"Il est au fond très rare d'être populaire quand on est Premier ministre"
La journaliste Raphaëlle Bacqué, auteure du livre "L'Enfer de Matignon", a expliqué, lundi sur franceinfo, que la fonction de Premier ministre était compliquée et demandait des compétences diverses et variées.
La tâche s'annonce ardue pour Edouard Philippe, le Premier ministre nommé par Emmanuel Macron, lundi 15 mai. "Même un patron d'une grande multinationale n'est pas autant sur la brèche, avec des dossiers aussi divers et aussi différents les uns des autres", a déclaré la journaliste Raphaëlle Bacqué, auteure du livre L'Enfer de Matignon, lundi sur franceinfo. En 2008, la journaliste a recueilli dans un livre les propos d'anciens Premiers ministres, comme Alain Juppé, Jean-Pierre Raffarin ou encore François Fillon.
franceinfo : Matignon, est-ce vraiment un enfer ?
Raphaëlle Bacqué : C'est une "machine à broyer", comme disait Jean-Pierre Raffarin. Vous êtes sans cesse sollicité. Vous devez être compétent sur des dossiers extraordinairement différents. Cela va de la construction d'une autoroute à une manifestation qui tout d'un coup se déclenche dans une ville en région. Vous devez vraiment être incroyablement éclectique et toujours sur la brèche. Cela est difficile. En plus, vous devez "tenir" votre majorité. On a vu avec le gouvernement précédent que vous pouvez avoir des frondeurs au sein même de votre majorité.
Le rôle de Premier ministre, est-il plus difficile que président de la République ? Est-ce un rôle ingrat ?
C'est plus difficile physiquement d'abord. Vous êtes sans cesse sollicité. C'est plus difficile aussi politiquement, car vous êtes immédiatement comptable des erreurs. Il est au fond très rare d'être populaire quand on est Premier ministre. C'est arrivé, mais c'est quand même beaucoup plus difficile que pour un président de la République. Si on veut être populaire, si on veut être aimé, si on veut voir tout de suite les résultats de sa politique, on est certain d'aller vers la frustration. On est généralement reconnu bien après. Il y a des Premiers ministres qui ont terminé impopulaires et aujourd'hui, on pense qu'ils ont amélioré les choses. C'est donc vrai que l'on est souvent reconnu trop tard.
Existe-t-il une solitude du Premier ministre à l'image de celle du président de la République ?
C'est une solitude différente à vrai dire. Le Premier ministre est beaucoup moins seul que le président. Il est tellement sollicité qu'il est, au contraire, sans cesse entouré. Pour autant, cette espèce de frénésie contribue à la difficulté du métier. Le rythme est très dur pour le Premier ministre, parce qu'il doit prendre vingt décisions importantes par jour. On a du mal à imaginer cela, mais même un patron d'une grande multinationale n'est pas autant sur la brèche, avec des dossiers aussi divers et aussi différents les uns des autres.
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