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Repas à 1 euro pour tous les étudiants : on vous explique comment s'est joué le rejet du texte à l'Assemblée, à une voix près

La proposition de loi socialiste a été rejetée in extremis, jeudi, lors de son examen dans l'hémicycle du Palais-Bourbon.
Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Des étudiants déjeunent au Crous de Lyon, le 2 septembre 2022. (NICOLAS LIPONNE / HANS LUCAS / AFP)

Chaque voix compte à l'Assemblée nationale. Les députés ont rejeté à une voix près (184 contre, 183 pour) une proposition de loi du groupe PS instaurant l'accès à des repas à un euro pour tous les étudiants, jeudi 9 février. Ce tarif est aujourd'hui réservé aux boursiers et aux plus précaires. On vous explique ce rejet très serré et très commenté.

Une proposition de loi socialiste examinée dans le cadre d'une "niche parlementaire"

Alors que l'Assemblée nationale est en plein débat sur le projet de loi de réforme des retraites, la journée de jeudi était consacrée aux propositions de loi du groupe socialiste, dans le cadre de sa "niche parlementaire". A cette occasion, les députés PS, qui avaient la main sur l'ordre du jour, ont tenté de faire adopter plusieurs textes, notamment une proposition de loi pour empêcher le "démantèlement" d'EDF ou une autre pour instaurer un menu à un euro pour tous les étudiants.

L'article 1 de cette proposition de loi prévoyait ainsi que "la tarification des repas distribués par les centres régionaux des œuvres universitaires, dans tous leurs sites de restauration, ne peut être supérieure à 1 euro". Ce ticket de restauration à 1 euro avait déjà été mis en place par le gouvernement en 2020 pour les boursiers de l'enseignement supérieur, puis élargi en janvier 2021 à tous les étudiants, en pleine pandémie de Covid-19.

Mais pour l'année scolaire 2022-2023, seuls les étudiants boursiers et précaires ont droit à ce tarif. Les autres étudiants bénéficient d'un repas au tarif social de 3,30 euros. "Alors que seulement 38% des étudiants touchent une bourse, il n’est pas entendable de priver les 62% autres, soit près de 2 millions de jeunes, d’un repas à un prix 'accessible", a expliqué la députée socialiste Fatiha Keloua Hachi, qui portait ce texte pour son groupe.

La majorité présidentielle dénonce une mesure "injuste" et rassemble ses troupes sur le fil

Les députés macronistes ont combattu cette mesure, la jugeant "injuste", au motif qu'elle aurait bénéficié aussi à des étudiants de milieux aisés. "Grâce à vous, les enfants de votre ami Bernard Arnault pourront aller au Crous et ne payer que 1 euro", a par exemple lancé le député Renaissance Sylvain Maillard dans l'hémicycle. Sa collègue Anne Brugnera a, elle, épinglé une mesure "démagogique".

La ministre de l'Enseignement supérieur, Sylvie Retailleau, a également plaidé contre la mesure, dont elle a estimé le coût à "90 millions d'euros" au moins. Elle a souligné l'existence de tarifications sociales des repas pour "les étudiants en difficulté".

Après des premiers votes victorieux sur des amendements, qui laissaient entrevoir une possible adoption du texte, le camp présidentiel a finalement mobilisé in extremis des députés de son camp pour le vote final. Une stratégie qui s'est révélée payante, à la voix près.

Les députés LR divisés... mais plutôt contre

A droite de la majorité, les députés Les Républicains se sont montrés divisés sur la question. Le député LR Alexandre Portier a ainsi plaidé pour qu'un accès au tarif de 1 euro soit conditionné à un engagement de "travailler deux heures par semaine au service d'une collectivité locale". Au moment du vote final, quatre députés LR se sont abstenus et sept ont voté contre, dont le président du parti, Eric Ciotti.

Un grand nombre de députés écologistes absents

Plusieurs absences ont également été très remarquées. Douze des 22 députés écologistes, alliés des socialistes au sein de la Nupes, n'ont pas pris part au vote dans l'hémicycle. Les dix présents ont tous voté pour. Plusieurs élus écologistes étaient en réalité occupés ailleurs, comme la présidente du groupe écologiste à l'Assemblée, Cyrielle Chatelain, qui participait avec deux autres députés au lancement des états généraux de l'écologie politique à quelques centaines de mètres de là.

Interrogé sur le sujet, le chef de file des députés socialistes a relativisé leur absence : "Le sujet, ce n'est pas ceux qui ont pu voter pour, mais ceux qui ont voté contre. Pas de faux procès", a déclaré  Boris Vallaud. Un député LFI interrogé sur franceinfo s'est montré moins tendre : "C'est dommage, car il y avait une opportunité. Nous, on était presque au complet".

La gauche et les associations étudiantes déçues

Le résultat du vote, même aussi serré, est implacable et le texte a donc été rejeté par l'Assemblée nationale. "Je suis déçue. A une voix près, le repas universel à 1 euro était inscrit dans la loi. Mais ce sont surtout les étudiants qui vont être déçus aujourd'hui", a regretté la rapporteuse socialiste Fatiha Keloua Hachi. Une déception partagée par les premiers concernés. "En tant qu'étudiants, on se sent complètement lésés, a déclaré sur franceinfo Imane Ouelhadj, présidente de l'Unef. Nous sommes déçus et dégoûtés car nous avions un peu d'espoir."

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