: Vidéo Régimes spéciaux : François Fillon à la rencontre de cheminots de la SNCF
Le candidat à la primaire de la droite et du centre propose de supprimer les régimes spéciaux de retraite. Nous l’avons suivi en gare de Lyon, à Paris, à la rencontre de cheminots souhaitant défendre leur régime. Un reportage diffusé dans “L'Emission politique” le 27 octobre 2016.
C’est un sujet que François Fillon connaît bien. Le père de la réforme des retraites de 2003 est aussi celui qui, Premier ministre, a mené la réforme des régimes spéciaux de 2008. Aujourd’hui candidat à la primaire de la droite et du centre, François Fillon donne le ton. S’il est élu, il promet de supprimer les régimes spéciaux de retraite et de relever l’âge légal de départ à 65 ans. L’objectif : unifier l’ensemble des régimes de retraite, dans un souci “d’équité” entre tous les Français.
La fin d’une contrepartie
Le régime spécial de la SNCF permet aujourd’hui aux conducteurs de partir à la retraite dès 50 ans, et aux autres agents de partir dès 55 ans. Début 2017, l’âge d’ouverture des droits à pension sera relevé à 52 ans pour les agents de conduite et 57 ans pour les autres cheminots. Mais avec le système de décote mis en place en 2008, nombreux sont ceux qui doivent travailler cinq ans de plus pour bénéficier d’une retraite confortable.
Nous avons suivi François Fillon à la rencontre d’agents de la SNCF membres de la CGT et de Sud Rail. Ils sont conducteurs, agents de maintenance et vendeurs en gare. Si le candidat à la primaire de la droite est élu, tous pourraient perdre ce régime spécial déjà modifié par la réforme de 2008. Ils pourraient, à terme, travailler jusqu’à 65 ans. En gare de Lyon, tous s’opposent à l’idée. Ce régime spécial est pour eux non pas un avantage, mais la contrepartie de conditions de travail et d’exigences plus difficiles.
Des horaires décalés à 60 ans ?
Bérenger Cernon, 28 ans, est l’un des premiers à interpeller François Fillon. Ce conducteur de trains sur la ligne D du RER est aussi le secrétaire général de la CGT Cheminots en gare de Lyon. Chaque semaine, il voit ses horaires de travail fluctuer. Fin du service à 1 heure du matin, reprise à 4 heures du matin quelques jours plus tard… Avec ces horaires, le conducteur dort en foyer RHR (résidence hôtelière du rail) presque une nuit sur deux. Il finit son service trop tard, trop loin pour pouvoir rentrer chez lui.
Quand il a rejoint la SNCF à l’âge de 19 ans, Bérenger Cernon devait partir en retraite à l’âge de 50 ans. “Aujourd’hui, c’est devenu 57 ans, explique-t-il. J’adore mon métier, mais nos conditions de travail se dégradent. Et cela augmente notre fatigue. Je ne sais pas si je pourrai toujours faire ce métier à 60 ans”, confie le conducteur.
“Ce régime a ses raisons d’exister”
Alexandre Boyer, conducteur de train de fret, a connu des conditions de travail similaires. Pendant quinze ans, il a travaillé régulièrement de nuit et plus de dix week-ends à l’année. Face à François Fillon, le syndicaliste CGT défend le maintien des régimes spéciaux. “Il a ses raisons d’exister. Nous avons une exigence de service public et de sécurité. C’est aussi un moyen pour la SNCF de fidéliser ses salariés. En quoi sa suppression va-t-elle améliorer l’ensemble des retraites dans ce pays ?”
A ses côtés, Mehdi Ben Barek se sent quant à lui “trahi”. En huit ans de travail comme vendeur, il a déjà vu son âge de départ à la retraite reculer de deux ans. “Que se passera-t-il dans dix ans ?” Ce régime spécial, “ce n’est pas un cadeau qui nous est fait. Cela nous a été promis car on le mérite… Et là, on va me retirer quelque chose que je mérite”.
“C’est la guerre”
Mais pour François Fillon, la ligne est claire. Supprimer les régimes spéciaux permettra de garantir une véritable égalité de traitement entre les salariés. Gare de Lyon, l’ancien Premier ministre ne manque pas de rappeler aux cheminots que d’autres professions connaissent des conditions de travail tout aussi difficiles que les leurs.
De l’autre côté de la gare, François Fillon rencontre plusieurs cheminots membres du syndicat Sud Rail. L’un d’entre eux, Fabien Villedieu, est particulièrement engagé. Le conducteur de RER D a notamment participé à la grève à la SNCF du mois de juin 2016. Il réagit vivement à la proposition de l’ancien Premier ministre. “Un conducteur de 65 ans qui se lève à 4 heures du matin ? C’est complètement irréaliste !”
Dans la cour de l’ancien centre de tri de la gare — où les syndicats organisent leurs assemblées générales — Fabien Villedieu prévient déjà François Fillon d’une nouvelle mobilisation. S’il supprime les régimes spéciaux, “c’est la guerre… Et on fera mal.”
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