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Affaire Benalla : des "barbouzes" assurent-ils la protection d'Emmanuel Macron ?

Des responsables de syndicats de police affirment que des "vigiles" de sociétés privées, proches d'Alexandre Benalla, ont été recrutés pour assurer la protection du chef de l'Etat. Mais le patron de la sécurité d'Emmanuel Macron et le secrétaire général de l'Elysée contestent ces allégations.

Article rédigé par Violaine Jaussent
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Le 18 juin 2017, Emmanuel Macron, quitte son domicile du Touquet (Pas-de-Calais), escorté par Alexandre Benalla, pour aller voter au second tour des législatives.  (ETIENNE LAURENT / EPA)

Des "barbouzes" chargés de la protection du président de la République ? C'est la stupéfiante déclaration d'Yves Lefebvre, secrétaire général Unité SGP-Police Force ouvrière et de la Fédération de syndicats du ministère de l'Intérieur (FSMI), mardi 24 juillet, lors de son audition réalisée dans le cadre de l'affaire Benalla. Comme d'autres syndicats de police, qui ont dénoncé des relations "exécrables" avec Alexandre Benalla, Yves Lefebvre s'est exprimé devant la commission des lois du Sénat. 

On a l'impression aujourd'hui d'être confronté à une police parallèle, dictée par certains, et je vais même employer un mot très fort, dont j'assume la complète responsabilité, à savoir est-ce que nous étions confrontés ni plus ni moins qu'à des barbouzes ?

Yves Lefebvre, secrétaire général Unité SGP-FO Police

devant le Sénat

Un peu plus tard, alors que les sénateurs lui posent des questions, Yves Lefebvre assure que les personnes qu'il désigne "sont des vigiles qui étaient employés par monsieur Benalla dans le cadre de la protection de la présidence de la République." Combien sont-ils ? Comment agissent-ils ? Le responsable syndical n'a pas été en mesure de le préciser mardi, mais assure qu'il reviendra avec des éléments tangibles vers le président de la commission des lois au Sénat, Philippe Bas. Ce dernier a d'ailleurs déclaré, à l'issue de l'audition, attendre des informations complémentaires.

Des questions sur la protection d'Emmanuel Macron au fort de Brégançon

Pourtant, le recrutement au sein du service qui assure la sécurité et la protection du chef de l'Etat est encadré par la loi. Il s'agit du Groupe de sécurité de la présidence de la République (GSPR), composé de 77 personnes, à la fois des gendarmes et des policiers. Les premiers sont issus de la Force sécurité protection du GIGN, les seconds du Service de la protection (SDLP) de la police. La sélection se fait seulement en interne, sur épreuves, et le recrutement est validé en commission administrative, comme l'explique la police nationale sur son site internet. Un processus confirmé à franceinfo par une source policière.

Malgré tout, Daniel Chomette, secrétaire général délégué Unité SGP-Police FO FSMI, également auditionné au Sénat, aux côtés d'Yves Lefebvre, persiste et signe. "Alexandre Benalla souhaitait s'entourer de personnes de son entourage pour assurer la protection d'Emmanuel Macron au fort de Brégançon [lieu officiel de villégiature du président de la République]. C'est pour cela qu'on parle de police parallèle", explique-t-il à franceinfo mercredi matin. 

En interne, Alexandre Benalla se comportait en agent recruteur. Il donnait des avis qualitatifs et quantitatifs sur les policiers et gendarmes au sein du GSPR.

Daniel Chomette, secrétaire général délégué Unité SGP-FO

à franceinfo

"Il a fait entrer des gens dont il était proche dans le service de sécurité de proximité du président de la République", accuse encore Daniel Chomette, qui dit tenir ses informations des représentants de son syndicat au sein du Service de la protection (SDLP), auquel le GSPR est rattaché.

 "Pas de vigiles ou de personnes de sécurité privée"

Des groupes de vigiles privés qui travaillent au sein du GSPR ? Pas à la connaissance de Gérard Collomb. Le ministre de l'Intérieur l'a affirmé devant la commission des Lois du Sénat mardi en fin d'après-midi.

Invité à s'expliquer devant les députés, Eric Bio-Farina, commandant militaire de l'Elysée, n'a pas dit mieux de son côté : "Il n'y a aucun membre d'une force privée actuellement en service dans la mission de sécurité de la présidence de la République." 

Le colonel Lionel Lavergne, chef du GSPR, qui lui a succédé, a déclaré la même chose : "Au sein du GSPR, il n'y a pas de vigiles ou de personnes de sécurité privée." Avant d'ajouter : "On a recruté sous l'autorité du président de la République 13 personnels en plus depuis le 14 mai 2017." Difficile d'en savoir plus sur ces personnes. "Il n'y a pas d'officine ou de police parallèle à l'Elysée", s'est contenté de répéter le chef du GSPR à la fin de son audition.

Le secrétaire général de l'Elysée, Alexis Kohler, entendu par la Commission des lois du Sénat jeudi matin, a enfoncé le clou. "Il n'existe pas de police parallèle à l'Elysée", a-t-il assuré, avant de détailler son affirmation dans son propos liminaire.

Compte tenu de l'audition du directeur de cabinet Patrick Strzoda hier devant vous, et devant les députés de celles du commandant militaire du Palais de l'Elysée, le général Bio-Farina, et du chef du GSPR, le colonel Lavergne, je pense, j'espère que vous avez été rassurés sur le fait qu'il n'existe pas à l'Elysée de police parallèle, que nous n'employons pas de vigiles privés pour protéger le chef de l'Etat, et que M. Benalla n'a jamais été en charge de la protection de la présidence de la République.

Alexis Kohler, secrétaire général de l'Elysée

devant le Sénat

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