Présidentielle 2022 : quel est le secret de Nathalie Arthaud qui a déjà recueilli ses 500 parrainages ?
Comme en 2012 et 2017, et comme Arlette Laguiller avant elle, la candidate de Lutte ouvrière (LO) a validé sans problème sa candidature pour l'élection présidentielle, en dépit d'un faible poids politique.
La barre est franchie et le ticket validé. En rassemblant, mardi 15 février, plus de 500 parrainages d'élus – 509 exactement –, Nathalie Arthaud s'est qualifiée pour sa troisième élection présidentielle consécutive. La candidate de Lutte ouvrière (LO) va de nouveau tenter de faire entendre la voix du mouvement trotskiste au niveau national, après deux premières tentatives confidentielles en 2012 (0,56% des suffrages) et 2017 (0,64%). Reste une interrogation, cependant : malgré son modeste poids politique, comment Nathalie Arthaud a-t-elle si facilement dépassé un seuil de qualification que Jean-Luc Mélenchon, Marine Le Pen ou Eric Zemmour peinent à atteindre ?
La responsable d'extrême gauche n'en est pas à son coup d'essai. En 2017, elle avait rassemblé les parrainages nécessaires en une petite semaine. Cinq ans plus tôt, elle était même la première candidate en lice à déclarer qu'elle avait obtenu ses signatures, alors que les parrainages recueillis par les candidats n'étaient pas encore rendus publics par le Conseil constitutionnel au fur et à mesure de leur collecte, comme ils le sont désormais. Les candidates de Lutte ouvrière, Arlette Laguiller puis Nathalie Arthaud, n'ont ainsi jamais manqué une élection présidentielle depuis... 1969.
Pas de "recette magique"
Pour expliquer cette belle moisson de parrainages, à cette présidentielle comme aux précédentes, l'enseignante de Seine-Saint-Denis confie ne pas avoir de "réservoir secret" ou de "recette magique". Le poids de Lutte ouvrière apparaît très faible au niveau national : le parti ne compte ni parlementaire ni conseiller territorial et revendique seulement 16 élus aux dernières élections municipales. LO ne peut donc pas compter sur ses propres élus pour engranger les 500 parrainages requis. Pas de quoi freiner les ambitions de Nathalie Arthaud, qui raille ceux qui s'étonnent de la voir valider sa candidature aussi facilement. "C'est notre implantation locale qui explique ces parrainages", défend la candidate.
"On n'est pas des extraterrestres, LO ne surgit pas tous les cinq ans, c'est une petite organisation qui existe dans tout le pays."
Nathalie Arthaudà franceinfo
Si la campagne présidentielle est le moment où LO peut le plus faire entendre ses idées, le parti n'attend pas les dernières semaines avant cette échéance pour se mettre en ordre de bataille. Le mode opératoire est précis : un an avant l'élection présidentielle, les "comités locaux" du parti sont chargés de quadriller le milieu rural pour cibler les précieuses signatures. "Ce sont des efforts militants pendant plusieurs mois", reconnaît la candidate. "C'est un vrai parti à l'ancienne, avec une hiérarchie et une discipline militaire. Chacun sait ce qu'il doit faire", explique à Marianne le journaliste Laurent-David Samama, auteur du livre Les Petits matins rouges, sur les mouvements trotskistes.
Au total, la structure affirme compter 8 000 militants, intensément mobilisés dans la quête de ces parrainages auprès des élus. "Nous nous déplaçons physiquement, on va discuter avec ces élus", insiste Nathalie Arthaud. La candidate raconte avoir elle-même rencontré en 2021 une dizaine de maires de la Drôme, son département d'origine, pour faire monter le compteur de signatures. "Je suis même partie en randonnée avec deux d'entre eux", rit-elle aujourd'hui.
Chez LO, "ils labourent le terrain"
Marc Henneveux, lui, n'a pas rencontré Nathalie Arthaud, ni sur les sentiers de la Drôme, ni ailleurs. Le maire sans étiquette d'Allemant, petite commune de l'Aisne, a en revanche reçu la visite d'un militant Lutte ouvrière de Seine-Saint-Denis, l'année dernière. "Ils labourent le terrain", s'amuse l'édile, qui leur a apporté sa signature pour la troisième fois depuis qu'il est devenu maire, en 2001.
"Je suis plutôt de gauche, sans être affilié. Je ne suis pas du tout communiste révolutionnaire."
Marc Henneveux, maire d'Allemantà franceinfo
Nombreux sont ceux qui, comme lui, parrainent sans se sentir forcément proche de la mouvance trotskiste. "Ce sont des maires non encartés, généralement divers gauche, qui ne dépendent pas d'une structure organisée. Ces parrainages ne viendront pas d'élus 'insoumis' ou communistes, qui rechignent à donner leur soutien à Lutte ouvrière", explique Laurent-David Samama à Marianne. "Nous ne visons quasiment que des maires sans étiquette", confirme Nathalie Arthaud à franceinfo.
Afin de récolter les signatures des élus, les militants ne misent pas vraiment sur les idées de leur candidate. "Le militant qui est venu me voir m'a dit que je n'étais pas obligé de partager leurs idées", raconte Marc Henneveux. "Ils ne sont pas d'accord avec toute notre politique, mais ils estiment que notre voix est légitime et mérite d'être entendue", assure Nathalie Arthaud, dont les partisans recontactent plusieurs fois ceux qui ont apporté leurs paraphes lors des précédentes campagnes. Le système, bien rôdé, a de nouveau porté ses fruits.
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