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François Delapierre, fidèle compagnon de route de Jean-Luc Mélenchon

Secrétaire national du Parti de gauche et conseiller régional d’Ile-de-France, François Delapierre, 41 ans, est l’un des plus proches collaborateurs du candidat du Front de gauche, Jean-Luc Mélenchon. Un CV qui illustre un parcours.
Article rédigé par Catherine Rougerie
France Télévisions
Publié Mis à jour
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François Delapierre est candidat aux législatives sur la 10ème circonscription de l'Essonne. (AFP - Miguel Medina)

Secrétaire national du Parti de gauche et conseiller régional d'Ile-de-France, François Delapierre, 41 ans, est l'un des plus proches collaborateurs du candidat du Front de gauche, Jean-Luc Mélenchon. Un CV qui illustre un parcours.

"Tu verras, tu seras sénateur plus tard, comme moi". A l'annonce de cette prophétie, signée Jean-Luc Mélenchon, François Delapierre s'est demandé : "C'est qui ce gugusse ?".

Près d'un quart de siècle plus tard, ce dernier est l'un des plus proches collaborateurs du candidat du Front de gauche à la présidentielle, et son unique directeur de campagne.

Militant dans l'âme

Rien ne prédestinait ce fils d'enseignants à plonger dans le chaudron politique. Rien, jusqu'au passage de l'école privée au "collège moche au pied de la cité".

Premier choc pour le petit François qui "découvre une diversité sociale", et premier combat "contre le fossé de classes entre le bon élève issu de la cité pavillonnaire et le reste des gamins".

Délégué de classe, élu au conseil d'administration du collège, créateur du "club tarot-scrabble qui rassemblait déconneurs du tarot et intellos du scrabble", François Delapierre n'a depuis cette époque, jamais cessé de militer.

La montée à Paris en mobylette

1986, second choc pour le tout jeune adhérent du Parti socialiste. La droite gagne les élections législatives. Lui a "le sentiment que quelque chose de grave s'est passé".

Arrive la loi Devaquet qui instaure la sélection à l'entrée de l'université. Il s'y oppose, mène la grève dans son lycée, "monte à Paris sur sa mobylette" pour rejoindre la coordination, se retrouve propulsé dans des grands amphis, s'investit corps et âme et "c'est la victoire totale".

Le projet de loi est retiré, les réformes arrêtées "y compris le code de la nationalité". Deux ans plus tard, François Mitterrand remporte la présidentielle avec .

Une période s'achève, celle de l'apprentissage de l'autonomie à travers la victoire de la gauche sur fond d'adéquation entre l'adhésion au Parti socialiste et l'engagement dans la lutte sociale.

Allergique aux mondanités

De ses années d'études à Sciences Po-Paris, dont il est diplômé, François Delapierre garde un souvenir contrasté. Exaltant d'un côté, grâce à la diversité des matières étudiées et la découverte de la sociologie.

Mais décevant aussi, quand il perçoit ce "petit îlot très coupé de la société", "cette sociabilité mondaine", "cet entre soi de classes politiques" et réalise que certains militent "pour se faire connaître et faire carrière".

A l'opposé, François Delapierre dit s'investir pour les autres. Sans compter.

Co-fondateur puis président de la Fédération indépendante et démocratique lycéenne (FIDL) de 1988 à 1990, il décrit avec fougue ces années qui l'ont fait "s'endormir en classe et passer tous les week-ends en réunion".

Autre expérience de la "désillusion" à la fin des années 1990. Délégué général de SOS Racisme, François Delapierre y voit de nouveau des choses qu'il "n'aime pas", "des gens très sensibles aux gratifications et aux belles personnes".

Au bout de deux ans, il quitte l'association.

Pas le temps de souffler, Jean-Luc Mélenchon lui propose dans la foulée de créer le club pour la République sociale (1999), "le brouillon du Parti de gauche" qui vise à "faire la synthèse entre le courant socialiste et le courant républicain".

Martine Billard, Jean-Luc Mélenchon, François Delapierre (g à d) défilent à Paris, le 1er mai 2010. (AFP - Bertrand Langlois)

Solide dans l'adversité

Membres du même courant à la gauche du PS, les deux hommes ont déjà un peu travaillé ensemble sur des textes de motions lors des congrès du parti.

Bien d'autres expériences suivront, le partage de l'exercice du pouvoir, quand François Delapierre officie comme conseiller politique auprès de Jean-Luc Mélenchon, alors ministre de l'enseignement professionnel (2000 à 2002), et surtout, la campagne du non au référendum sur le traité constitutionnel contre la position du Parti socialiste.

"On découvre une ambiance, une culture et quand on retourne au PS, c'est déprimant. C'est la France qui a peur, la France moisie, écrit Serge July dans un édito, des territoires délaissés", explique Ségolène Royal".

Certes, le non l'emporte mais la victoire est vite consommée. "L'impossibilité d'arriver à une candidature commune de l'autre gauche" aboutit à "un désastre global pour le pays et pour nous aussi car c'est la première élection où on ne se sent pas représentés".

En résulte pourtant une conviction : "il y a un chemin, étroit, difficile, un point d'appui, un point de passage" dans lequel les deux hommes s'engouffrent. Crânement mais hardiment.

Démission du PS (novembre 2008), création du Parti de gauche, lancement du logo, premier meeting et premier succès, 3 000 personnes répondent à l'appel. La fusée est lancée.

"Instituteur du peuple"

Candidat aux législatives de juin 2012, François Delapierre "aime bien faire campagne", ce moment un peu particulier "où la conscience bascule". Tenir ce rôle "d'instituteur du peuple" pour reprendre "les vieux mots de Jaurès", participer à "l'éducation populaire, expliquer et faire changer le regard sur les choses".

Vue du siège du Front de gauche, aux Lilas (Seine-Saint-Denis) (CR)

Il y a deux types de plaisir, explique-t-il depuis son petit bureau au premier étage de l'Usine, siège de campagne du Front de gauche installé aux Lilas (Seine-Saint-Denis).

Quand "le raisonnement devient d'un coup réalité", "c'est presque le pouvoir de la pensée", la démonstration que "le monde peut être appréhendé avec un cerveau".

Et être "surpris par les événements qu'on a un peu rendu possibles", lorsque "les gens se transforment, s'émancipent" par la politique.

Et demain…

Que fera-t-il dans un an ? Il l'ignore et ne veut surtout pas le savoir. "Il y a un côté morbide aux rails programmés, quand on sait exactement ce que l'on va faire", assure cet amateur de parapente et marcheur à ses rares heures perdues.

De nouveau conseiller territorial, fonction dont il est détaché le temps de la campagne ? Député à l'Assemblée ?

Une chose est sûre, s'il n'a pas envie d'être "sans arrêt sous la pression qui peut être asséchante et envahissante", François Delapierre ne supporterait pas être "en dehors du tourbillon, extérieur au grand remuement de l'humanité".

Alors pourquoi pas, un jour, un ministère ? Il ne l'exclut pas, mais pas n'importe lequel.

Un ministère "où il faut lever les blocages et les contradictions, remettre les gens en mouvement, redonner une perspective politique et pas simplement assurer la gestion".

Comme quoi la prémonition du "gugusse" n'était pas si incongrue.

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