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Marine Le Pen modifie son affiche de campagne

Mercredi 4 avril, le Front national a dévoilé la nouvelle affiche de campagne de Marine Le Pen. La photo de la candidate a changé. Le slogan lui est le même mais il est présenté de façon différente. Décryptage de ces petites modifications.
Article rédigé par Daïc Audouit
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Marine le Pen (FTV)

Mercredi 4 avril, le Front national a dévoilé la nouvelle affiche de campagne de Marine Le Pen. La photo de la candidate a changé. Le slogan lui est le même mais il est présenté de façon différente. Décryptage de ces petites modifications.

Oui, la France. Ces 3 mots simples légendent la nouvelle affiche de campagne de Marine Le Pen.

Nouvelle photo, même slogan

Ce slogan existait déjà, c'est la photo qui a changé. Le cadre de Mme Le Pen a été resséré légèrement en plus gros plan. Dans l'affiche précédente, elle croisait les bras dans une attitude d'appui, considérée peut-être comme un peu nonchalante. Ensuite, le slogan était imprimé en gros caractères,en haut. Dans celle d'aujourd'hui, il est situé au bas de la photo en de façon plus élégante et plus discrète.

Ancienne affiche de Marine Le Pen (ERIC CABANIS / AFP)

En eux-mêmes, ces trois mots ne veulent rien dire agencés dans cet ordre. En revanche, avec ce oui en tête, ce slogan suggère qu'il répond à une question posée hors-champ. Question sans doute adressée à Marine Le Pen, dont le portrait nous fixe intensément en gros plan. Quel est votre programme ?

Oui, la France serait donc la réponse. Une évidence presque banale qui ne mérite pas plus de développements et qui balayerait toutes les interrogations. Et pourtant, dans sa densité nue, il soulève maints commentaires possibles.

Le pouvoir de dire oui

Oui, tout d'abord. Tous les communicants vous diront qu'un message doit être positif. Les tournures négatives sont à proscrire. Mais au-delà de cette leçon basique, il s'agit pour Mme Le Pen de rendre une fierté à son électorat.

Depuis le référendum sur le traité européeen de 2005, l'électorat frontiste est qualifié de France du non. De façon plus générale, il est associé à une expression de mécontentement, de ras-le-bol ou de colère. Autant de connotations péjoratives qui peuvent être un frein au vote Le Pen. Avec ce oui, elle retourne la réputation. Il s'agit alors de suggérer un vote de soutien et d'adhésion.

La France d'abord

La France, ensuite. Chez Mme Le Pen, la France n'est pas forte comme chez Nicolas Sarkozy ou libre comme chez Nicolas Dupont-Aignan. Définir la France, lui accoler un adjectif, ce serait déjà l'amoindrir. La France est une et indivisible. Intangible dans son ontologie heideggerienne et dans son identité historique. Marine Le Pen est là dans la posture gaullienne qu'elle revendique également dans ses meetings.

Reste que la France, seule, est un peu statique. Un slogan se doit d'être inchoactif, comme on dit dans le jargon. C'est à dire qu'il doit exprimer un mouvement et une dynamique. "Le changement c'est maintenant" est le type même du slogan inchoactif.

Tout est dans la virgule

Dans la formule de Mme Le Pen, l'action et le dynamisme sont exprimés par la virgule. Sur l'affiche précédente dont la photo a été changée, c'est un point d'exclamation qui remplaçait la virgule.Que signifie cette modification ?

L'exclamation impose un choix au lecteur-électeur. C'est presque une menace. La virgule, au contraire, accompagne en bon agent de liaison grammatical, la reflexion. La virgule impose un temps de suspension dans la lecture de l'affiche. Elle est presque un moment d'interrogation. Cela renforce l'évidence de la proposition tautologique de Mme Le Pen: mon programme c'est la France, la France c'est mon programme.

Oui à la France, ainsi faudrait-il lire l'affiche de la candidate du FN. Ce message est suggéré et pas asséné. Mais il s'agit aussi d'un oui à Marine Le Pen. Elle ajoute logiquement son nom au bas de l'affiche, ce qui n'était pas le cas précedemment. Et surtout l'importance du visage prime sur celle du texte.

Enfin, l'arrière-plan aux couleurs tricolores a disparu. C'est sans doute pour se conformer à une obligation légale qui stipule que les couleurs bleu-blanc-rouge ne doivent pas être représentés sur un document officiel de propagande électorale.

Mais cela va dans le sens de l'épure manifesté par cette nouvelle affiche qui se veut plus subtile et moins lourde.

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