François Hollande et Nicolas Sarkozy ont jusqu'à vendredi soir pour abattre leurs dernières cartes
Pour la première fois dans l'histoire de la Vème République, le président-sortant, Nicolas Sarkozy, a été devancé au premier tour de la présidentielle. A moins de 7 jours de la finale, tous les sondages le donnent battu. Lui continue d'y croire.
"Chronique d'une victoire annoncée", "Sarkozy, c'est fini", la confiance dominait dimanche 22 avril, chez certains militants socialistes.
Arithmétiquement, il est vrai, les chiffres ne sont pas favorables au président sortant. Avec près de 9 à 10 points de retard selon les études, Nicolas Sarkozy est en mauvaise posture.
"C'est une autre élection qui commence", martelaient les soutiens du président au soir du premier tour, au palais de la Mutualité, misant à la fois sur un bon report de voix et la dynamique de fin de campagne.
Le challenge de Sarkozy
Dès l'annonce des résultats, les experts ont disséqué les chiffres et fait tourner les calculettes.
Tous s'accordent sur un point. Pour l'emporter, Nicolas Sarkozy doit convaincre au moins 60 % des électeurs de Marine Le Pen et 50 % de ceux de François Bayrou. En outre, le solde de ces deux électorats ne doit pas se reporter entièrement sur François Hollande.
Mission quasi-impossible soulignent plusieurs observateurs, du fait des valeurs opposées entre électeurs frontistes et centristes notamment en matière de sécurité et d'immigration.
Jouable font valoir à l'inverse plusieurs lieutenants de l'UMP qui rappellent le précédent de 2007 (un peu moins des deux-tiers des électeurs du FN s'étaient reportés sur Nicolas Sarkozy) et sa légère remontée dans les sondages après la tuerie de Montauban et de Toulouse, due à une progression sur ces deux électorats.
PMais pour l'emporter le 6 mai, Nicolas Sarkozy devra non seulement rééditer mais surtout amplifier le mouvement, car face à lui, François Hollande dispose d'une sérieuse avance et d'au moins deux avantages.
Le dernier défi de Hollande
Arrivé en tête du premier tour, François Hollande a pris, au moins psychologiquement, l'ascendant sur son adversaire.
Par ailleurs, la constance des sondages en sa faveur a confirmé le fort rejet dont faisait l'objet son adversaire, consolidé le moral des troupes, et installé peu à peu dans l'opinion la perspective d'un changement.
Reste un dernier obstacle, chiffré celui-là. Si l'on fait le total de voix obtenues par les cinq candidats du parti socialiste, de l'extrême gauche et des écologistes, la gauche obtient 44 % des voix. C'est moins qu'en 1981 et 1988 quand la gauche l'avait emporté.
Autrement dit, M. Hollande doit, lui aussi, récupérer des électeurs du Front national et du MoDem pour construire sa victoire. Il s'y est d'ailleurs employé tout au long de la semaine passée en s'adressant "à tous les Français".
Les inconnus
Au-delà de la question du report des voix des électeurs du premier tour, désormais orphelins, figurent deux inconnus de taille.
Que feront les quelque 9,4 millions d'abstentionnistes du premier tour ? Iront-ils voter le 6 mai ? Et si oui, quels seront leurs choix ?
A l'opposé, combien de votants du 22 avril bouderont les urnes dimanche prochain, lassés des polémiques, fatigués des invectives, désabusés par la politique ?
Enfin, quelles consignes de vote donneront Marine Le Pen, le 1er mai, et François Bayrou, le 3 mai, si éventuellement ils se prononcent ?
Autant de millions d'électeurs que les deux candidats vont s'efforcer de convaincre lors de leurs ultimes rendez-vous de campagne.
Le programme des cinq derniers jours
N'ayant plus rien à perdre, Nicolas Sarkozy va jouer son va-tout dans les cinq prochains jours.
Outre sa réunion publique, lundi dans le Vaucluse, et sans doute un voire deux meetings en fin de semaine (jeudi à Toulon et vendredi aux Sables d'Olonne), le président-candidat mise sur un grand rassemblement mardi au Trocadéro, à l'occasion de la fête du travail, puis sur son face à face télévisuel, le lendemain, avec François Hollande.
Si le rendez-vous du 1er mai devrait, comme les précédents, faire le plein, il ne fera guère bouger les lignes. Les deux candidats ont déjà montré leur capacité à mobiliser. Dimanche à Bercy, François Hollande a réuni quelque 20.000 personnes et devrait afficher complet jeudi, à Toulouse, lors de sa dernière réunion publique.
En revanche, le grand rendez-vous télévisuel de l'entre-deux-tours pourrait réserver quelques surprises ou passe d'armes mémorables voire séquences inédites. La dernière confrontation entre les deux hommes remonte à 1999.
Le duel télévisé, point d'orgue de la campagne
Tout a été minutieusement négocié entre les deux diffuseurs, TF1 et France 2, et les équipes des candidats : lieu du plateau (Seine-Saint-Denis), décor, choix du réalisateur, Jérôme Revon, et de ses deux "assistants", Yves Barbara pour M. Sarkozy, Tristan Carné pour M. Hollande, choix des thèmes etc.
L'interdiction de plans de coupe (quand un candidat parle on ne montre pas les réactions de son adversaire, ndlr), une exigence imposée dès 1974 par François Mitterrand, sera elle aussi respectée.
Ce débat peut-il changer la donne ?
Dans des situations très serrées, cela peut jouer expliquent les politologues.
Dans l'histoire de la Vème république, ce fut le cas une fois, en 1974. Donné à 50/50 avant leur duel, Valérie Giscard d'Estaing l'avait finalement emporté sur François Mitterrand avec moins de 500.000 voix, le même écart qui séparait M. Hollande et M. Sarkozy au soir du 22 avril.
En revanche, si les sondages donnent toujours un écart conséquent entre les deux finalistes à la veille de leur confrontation, cette dernière ne suffira pas à inverser la tendance. Dans ce type d'émission, les téléspectateurs viennent chercher, avant tout, ce qui conforte leurs propres opinions.
L'audience, elle, devrait être au rendez vous.
En 2007, le face-à-face entre Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy avait réuni plus de 20 millions de téléspectateurs.
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