"Society", Gulli, "Le Chasseur français" : quand François Hollande se confie à des médias décalés
Cette semaine, le chef de l'Etat accorde une interview au "Chasseur français", le magazine "de la ruralité". Une première pour un président de la République.
François Hollande ferait-il la chasse aux électeurs ? Dans un entretien accordé au Chasseur français, mercredi 21 octobre, le chef de l'Etat se prononce en faveur de la chasse aux loups. "Chaque année, il sera décidé du nombre de loups à abattre en fonction de l'évaluation des risques et de la croissance de la population de loups", déclare-t-il. Cette interview au "magazine de la ruralité" est une première pour un chef de l'Etat. Mais François Hollande n'a pas hésité, cette année, à miser plusieurs fois sur le décalage en termes de communication.
Et ce n'est pas fini : selon Le Parisien, jeudi, le chef de l'Etat prévoit "une batterie d'interviews" autour de l'Euro 2016.
En janvier, Hollande parle de Chirac à "Charles"
L'interview (lien payant) est passée un peu inaperçue, éclipsée par l'actualité. Pourtant, dans son numéro paru le matin des attentats de Charlie Hebdo, le trimestriel politique Charles, qui se penche sur la carrière de Jacques Chirac, s'offre un invité de poids en la personne de François Hollande. L'amitié entre les deux hommes est connue : "On pouvait être durs dans le combat politique, mais garder de la chaleur dans les rapports personnels", raconte-t-il. Son éloge d'un Chirac "rassembleur" sonne aussi comme un clin d'œil à sa propre situation : "Les responsables politiques sont d'autant plus populaires qu'ils ne sont plus au pouvoir."
En janvier, il est l'invité de "Mon quotidien"
Le jeudi 22 janvier 2015, le président de la République est l'invité et le rédacteur en chef de Mon quotidien, journal destiné aux 10-14 ans. Il s'agit de répondre aux questions des enfants, 15 jours après la semaine des attentats meurtriers contre Charlie Hebdo, la policière de Montrouge et le magasin Hyper Cacher. Objectif : rassurer les jeunes et leurs parents, après une séquence anxiogène, comme l'explique ce reportage de France 2.
En février, il raconte ses souvenirs de foot à "Desports"
François Hollande, qui n'a jamais caché son goût pour le ballon rond, raconte en février ses souvenirs de fan de foot à Desports, revue littéraire à la XXI consacrée au sport. Il raconte son émotion d'avoir pu poser une question à Just Fontaine sur l'antenne d'Europe 1, et ses soirées foot avec Jean-Pierre Jouyet, avec qui il a vu le fameux France-Allemagne de Séville en 1982 : "On y a cru jusqu’au bout. Et on a pleuré à la fin." Ce ne sera pas la dernière fois que François Hollande a mis en scène sa passion du football : ces derniers mois, il a plusieurs fois rendu visite au Red Star, le club de Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis). Une alternative populaire au PSG bling-bling de Nicolas Sarkozy, interprète Le Parisien.
En mars, il se livre au magazine "Society"
Pour son deuxième numéro, le vendredi 20 mars 2015, le magazine Society se voit accorder un entretien fleuve avec le chef de l'Etat. François Hollande revient notamment sur les particularités de sa fonction. "Le président est le chef de la famille française. Il doit partager les douleurs", mais aussi "maîtriser ses émotions au nom de la raison d'Etat", explique François Hollande. "Voilà ce qui vous change : la mort habite la fonction présidentielle", dit-il encore.
Quelle était l'idée sous-jacente ? "Un média apparemment décalé pour une stratégie de présentation de lui-même qui se précise, visant à souligner une forme de présidentialité acquise lors des attentats de janvier sans pour autant gommer un sens de la proximité, qui, en campagne, avait constitué l'une de ses forces", analyse Le Monde.
En avril, il est l'invité du "Supplément" sur Canal +
Toujours pour conquérir un public jeune, le président répond pendant deux heures aux questions de Maïtena Biraben, lors de l'émission "Le Supplément" sur Canal+. En bonus, une séquence qui surprend les téléspectateurs. Comme Jacques Chirac en 2005, François Hollande est directement confronté à des élèves d'un lycée de Thiais (Val-de-Marne), invités du plateau de la chaîne cryptée.
Objet de la discussion : le respect des religions en France et le sentiment "anti-Charlie" défendu par certains jeunes. En plateau, c'est un François Hollande pédagogue qui tente d'expliquer aux élèves la différence entre Dieudonné et Charlie Hebdo. "En France, on peut se moquer des religions. En revanche, on n'a pas le droit d'appeler à la haine", dit-il. Ce passage sera plutôt apprécié par les médias.
En septembre, il répond aux enfants sur Gulli
C'est un public encore plus jeune que François Hollande vise en invitant Gulli, la chaîne des enfants, à l'Elysée, pour un documentaire diffusé le 20 septembre. A cette occasion, il est interviewé par un panel de cinq enfants de 10 à 12 ans, très impressionnés par les ors de l'Elysée, comme on peut le voir sur cette vidéo des coulisses de la rencontre.
Cette fois, le ton est plus léger que dans l'interview à Mon Quotidien. Plutôt que d'évoquer Charlie Hebdo, les enfants interrogent le président sur sa personnalité et son parcours. Le président explique qu'il aurait aimé être professeur s'il n'avait pas fait de la politique, et se souvient de ses élèves à Sciences Po, entre 1988 et 1991 : "Il y en a qui sont députés de l'opposition." "Il sent hyper bon, il a un bon parfum", raconte une des analystes politiques en herbe au Journal du dimanche.
En octobre, il s'exprime dans "Le Chasseur français"
Il ne s'agit plus de courir après les jeunes, mais après un monde rural plutôt ancré à droite. Dans un entretien inédit publié mercredi 21 octobre dans le magazine, François Hollande prend position en faveur de la chasse au loup, mais aussi... des couteaux Laguiole.
Il dit notamment sa volonté de protéger l'appellation : Laguiole "s'est battu pour garder son appellation autour des produits qui font sa renommée. Le couteau et le fromage. Il n'était pas acceptable que des marques s'emparent du Laguiole, alors même que leurs productions n'y étaient pas fabriquées." Bref, une façon de signifier qu'il prend en compte les préoccupations de la France dite "profonde".
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.