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La colère monte au sein de l'armée française

Jean-Yves Le Drian aurait écrit au Premier ministre pour se plaindre des nouvelles coupes budgétaires dans le budget militaire que Bercy préparerait. Situation inédite, les quatre chefs d'état-major mettraient leur démission dans la balance. Hollande doit trancher avant fin juin. France Info a rencontré jeudi Manuel Valls qui a redit que la loi de programmation militaire ne serait pas modifiée.
Article rédigé par Alice Serrano
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
  (Quatre haut-gradés de l'armée française mettent leur démission dans la bamance © Maxppp)

"Trahison ", "perte de crédibilité ", voilà ce que l'on entend au sein de l'état-major, confie Jean-Dominique Merchet, spécialiste des questions militaires : "Il y a un vrai malaise, les grands chefs militaires disent : 'écoutez, on s'est engagé auprès de nos troupes pour leur dire qu'il n'y aurait pas de nouvelle baisse, si vous voulez en faire, vous les faites, mais ce sera sans nous'. Ils menacent de présenter leur démission, ce qui ne s'est jamais vu dans notre pays ".

 

Une décision que les quatre haut-gradés - Armées, air, terre et marine - auraient prise en marge d'une réunion il y a dix jours, rappelant l'engagement de François Hollande de "sanctuariser " un budget déjà fortement amputé. La loi de programmation militaire (2014-2019) a été votée par le Parlement en décembre dernier, actant une enveloppe en baisse de 31 milliards d'euros par an.

 

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"Au-delà de l'os, il n'y a que la moëlle..."

Soutien de poids : leur ministre, ulcéré de ne pas avoir été prévenu de ces éventuelles coupes supplémentaires. Jean-Yves Le Drian s'est fendu d'une lettre à Manuel Valls. Jean-Yves le Drian parle "d'un contexte social dans l'armée proche de l'exasperation " où plus de 80.000 emplois auront été supprimés en 10 ans. Le ministre de la Défense s'inquiète des conséquences qu'une baisse du buget pourrait avoir sur les milliers de PME qui dépendantes des commandes de l'armée mais aussi les chantiers navals et l'industrie aéronautique qui pourrait perdre "des milliers d'emplois et de compétences " avertit le ministre.  Les secteurs purement militaires de la disuasion et du renseignement seraient également impactés selon Jean-Yves le Drian. La France ne pourrait plus s'équiper comme elle l'envisageait de drones, de satellites Ceres et d'avions de surveillance. 

Des parlementaires sont également montés au créneau, comme le socialiste Jean-Louis Carrère, président de la commission de la Défense au Sénat : "La commission que je préside n'acceptera pas une réduction de la loi de programmation militaire ! Au-delà de l'os, il n'y a que la moëlle... " Ce serait mettre en péril le programme de dissuasion nucléaire français et l'action même de notre armée, asure Jean-Dominique Merchet : "La France a deux drones, donc si on en enlève un, il ne nous en reste qu'un seul, et il volera quand il sera en état de voler. Les avions ravitailleurs sont des Boeing 707, et plus aucune compagnie aérienne mondiale n'utilise de Boeing 707 depuis 20 ans [...] Il y a quelques domaines comme cela où on est en bout de bout... "

Valls rassure

Des voies discordantes se font néanmoins entendre, notamment au sein de l'armée. "Dédramatisons " lance le colonel Jacques Bessy, le président de l'association de défense des droits des militaires (L'Adefdromil) un haut-gradé sur France Info. L'armée, qui bénéficie du deuxième budget du gouvernement, peut encore faire des efforts : au sein notamment de la légion étrangère, chez les chasseurs alpins ou encore dans le domaine de la santé. "Rien qu'à Paris il y a trois hopitaux militaires ", s'insurge ce colonel qui dénonce une armée "réactionnaire ".

Jeudi, France Info a rencontré Manuel Valls. Le Premier ministre a redit une nouvelle fois que la loi de programmation militaire ne serait pas modifiée. Une façon de rassurer son ministre de la Défense.

"Il y a des gisements d'économies" (le colonel Jacques Bessy)

 

 

 

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