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Vidéo Le gouvernement encourage le débat mais supprime les enquêtes publiques environnementales

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L'oeil du 20h - 22/01/2019
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Article rédigé par L'Oeil du 20 heures
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A l'heure où l'exécutif encourage les Français à débattre, il vient d'en supprimer de bonnes occasions. Il a décidé de supprimer certaines enquêtes publiques dans deux régions. Ces réunions ne rassemblaient certes pas les foules mais elles permettaient aux citoyens de s'exprimer.

En ce moment, le gouvernement n’a qu’un mot à la bouche : le débat. Mais pendant qu’il encourage le grand débat national, il a décidé de supprimer dans certaines régions, une autre forme de consultation : les enquêtes publiques...

Des enquêtes publiques, il y en a eu quelque 7000 en France l’an dernier. C’était le cas à Longueau, dans les Hauts-de-France, où une filiale du groupe Vinci avait prévu de construire une usine de bitume, à 130 mètres des habitations. Une enquête publique a été ouverte, tous les habitants ont pu s’exprimer sur le projet.

“S’il n’y avait pas eu d’enquête publique, les tractopelles seraient en route”

Conclusion de l’enquête : avis défavorable. Cette zone est jugée inadaptée pour accueillir une telle usine. L’industriel a abandonné l’idée, à la grande satisfaction des opposants. “S’il n’y avait pas eu d’enquête publique, je pense que les tractopelles seraient déjà en route pour construire l’usine,” se félicite Sébastien Galland-Rins, un riverain. “C’est un rouage important de démocratie : face à des grosses industries comme Vinci, Eurovia, on ne fait pas le poids.

Pourtant à quelques mois près, il aurait bien pu ne pas y avoir d’enquête publique pour ce projet d’usine. Dans un décret promulgué fin décembre, le gouvernement impose en effet une expérimentation dans les Hauts de France et en Bretagne : pour les installations présentant un risque environnemental, les enquêtes publiques pourront être remplacées par une consultation sur internet.

Plus d’enquête, et plus de commissaires-enquêteurs... Nous avons rencontré l’un d’eux dans la Somme : François-Charles Grévin y instruit sans doute l’une de ses dernières enquêtes publiques, sur l’implantation de 10 éoliennes. Avant de rendre un avis favorable ou défavorable au projet, il a étudié les 1142 pages du dossier dans le détail, pour le présenter aux riverains. “Il fait 8 kilos : pour le lire j’ai mis 2 journées,” relève-t-il. Il n’imagine pas un internaute consacrer autant de temps à étudier un dossier. “A mon avis nous remplissons un rôle qui me semble difficilement remplaçable par une procédure sur internet.”

3 avis pour, 2768 avis contre, mais le décret promulgué

Mais pour le gouvernement, ces enquêtes publiques sont trop longues et trop complexes. Au revoir monsieur le commissaire-enquêteur : les Français sont désormais invités à laisser leurs avis directement sur internet. Seront-ils mieux entendus ?

Avant de remplacer la procédure par une consultation en ligne, le gouvernement avait interrogé les citoyens… sur internet justement. Résultat : 3 avis en faveur de la suppression de l’enquête publique, 2768 contre. Cette procédure consultative n’a pas empêché le décret d’être promulgué.

C’est là un avant-goût amer des enquêtes publiques 2.0, selon France Nature Environnement. “On est à des années-lumières des garanties qu’offre une procédure d’enquête publique,” estime Florence Denier-Pasquier, secrétaire nationale de l’association. “Ca n’a rien à voir : on nous fait croire que c’est la même chose mais c’est un faux-semblant !

Les députés de la majorité l’assurent, il ne s’agit que d’une expérimentation, dont les leçons seront tirées dans 3 ans. Si l’essai est jugé concluant, l’enquête publique pourrait alors être supprimée partout en France, pour tous les projets touchant à l’environnement.

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