Cet article date de plus de huit ans.

Présidentielle : Hollande, un discours pour lever les doutes

Le chef d'Etat prononce, jeudi, un discours sur le thème de "La démocratie face au terrorisme". Une intervention qui devrait marquer une nouvelle étape vers sa candidature pour 2017.

Article rédigé par franceinfo - sophie brunn
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
François Hollande, au palais de l'Elysée, le 22 juillet 2016. (PHILIPPE WOJAZER / REUTERS)

François Hollande a fixé le calendrier : il dira en décembre s'il est candidat à sa succession. Mais d'ici là, le président devrait, par petites touches, laisser filtrer ses intentions. Objectif : redevenir audible pour ne pas laisser le terrain à ses rivaux. Le président devrait contribuer à lever les doutes de ceux qui en ont encore, jeudi 8 septembre, à l'occasion d'un discours devant la Fondation Jean-Jaurès, salle Wagram à Paris. Malgré une popularité toujours en berne et des sondages plus qu'inquiétants, il est loin d'avoir renoncé à se représenter.

Cet été, le président a pu sembler absent du paysage politique, cerné sur sa gauche par les candidatures, ou quasi-candidatures, de ses anciens ministres - Arnaud Montebourg, Benoît Hamon et Emmanuel Macron - et sur sa droite par la primaire. Un risque réel pour le président, reconnu par ce ministre, interrogé par franceinfo : "Il doit montrer que ceux qui veulent l'empêcher d'être candidat n'y arriveront pas. Il doit absolument éviter que s'installe, dans l'opinion, l'idée que ce qui se prépare [pour la présidentielle], c'est un affrontement Montebourg-Macron-Valls", où le président n'apparaît même pas sur la photo.

Donner une réponse de gauche à un débat de droite

Tous les hollandais ont en mémoire le discours prononcé par le président de la République, le 3 mai, devant cette même Fondation Jean-Jaurès, sur le thème "La gauche et le pouvoir". Pour la première fois, le président avait défendu pied à pied son action et son bilan, assumant et revendiquant ses choix comme jamais. "Il y avait du souffle, de l'espoir, de la force, pointe Marisol Touraine, la ministre des Affaires sociales. Jeudi, il faut continuer, écrire à la fois le récit de son quinquennat et un projet." Un discours remarqué, mais qui n'a pas "imprimé" à l'époque, regrettent les soutiens du président : le 49.3, dégainé quelques jours plus tard pour faire adopter la loi Travail, l'avait largement effacé. 

Thème du discours de jeudi : "La démocratie face au terrorisme". Le sujet va "structurer la campagne à venir", glisse-t-on du côté de l'Elysée, qui a imaginé cette intervention après l'attentat de Nice. De quoi développer, pour le président, une réponse à l'"état d'exception" prôné par une bonne partie des candidats à la primaire à droite. Mais aussi, sans revenir directement sur la polémique sur le burkini, aborder un peu plus franchement que d'habitude le thème de l'identité française. Face à ce débat largement exploité par la droite et l'extrême droite, le président compte apporter sa réponse - revendiquée "de gauche".

Si on relie l'identité à l'immigration, ce sont des thématiques où on n'a rien à gagner.

un membre du gouvernement

à franceinfo

"Mais la démocratie, c'est différent, c'est un thème de gauche, qui peut nous permettre de mobiliser", assure-t-il.

"La seule réponse, c'est la République !", renchérit Michel Sapin. Le ministre de l'Economie et des Finances, hollandais historique, précise à franceinfo : "C'est un sujet qui fait pont entre l'action d'aujourd'hui et la perspective de demain. Il ne s'agit pas seulement de dire : 'J'ai créé tant de postes de policiers', mais de montrer comment une démocratie se mobilise face au terrorisme. L'identité française, ce sont des principes, des valeurs, pour lesquelles la France est un exemple dans le monde entier. Un socle qui permet de rassembler la gauche, et au-delà, les Français"

Les deux jambes de la campagne

Ce débat peut-il être le seul de la campagne ? Si cette question "traverse" le pays, obligeant François Hollande à y prendre part, "le président a bien conscience qu'il ne peut pas abandonner les thématiques économiques et sociales", assure un ministre. Même raisonnement pour Michel Sapin : "La campagne, c'est marcher sur deux jambes : on ne peut pas faire comme si les questions économiques et sociales n'existaient pas. On ne peut pas, non plus, minorer les questions de sécurité, avec ses conséquences en matière de cohésion sociale."

En allant sur ce terrain, François Hollande trouverait une bonne façon de rassembler la gauche. "La droite propose un projet autoritaire et inégalitaire : pour lutter contre le terrorisme, il faudrait abandonner l'état de droit, et en matière économique, c'est tout pour ceux qui ont déjà tout, estime un dirigeant du PS.

Pour une fois, c'est simple, on n'a même pas besoin de caricaturer leurs propositions : report de l'âge de départ à la retraite, suppression de postes de fonctionnaires, de l'ISF...

un dirigeant du PS

à franceinfo

De quoi redonner du lustre au bilan de François Hollande, souvent critiqué à gauche. Avec, comme en 2012, Nicolas Sarkozy en meilleur épouvantail. "Pour mobiliser nos sympathisants, il y a un levier efficace : expliquer ce qu'on a fait, versus ce que la droite prépare", estime un cadre du Parti socialiste. Et ainsi tout simplement réactiver le clivage droite-gauche, quitte à apparaître, pour le moment, uniquement en défense du bilan. L'accès à la santé (redressement des comptes de la sécurité sociale, tiers payant, aide à la mutuelle) et l'éducation (création de 60 000 postes d'ici à la rentrée 2017, "refondation" de l'école) en sont deux points clefs.

"On y va !"

Francois Hollande le dit et le répète : il ne se prononcera pas avant décembre. Sans attendre ce signal, certains ont décidé de se mettre en marche. Bruno Leroux, patron des députés socialistes, et Didier Guillaume, son homologue au Sénat, préparent un appel à soutenir la candidature de François Hollande pour la fin du mois. Signé par des élus locaux, des parlementaires, voire des membres de la société civile, pas forcément encartés au PS. Une "démonstration de force", selon Didier Guillaume. Objectif, dire aux cadres socialistes qui "paniquent" : "On y va !" Des groupes de réflexion seraient également en préparation, pour nourrir un programme. Le but est qu'en décembre, quand le président officialisera sa candidature, "tout soit prêt et qu'il n'ait qu'à appuyer sur un bouton."

Plusieurs ministres planchent également sur le fond. Thierry Mandon, secrétaire d'Etat à la Recherche et l'Enseignement supérieur, et Matthias Fekl, au Commerce extérieur, préparent ainsi depuis six mois, avec une dizaine de chercheurs, des propositions sur la démocratie au sens large : renouvellement des institutions, fabrique des décisions publiques, haute administration, démocratie locale... Un document doit être finalisé le 17 septembre et transmis dans la foulée au président. Sans avoir reçu une commande explicite de François Hollande, les deux secrétaires d'Etat ont un "mandat de fait". Ils comptent, ensuite, se pencher sur les "mutations du travail". 

Mais le temps des propositions n'est pas venu. D'abord parce que le président n'est pas officiellement candidat. Ensuite parce qu'avant de formuler des propositions, il doit fixer des "orientations". "Jeudi, il doit répondre à la question : la France des cinq prochaines années, avec moi, c'est quoi ? pointe un ministre. Autrement dit : 'Pourquoi je veux être président encore cinq ans'."

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.