précisent-elles.

Donner une majorité à Hollande

En attendant, élus comme responsables d'associations vont continuer à se battre pour que la mobilisation ne faiblisse pas en vue des législatives. "Il ne faut pas que ça retombe, les Clichois doivent garder ces habitudes", affirme M. Klein.

Mohamed Mechmache, qui a décidé de présenter sa candidature dans la 12ème circonscription de Seine-saint-Denis, souhaite aller chercher "ceux qui n'ont pas été convaincus par les partis en place".

Car l'ombre du Front national plane encore dans les quartiers. Si le vote PS a dominé à Clichy-sous-Bois, dans certains bureaux de vote, le FN a obtenu de bons scores, notamment dans les quartiers pavillonaires. Une tendance que le maire souhaite contrer. "C'est une ville où historiquement le Front national est monté haut, notamment dans les années 90, où il était à 30%", dit-il.

Et de rappeler : "les législatives, c'est le troisième tour de l'élection présidentielle, il faut rester mobilisés".