Rassemblement national : Nicolas Bay, Gilbert Collard, Stéphane Ravier... Ils ont décidé de quitter Marine Le Pen pour rejoindre Eric Zemmour
Alors que l'eurodéputé Nicolas Bay rejoint à son tour l'équipe d'Eric Zemmour, peu après avoir été accusé d'espionnage, franceinfo fait le tour de ces élus qui ont déserté le parti de Marine Le Pen pour rallier la campagne présidentielle du candidat de Reconquête ! ces dernières semaines.
"Non, ce n'est pas une saignée." C'est en tout cas ce qu'a affirmé Jordan Bardella, le président par intérim du Rassemblement national, sur France Inter, mercredi 16 février. Face aux défections qui s'accumulent dans le camp de Marine Le Pen, au profit d'Eric Zemmour, en vue de l'élection présidentielle, l'eurodéputé ne cille pas pour "la dizaine d'élus" partis : "Nous avons un peu plus de 1 000 élus locaux sur le terrain."
A moins de deux mois du premier tour, le 10 avril, l'ambiance n'est pas au beau fixe au RN. Mardi, Nicolas Bay a été accusé d'avoir transmis des informations confidentielles à Eric Zemmour. Ce "comportement parfaitement immoral" lui vaut d'avoir été suspendu "de son porte-parolat de campagne ainsi que de toutes ses autres responsabilités" au sein du parti d'extrême droite. Nicolas Bay va déposer une plainte pour diffamation contre le RN, a-t-il expliqué mercredi à franceinfo, confirmant une information de BFMTV.
Le transfert n'a pas été long : mercredi soir, Nicolas Bay a annoncé qu'il s'engageait aux côtés d'Eric Zemmour pour l'élection présidentielle. Et ce n'est que le dernier d'une longue liste ces dernières semaines. Petit rappel.
3 novembre : Jean Messiha
La migration a pris dix semaines, mais Jean Messiha, ex-délégué national aux études du RN, a rejoint le camp Zemmour après avoir quitté le parti de Marine Le Pen début novembre. Parmi les divergences exposées dans l'hebdomadaire Valeurs actuelles par le chroniqueur de CNews et C8, la position du parti sur l'islam. Selon lui, cette religion "pose un problème à la France", là où Marine Le Pen "considère que l'islam en tant que religion n'est pas un problème pour la France".
Après le "Pourquoi je quitte le RN", Jean Messiha revient dix semaines plus tard, le 14 janvier, toujours dans Valeurs actuelles pour répondre à sa propre question : "Pourquoi je rejoins Eric Zemmour". Il devient alors un des porte-parole du candidat de Reconquête !.
19 janvier : Jérôme Rivière
Première grande défection, l'eurodéputé Jérôme Rivière, qui change de bord le 19 janvier, alors qu'il est l'un des porte-parole de la campagne présidentielle de Marine Le Pen, et par ailleurs chef de la délégation RN au Parlement européen.
"L'incapacité que le RN a montrée à gagner ces élections régionales est la démonstration flagrante que Marine Le Pen n'est pas en situation de gagner l'élection présidentielle", estime-t-il dans Le Parisien en annonçant son ralliement à Eric Zemmour. Selon lui, Marine Le Pen "est incapable de reconnaître certaines évidences comme le 'grand remplacement' qui conduit au déclassement des Français". D'autres vont lui emboîter le pas très rapidement.
20 janvier : Damien Rieu
Dès le lendemain, Damien Rieu, ancien responsable de Génération identitaire, annonce sur Twitter qu'il rejoint à son tour Eric Zemmour. Cet assistant parlementaire travaille alors pourtant pour l'eurodéputé Philippe Olivier, beau-frère et proche conseiller de Marine Le Pen.
"Les résultats [du RN] stagnent, voire régressent", constate Damien Rieu. Il salue, à l'inverse, "le combat des idées" mené par l'ancien polémiste de CNews. Ce candidat "fusée" "dénonce le 'grand remplacement'", et a "réussi à créer une dynamique inédite dans l'histoire politique". Le candidat Zemmour s'est empressé de l'accueillir chaleureusement : "Bienvenue dans la Reconquête, cher Damien ! Comme toujours, ton insolence et ton courage ont choisi le bon combat !"
Bienvenue dans la Reconquête, cher Damien ! Comme toujours, ton insolence et ton courage ont choisi le bon combat ! https://t.co/8poa68PnPg
— Eric Zemmour (@ZemmourEric) January 20, 2022
21 janvier : Gilbert Collard
"Combien iront à la rivière ? Boire de cette eau ?", se demande le 21 janvier l'eurodéputé RN Gilbert Collard, qui se met en scène dans une vidéo sur sa page Facebook. Il y annonce à demi-mot qu'il va rejoindre Eric Zemmour et lance, d'un air faussement énigmatique : "Demain, je vais me baigner à la rivière... Rubicon". Dès le samedi 22 janvier, Gilbert Collard assiste au meeting d'Eric Zemmour à Cannes (Alpes-Maritimes), actant de fait son départ du Rassemblement national.
Collard a annoncé sur Facebook son ralliement à Zemmour dans un sketch subtilement intitulé "Franchir le Rubicon". pic.twitter.com/nmBRpCgjhW
— Nabil Touati (@salam93) January 21, 2022
31 janvier : Sophie Grech
Les défections ne concernent pas seulement des personnages médiatiques, mais aussi des élus plus discrets. Fin janvier, Sophie Grech, élue RN des quartiers nord de Marseille, et conseillère régionale de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, annonce qu'elle a accordé son parrainage à Eric Zemmour pour l'élection présidentielle.
Le même jour, Marine Le Pen annonce sur Europe 1 qu'elle sera exclue du RN. "Elle a signé une promesse de parrainage et effectue là un parjure", ne décolère pas la candidate. "Et elle le fait alors qu'elle sait qu'on n'a pas encore les parrainages. (...) C'est indigne de sa part."
Cette annonce provoque une scission : quatre élus se retirent du groupe municipal RN, pour protester contre la position du président du Rassemblement national à la municipalité de Marseille, Stéphane Ravier. Ce dernier ne souhaite en effet pas l'éviction de Sophie Grech. Deux semaines plus tard, Stéphane Ravier rejoindra lui aussi Eric Zemmour (lire plus bas).
Sophie Grech, élue RN, donne son parrainage à Zemmour : "Elle le fait alors même qu'elle sait que nous n'avons pas tous les parrainages (…) C'est indigne. Mais on a une morale ou pas... Elle sera évidemment exclue du RN" #Punchline pic.twitter.com/S2dtcSefKq
— Europe 1 (@Europe1) January 31, 2022
1 février : Maxette Pirbakas
"Ce n'est pas un parti politique le RN, c'est un clan." La député européenne Maxette Pirbakas critique vivement son camp et annonce le 1er février qu'elle rejoint également Eric Zemmour. Selon elle, "il y avait un malaise au niveau du RN". Elle évoque des divergences politiques à propos d'un dossier sur la "croissance verte et bleue", ou encore une réunion en décembre, où elle n'a "pas été conviée".
Eric Zemmour n'est "pas du tout" raciste, "il est déjà venu en Guadeloupe", argumente Maxette Pirbakas au micro de Guadeloupe La 1ère pour expliquer son choix. "On voit qu'il n'est pas encore le fin politicien, c'est ce qui me plaît en lui."
2 février : Charles Perrot et Gabriel de Peyrecave
Autre figure locale du RN, Charles Perrot rejoint Eric Zemmour le 2 février après plus de vingt ans au sein de la formation politique des Le Pen. Ancien conseiller régional, anvien président de groupe RN à la région pendant douze ans, il coordonne désormais la collecte des parrainages du parti Reconquête ! dans le département de la Loire. Charles Perrot emboîte le pas d'un autre cadre du RN dans la Loire, Gabriel de Peyrecave.
10 février : Stéphane Ravier
Seul sénateur du parti, également président du groupe RN au conseil municipal de Marseille, Stéphane Ravier se rallie à Eric Zemmour le 10 février et quitte "toutes les instances parisiennes" du parti d'extrême droite à la suite d'un conflit avec un conseiller de Marine Le Pen au sujet d'un parrainage.
Marine Le Pen a tenu à rappeler à Stéphane Ravier, "défenseur de la culture et de l'identité française", "les règles de la courtoisie française qui fait que, quand on part de quelque part, on appelle ou on passe un SMS".
16 février : Nicolas Bay
Début février déjà, Marine Le Pen l'avait dans le viseur. En déplacement à Madrid accompagnée de l'eurodéputé Nicolas Bay, tenté de rejoindre Eric Zemmour, elle s'exaspère des défections en série, de ceux qui font "la taqiya [dissimulation]". Que "ceux qui veulent partir partent. Mais [qu']ils partent maintenant", lance-t-elle.
Mardi 15 février, Nicolas Bay est suspendu de ses fonctions au RN. Le porte-parole de la candidate est accusé de "sabotage" et d'avoir transmis des informations confidentielles à Eric Zemmour. Interrogée lors d'un déplacement mardi à Villers-Cotterêts (Aisne), Marine Le Pen évoque une "haute trahison", de "véritables campagnes de sabotage en interne", ce qu'elle juge "impardonnable". Sur BFMTV, Nicolas Bay annonce mercredi qu'il déposera plainte pour diffamation contre le parti.
Face à ces accusations, les avis divergent. "Faut arrêter un peu le ridicule" avec "l'espionnage", rétorque Jérôme Rivière sur franceinfo. Le maire RN de Béziers, Robert Ménard, évoque pour sa part "un mauvais feuilleton, une série B", mercredi sur franceinfo. "C'est invraisemblable."
Nicolas Bay ne tarde pas à rejoindre le camp d'Eric Zemmour. Mercredi soir, il annonce au Figaro s'engager "pleinement" auprès du candidat de Reconquête ! : "Je crois profondément dans sa candidature, son projet et sa stratégie." Ancien secrétaire général (2014-2017) et ancien vice-président du parti, Nicolas Bay était depuis plusieurs années en froid avec Marine Le Pen, qui l'a écarté à l'été 2020 de la commission d'investiture. Il est par ailleurs proche idéologiquement de Marion Maréchal, qui songe elle aussi à rallier Eric Zemmour.
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