Sondage annuel Kantar Public sur le RN : le parti n'est plus considéré comme "une anomalie de la démocratie", juge un analyste
Pour autant, "on ne constate pas une dynamique" non plus, constate Emmanuel Rivière, directeur général de l’institut de sondage Kantar Public, après la publication vendredi d’une enquête pour Le Monde et France Info.
Le Rassemblement national "est installé dans le paysage politique", a analysé Emmanuel Rivière, directeur général de l’institut de sondage Kantar Public, après la publication vendredi 6 mars d’une enquête annuelle Kantar Sofres-onepoint pour Le Monde et franceinfo dans laquelle 56% des personnes interrogées pensent que le parti de Marine Le Pen peut un jour arriver au pouvoir. "On s'est habitués à sa présence, on ne le considère plus comme une espèce d’anomalie de la démocratie", poursuit-il mais "en revanche par rapport à il y a six ans, on ne constate pas une dynamique". Emmanuel Rivière explique qu'il faut relativiser les chiffres. La "capacité" de Marine Le Pen "à rassembler est quand même diminuée". "Les dégâts produits par le débat de l'entre-deux tours de la présidentielle ne sont pas réparés", constate-t-il.
franceinfo : Ce chiffre de 56% veut-il dire que le parti est dédiabolisé ?
Ça veut dire que le parti est installé dans le paysage politique. On s'est habitué à sa présence, on ne le considère plus comme une espèce d’anomalie de la démocratie, un accident de parcours comme lorsque Jean-Marie Le Pen est arrivé au second tour de la présidentielle en 2002. Il est là et bien là.
Maintenant quand on regarde qui pronostique cette arrivée du RN au pouvoir, ça augmente beaucoup chez les sympathisants de gauche qui a priori ne le souhaitent pas.
Emmanuel Rivière, directeur général de l’institut de sondage Kantar Publicà franceinfo
Simplement, ils ont en tête que ça pourrait arriver. Un autre enseignement c'est, qu’en revanche par rapport à il y a six ans, on ne constate pas une dynamique, celle qui était très forte dans les années 2014-2015.
La part de ceux qui partagent les idées du RN est autour d’un quart des Français, on était plutôt autour d’un tiers dans les premières années de l’accession de Marine Le Pen à la tête du FN.
Emmanuel Rivière
Le RN pourrait donc accéder au pouvoir, pour autant les Français n’adhèrent pas à ses idées ?
Oui, d’ailleurs sur des questions très constitutives de l’élan du RN, de ce qui motive ses électeurs, on est plutôt dans des niveaux moins élevés de sentiment qu'il y a trop d’immigrés ou qu'on en fait trop pour les musulmans. Ça a reculé d’une dizaine de points, c'était lié à la crise migratoire de 2015 et là, on est peut-être à l’orée d’une nouvelle crise migratoire, cela étant on n’est pas dans un contexte qui paraît très favorable. En revanche ce qui est très net aussi c’est que le RN fidélise ses électeurs, il y a très peu de gens qui nous disent : 'J’ai voté pour eux mais je ne le ferai plus'. Donc cette installation les pose comme un élément constitutif du paysage que les Français constatent.
Marine Le Pen reste clivante ? Seul un tiers des Français veulent qu’elle se présente en 2022.
Elle fait l’unanimité dans son camp, ce qui est d’ailleurs une des composantes de cette vision qu’on peut avoir du RN. Elle n'est pas contestée et c’est une force qu’elle a aussi. Mais notre enquête montre que les dégâts produits par le débat que tout le monde considère comme raté de l’entre-deux tours de la présidentielle ne sont pas réparés. Entre 2017 et 2018 on avait vu chuter de 20 points la réponse à une question comme "elle est capable de prendre des décisions", ce qui est un peu un élément de capacité à exercer le pouvoir. Ça, ça s’est restauré en grande partie chez ses électeurs mais sa capacité à rassembler est quand même diminuée par le fait que ça ne s’est pas restauré dans les autres camps, notamment chez les Républicains, et toute la question d’ailleurs est là pour le RN : comment trouver des alliés ? Pour l’instant, il y a plus de sympathisants républicains pour constituer un front contre le RN que pour s’allier avec eux.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.