: Vidéo "I kill you" (Je vous tue) : Mémona Hintermann raconte dans le magazine "Affaires sensibles" la tentative de viol et les menaces de Kadhafi
Mémona Hintermann a été journaliste à France 3 pendant plus de trente ans. Pour cette spécialiste des affaires étrangères, il aurait été tout naturel de suivre la visite de Mouammar Kadhafi à Paris en 2007. Pourtant, elle se met en congé à ce moment-là, pour ne pas avoir à la traiter. "C'était exclu que je parle de cet homme-là, confie-t-elle. Vous savez, pendant des années, son nom m'était impossible à prononcer." Dans cet extrait d'"Affaires sensibles", elle revient sur un traumatisme qu'elle a longtemps choisi de ne pas évoquer publiquement. C'était en 1984.
Avec un groupe de journalistes internationaux, Mémona Hintermann s'envole pour la Libye dans l'espoir d'interviewer le "Guide suprême". Arrivés à Tripoli, on les fait attendre "pendant trois bonnes journées dans un hôtel pitoyable", se souvient-elle.
"Kadhafi veut vous voir"
Finalement, une jeune interprète prénommée Leïla guide Mémona Hintermann dans le palais présidentiel jusqu'au maître des lieux. C'est à elle que Kadhafi signifie, en arabe, que la rencontre se déroulera dans un autre endroit. "Qu'à cela ne tienne, se dit la journaliste. On sort. On marche dans un couloir. Il y avait Kadhafi, j'étais au milieu, elle marchait derrière. Et tout d'un coup, il ouvre une porte, et là, je vois une pièce, assez petite. Il y avait un lit, avec de la broderie anglaise dessus. Je regarde : Leïla a disparu."
La journaliste réalise alors que d'interview, il n'a jamais été question. Elle voit Kadhafi descendre la fermeture Eclair de sa combinaison militaire, comme hypnotisée par une cicatrice qu'il porte sur le torse.
"Et là, il me jette sur le lit, il est sur moi. C'était étrange, parce que je n'arrivais pas à croire que Kadhafi me viole. Parce que je l'avais toujours vu à la télé, c'était un chef d'Etat qui avait des relations avec la France, et je le vois sur moi."
Mémona Hintermann, grand reporterdans "Affaires sensibles"
Pour échapper à ce viol, la journaliste a la présence d'esprit de laisser entendre qu'elle a ses règles. Elle ne doit qu'à cette ruse d'avoir réussi à se lever et se dégager. "Il n'a pas opposé de résistance, il avait perdu un peu de son obsession de viol, probablement."
Alors qu'elle quitte la pièce, cette question lui vient, "très naïvement", dans l'embrasure de la porte : que se passera-t-il si elle raconte la scène à ses collègues ? La réponse lui glace le sang : "I kill you, I send somebody to kill you" ("Je vous tue, j'envoie quelqu'un vous tuer").
De retour à son hôtel, Mémona Hintermann a mis les autres journalistes au courant de ce qui lui était arrivé. Prévenu, le Quai d'Orsay a pris la menace très au sérieux, et organisé son exfiltration vers la France dès le lendemain matin.
Extrait de "Kadhafi à Paris, la folle visite d'un dictateur", un document à voir le 18 mai 2023 dans "Affaires sensibles", une coproduction France Télévisions, France TV presse, France Inter, INA et Capa Presse adaptée d’une émission de France Inter.
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