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Législatives : Jean Lassalle, député MoDem et ami de 30 ans de François Bayrou, lutte pour sa réélection

Seul député MoDem hexagonal sortant avec François Bayrou, dont il est un ami de trente ans, Jean Lassalle se bat pour sa réélection dans la 4e circonscription des Pyrénées-Atlantiques. "Mon destin n'est pas terminé", affirme-t-il. Reportage.
Article rédigé par Sébastien Tronche
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8min
Jean Lassalle brigue un troisième mandat dans sa circonscription basco-béarnaise. (Alian Guilhot / AFP)

Seul député MoDem hexagonal sortant avec François Bayrou, dont il est un ami de trente ans, Jean Lassalle se bat pour sa réélection dans la 4e circonscription des Pyrénées-Atlantiques. "Mon destin n'est pas terminé", affirme-t-il. Reportage.

Mardi 5 juin, J -5 avant le premier tour des élections législatives. A Irouléguy, village basque juché au pied des Pyrénées sur la "Route du fromage", le béarnais Jean Lassalle, qui sillonne les mairies à la rencontre des édiles, s'interrompt. Le seul député MoDem sortant avec François Bayrou regarde son téléphone portable et interpelle le maire, sans étiquette, Jacques Irumé.

La canton de Saint-Etienne de Baigorry qu'a visité Jean Lassalle le mardi 5 juin. (ST)

"Regarde ce nouveau sondage, PS et UMP sont à égalité, dit-il, tactile et le tutoiement facile, bruit de tracteur en toile de fond. Le MoDem est à 3%. Si on arrive à avoir un député, c'est qu'il doit être sacrément bon". Franche rigolade. Car Jean Lassalle, fils d'un berger transhumant de Lourdios-Ichère dont il est maire, le sait, le mauvais score de François Bayrou au premier tour de l'élection présidentielle, l'a mis lui, ainsi que le centre, dans une position délicate.

  • Lassalle et sa circonscription

Alors pour sa septième campagne électorale, sa troisième législative, Jean Lassalle donne le tout pour le tout et arpente les routes sinueuses des vallées qui forment sa circonscription. La plus vaste de France. Une circonscription pyrénéenne, voisine de celle de François Bayrou, qui s'étale de l'arrière-pays basque en pays béarnais.

221 communes qu'il aura toutes traversées à la rencontre des maires, premiers relais locaux, qu'il flatte allègrement, jouant de son humour et de ses talents de conteurs pour vanter son bilan. Elu à la suite de la seule triangulaire de France en 2007, face à un UMP et un PS, Jean Lassalle, qui a toujours gouverné localement avec le centre-droit, a vu pour la première fois la circonscription passer à gauche.

"Je suis dans une situation désespérante, désespérée mais nous allons gagner (rires)"

Les 15 cantons ont choisi à 60% François Hollande au soir du 6 mai dernier. "Pour être élu, il faut ramener ces 60% à 49%, sourit-il. Il faut que je retrouve une partie de mon électorat qui est franchement de centre-gauche. Je suis dans une situation désespérante, désespérée mais nous allons gagner (rires)."

Ce mardi 5 juin, ce Béarnais de la vallée d'Aspe, accompagné de son suppléant basque Barthélémy Aguerre qu'il appelle "Lémy", visite l'un des cantons basques de cette circonscription si particulière à cheval entre Pays basque et Pays béarnais qu'ils représentent tous les deux. "Ici, c'est un territoire où on élit deux députés, pas un", explique-t-il.

L'affiche électorale de Jean Lassalle et de son suppléant : "le candidat des Basques et des Béarnais". (ST)

Ce jour-là, neuf villages sont au programme. "A la rencontre des gens, explique-t-il avec son accent pyrénéen rocailleux. Quand je vois un homme, je m'arrête, quand je vois une femme, je m'arrête, quand je vois un troupeau de brebis…" Et celui qui veut "porter la voix des hommes de montagne à Paris" d'ajouter, plus sérieusement : "ces rencontres sont vitales pour la démocratie, même s'il n'y a que le maire".

  • Lassalle, Bayrou et Sarkozy

A chaque rencontre, la même question revient. Au-delà des problématiques locales concernant l'intercommunalité, la présence des services publics ou la question de la nécessité d'une institution basque, tous l'interpellent à propos de la présidentielle.

Quand l'édile penche plutôt à gauche, à l'envie de faire basculer la circonscription et d'éviter une cohabitation s'ajoute le reproche de n'avoir pas suivi le choix de François Bayrou de voter "à titre personnel" pour François Hollande.

"Attend toi à te faire allumer à cause de Bayrou"

Du haut de son mètre quatre-vingt-dix, Jean Lassalle, à l'inverse de son vieil ami, a voté Nicolas Sarkozy. Mais n'a pas appelé à voter pour lui. "J'ai dit que je ne voterai ni pour François Hollande, ni blanc", explique celui qui a été vingt ans suppléant du député RPR Michel Inchauspé et qui brigue son troisième mandat.

A l'inverse de François Bayrou, Jean Lassalle a voté Nicolas Sarkozy au second tour de la présidentielle. (ST)

Chez les sympathisants de droite, ce trop faible soutien dérange. Et explique la candidature UMP du jeune Marc Oxibar. "Nous lui reprochons son non-positionnement, déclarait le prétendant UMP à la députation au Journal du Pays Basque. Aujourd'hui, j'ai le sentiment que les électeurs de Jean Lassalle se sentent trahis. Même si ici, on le sait, les centristes sont de tendance centre-droit".

"Pour faire de la politique, il ne faut pas être trop parfait"

Tous également l'interrogent sur le choix du président du MoDem. "Attend toi à te faire allumer à cause de Bayrou. Tu as pris trois mois de retard, il faut changer ton étiquette", lui lance le maire d'Uhart-Cize, qui le reçoit à la terrasse du café à côté de sa mairie avec vue sur les collines verdoyantes. "Nous le payons très cher, répond le député en campagne en sirotant un Perrier. Je l'avais prévenu que s'il votait Hollande, je ne le suivrai pas".

Jean Lassalle et Barthélémy Aguerre (à gauche) rencontrent des élus locaux à Uhart-Cize. (ST)

C'est pour récupérer cet électorat "choqué" par "la déclaration tonitruante" de François Bayrou qu'il a choisi Barthélémy Aguerre comme suppléant. Chef d'entreprise propriétaire d'abattoirs, le Basque est sa caution droitière. En plus d'être sa caution basque. "Lémy est le meilleur suppléant du monde, répète-t-il à ses interlocuteurs en insistant sur son statut d'entrepreneur. Nous sommes critiqués mais nous ne laissons pas indifférents. Pour faire de la politique, il ne faut pas être trop parfait. Nous sommes deux personnages de roman (rires)."

  • Lassalle, le centre et les députés godillots

Portant une haute estime à la fonction parlementaire et à l'élection –"le suffrage universel rend sage", dit-il- Jean Lassalle joue sur deux tonalités. Celle de la province face à Paris et aux technocrates "qui passent leur temps à imaginer la France parfaite". "Je suis comme vous. Votez pour moi car je vous ressemble", explique-t-il lors de sa dernière réunion de la journée.

La deuxième tonalité de sa campagne, celle du Centre pour la France : l'indépendance vis-à-vis des grands partis. Un credo qu'il a depuis longtemps suivi. "Ce qui me convient, je le voterai. Ce qui ne me convient pas, je ne le voterai pas. Avoir été élu sur une triangulaire me donne presque mission de voter librement", développe-t-il, rappelant qu'il n'a "pas voté tout Sarkozy", qu'il s'est opposé à la réforme constitutionnelle de 2008 ou encore à la réforme territoriale.

"Mon destin n'est pas terminé"

Un couplet anti-député godillot soigneusement rabâché. Lui ne sera pas comme son adversaire socialiste François Maitia, qui, dit-il, "entrera à l'Assemblée le bras levé pour voter tout ce que Hollande lui dira de voter et rebaissera le bras en quittant l'Assemblée".

S'il est de nouveau élu à la députation, Jean Lassalle poursuivra son œuvre parlementaire, faite de liberté et de coups d'éclats comme lorsqu'il a entonné l'hymne pyrénéen dans l'Hémicycle, provoquant l'ire de Jean-Louis Debré, alors au Perchoir, ou lorsqu'il entama une grève de la faim de cinq semaines en salle des Quatre-Colonnes.

Jean Lassalle chante l'hymne pyrénéen dans l'Hémicycle

Pour l'heure, cet ancien plus jeune maire de France s'imagine deuxième au premier tour, derrière le candidat PS et espérant secrètement un désistement du candidat UMP afin de faire barrage à la gauche. "Tout se jouera au premier tour", explique-t-il. Mais lui ne se désistera pas et est prêt à affronter une nouvelle triangulaire. "Le sortant ne se retire pas. Il joue son titre jusqu'au bout", clame-t-il, certain que son "destin n'est pas terminé".

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