Législatives : trois questions sur la (très probable) candidature de Jean-Luc Mélenchon à Marseille
L'ex-candidat à la présidentielle a annoncé son intention de se présenter dans la 4e circonscription des Bouches-du-Rhône.
Héliotropisme ? Jean-Luc Mélenchon a annoncé, mercredi 10 mai, qu'il comptait se présenter aux élections législatives à Marseille, dans la 4e circonscription des Bouches-du-Rhône.
"J'ai besoin pour mener ce combat de l'appui de tous et de toutes dans toute la ville", précise l'ex-candidat de la France insoumise à la présidentielle. Il doit s'exprimer jeudi pour confirmer sa candidature. Afin de mieux comprendre sa stratégie et ses intentions, franceinfo vous se pose trois questions autour de ce parachutage.
Pourquoi a-t-il choisi Marseille ?
Il y est populaire. Au premier tour de la présidentielle, le 23 avril, Jean-Luc Mélenchon est arrivé en tête dans la cité phocéenne, avec 24,82% des suffrages exprimés. Dans la quatrième circonscription, qui englobe une partie du centre, plusieurs quartiers populaires, ainsi que le Vieux-Port, il a rassemblé 39% des suffrages exprimés, loin devant le candidat d'En marche !, Emmanuel Macron (21,8%) et celle du Front national, Marine Le Pen, à moins de 15%.
Pendant la campagne présidentielle, le candidat de la France insoumise avait attiré près de 70 000 personnes, selon les organisateurs, au meeting qu'il avait tenu sous le soleil du Vieux-Port. "Une ambiance de fête" ainsi décrite par Libération : "Un peu partout, les drapeaux tricolores flottent. Sur la Canebière, la vague impression de se retrouver après une victoire de l’équipe de France de foot." Lors de la campagne de 2012, c'est à Marseille, déjà, que le candidat du Front de gauche (alors le nom du parti qui le soutenait) avait trouvé l'un des meilleurs accueils, sur la plage du Prado. Il y avait déclaré son "amour à la France métissée", selon L'Express, pour son dernier meeting de campagne.
Pourquoi s'attire-t-il une volée de critiques ?
C'est la seconde fois en cinq ans que le député européen se parachute dans une circonscription où il n'a pas d'ancrage. En 2012, lors des législatives qui ont suivi la présidentielle remportée par François Hollande, il avait essuyé un cinglant échec à Hénin-Beaumont, dans la 11e circonscription du Pas-de-Calais. Eliminé dès le premier tour, il n'avait obtenu que 21,5% des voix, tandis que Marine Le Pen avait frôlé les 50%. Le socialiste Philippe Kemel, qui avait réuni 23,5% des voix au premier tour, l'avait finalement emporté au second.
Député sortant de la 4e circonscription des Bouches-du-Rhône et candidat pour un second mandat, le socialiste Patrick Mennucci, a fustigé mercredi sur son compte Facebook ce "nomadisme électoral" : "En l'espace de huit ans, rappelle-t-il, Jean-Luc Mélenchon fut sénateur de l'Essonne, député européen du Sud-Ouest, candidat aux législatives dans le nord [de la France] et maintenant candidat dans les Bouches-du-Rhône. A ce niveau, ce n'est plus un homme politique, mais bien un nomade électoral." Marseille, poursuit-il, n'est qu'un instrument de "l'ambition personnelle" de Jean-Luc Mélenchon : "S'il est élu, jamais il ne reviendra dans cette circonscription, jamais il ne prendra à bras-le-corps les problématiques marseillaises." Interrogé sur BFMTV, Jean-Luc Mélenchon a esquivé avec une pirouette : "Bah oui, je suis parachuté partout. Je suis partout chez moi. La France est ma patrie".
Autre reproche formulé par Patrick Mennucci : contrairement à ce qui s'était passé à Hénin-Beaumont, Jean-Luc Mélenchon ne fait pas le choix, en briguant la députation à Marseille, de combattre le Front national. Une nouvelle pique résumée sur Twitter par le journaliste de L'Opinion Jean-Jérôme Bertolus :
Mennucci : "Mélenchon vient là où ni le FN (14,3%) ni la droite (10,8%) ne peuvent l'emporter. Son seul combat, la gauche contre la gauche"
— Jean-Jérôme Bertolus (@jjbertolus) 10 mai 2017
Peut-il gagner facilement ?
Pas si évident. Le candidat de la France insoumise devra mener une rude bataille pour s'imposer. Il lui faudra battre le sortant Patrick Mennucci, "une figure locale, qui, même s’il a perdu, en 2014, la bataille municipale et sa propre mairie de secteur, garde des réseaux efficaces", relève Le Monde.
Même au sein de la France insoumise, cette candidature soulève l'incompréhension. Le candidat jusque-là désigné, Gérald Souchet, est, lui aussi, un brin déçu par la tournure des événements. "Je vais faire ce qu'on me demande", réagit-il sobrement auprès de franceinfo. Avant de faire contre mauvaise fortune bon cœur. "Il peut y avoir des sentiments un peu mitigés, mais cela peut aussi être une chance extraordinaire."
Quant à Solange Biaggi, la candidate Les Républicains, elle ironise sur sa page Facebook, englobant dans la même critique "l'insoumis parachuté #Jean_Luc_Mélenchon et le bateleur de foire #Patrick_Mennucci toujours à contre-pied des Marseillais". Une gauche déchirée qui lui redonne de l'espoir. Sur le papier, Patrick Mennucci devait être réélu sans trop de problèmes, mais le parachutage de Jean-Luc Mélenchon, et le conflit acharné qui s'annonce avec le PS local, pourraient finalement faire les affaires de la droite.
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