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Turquie: des municipales en forme de vote de confiance pour Erdogan

Les citoyens turcs se rendent ce dimanche aux urnes pour voter aux municipales. Cette fois, l'enjeu est plus large que la gestion locale : le scrutin s'est transformé en vote de confiance pour le chef du gouvernement Recep Erdogan. Cette personnalité clivante divise la population turque et les dernières tensions l'ont conduit à censurerTwitter et Youtube, une mesure qui a déchaîné les foules. Le résultat du scrutin déterminera la stratégie d'Erdogan pour la suite. 
Article rédigé par Alix Hardy
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
  (Murad Sezer Reuters)

Il n'y a pas que les Français qui se rendent aux urnes ce dimanche : en Turquie se déroule également un scrutin municipal. Mais pour les Turcs, les enjeux sont différents : les municipales se sont transformées en vote de confiance pour le premier ministre Recep Tayyip Erdogan, en difficulté dans l'opinion publique. Les Turcs, conscients de l'importance du scrutin, s'étaient déplacés en masse dimanche matin aux urnes. 

C'est peu dire que le chef du gouvernement est clivant : après douze ans de règne sans partage à la tête de la Turquie, Erdogan est touché par des accusations de dérive islamique et autoritaire. Quand certains continuent de louer la manière dont il a développé la puissance économique de la Turquie, d'autres ne retiennent que les accusations de corruption et la gestion d'une main de fer qui est sa marque de fabrique. 

Encore au sommet de sa puissance il y a un an, Erdogan a chuté dans l'opinion publique sous le poids des accusations de corruption visant son entourage. Loin de calmer le jeu, il a riposté en attaquant ses anciens alliés, soupçonnés d'avoir publié sur internet des écoutes du régime en place. 

Internet vs gouvernement turc

Jeudi dernier, le régime a basculé en ayant recours à la censure. La diffusion d'un compte rendu secret d'une réunion entre le ministre des affaires étrangères et le chef des renseignements turc, où ils évoquaient une entrée en guerre contre la Syrie à des fins électorales, a mis le feu aux poudres. Au lieu de calmer le jeu, Erdogan a riposté en censurant Twitter et Youtube, provoquant une levée de boucliers.  

Samedi, le journal turc Hurryet (lien en turc) annonçait que le gouvernement turc étendait sa censure en interférant avec le système de noms de domaine (DNS) de Google, utilisé par la population pour contourner le ban de Twitter et Youtube. "C'est une technique qui consiste à se faire passer pour Google et à mentir en vous redirigeant sur une autre page que l'hôte demandé (Twitter, par exemple) " détaille sur son blog un informaticien spécialiste du DNS. 

Erdogan présidentiable ?

Le scrutin municipal déterminera l'état réel de l'opinion publique à son égard... et donc la marge de manoeuvre dont il dispose. Si son parti, l'AKP, remporte largement les élections, Erdogan pourrait briguer la présidence de la Turquie en août.

Dans tous les cas, le mal est fait, estiment les analystes. "Qu'Erdogan reste au-delà de 2015 ou pas, les dégâts provoqués par cette crise sont immenses et ne seront pas réparés facilement ", juge Brent Sasley, chercheur à l'université du Texas, pour qui Erdogan a fauté en instaurant une "politique de la peur et de la conspiration dans la vie politique turque ".

 

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