: Vidéo "On traite avec le diable" : le pacte secret avec les auteurs présumés de l'attentat de la rue des Rosiers qui révolte les victimes
Le 29 septembre, "Affaires sensibles" consacre une émission aux mystères de l'attentat de la rue des Rosiers. Le 9 août 1982, l'attaque du restaurant Jo Goldenberg , suivie d'une fusillade en pleine rue dans le quartier juif du Marais, à Paris, a fait six morts et 22 blessés. Quarante-deux ans après l'attentat, l’instruction est toujours en cours...
La lenteur de la justice française s'expliquerait-elle par un accord secret entre l'Etat et le groupe terroriste suspecté d'avoir organisé et réalisé l'attaque ? Dans cet extrait, un ancien patron du contre-espionnage français revient sur ses révélations de 2018. Yves Bonnet, ancien chef de la DST (Direction de la surveillance du territoire), a alors reconnu avoir entamé des pourparlers avec Abou Nidal, à peine deux ans après l'attentat. "Ma mission, c'était de faire en sorte qu'il n'y ait pas d'attentats sur le territoire français. Si vous étiez dans la vie d'un service de sécurité, vous sauriez que oui, on discute avec l'adversaire, avec l'ennemi", justifie-t-il.
Un pacte de "non-agression"
Ces discussions franchissent un cap le 12 juillet 1984. A Vienne, en Autriche, des espions français rencontrent deux émissaires d'Abou Nidal. Ces derniers formulent une requête : rendre visite à deux de leurs compagnons de lutte incarcérés en France pour un assassinat commis dans les années 70. "J'ai dit d'accord, à une condition, raconte Yves Bonnet. C'est qu'ils s'engagent à ne plus jamais commettre d'attentat sur le sol français. Ils ont dit oui. Et ils ont tenu parole."
L'Etat français aurait donc autorisé deux membres de l'organisation terroriste suspectée d'être responsable de l'attentat de la rue des Rosiers à se déplacer librement en France... N'est-il pas problématique de négocier avec un tel groupe ? Selon Yves Bonnet, la DST n'a fait que répondre à une demande "très ponctuelle" – et saisir, selon lui, "l'occasion de faire en sorte que ce côté-là, il n'y ait plus jamais de menace".
L'existence de ce pacte est confirmée dans un document confidentiel signé d'Abou Nidal, le chef de l'organisation terroriste, que s'est procuré "Affaires sensibles". Il dit ceci : "Notre mouvement s'engage à préserver la sécurité de la France en ce qui concerne les intérêts communs."
Les familles des victimes crient au scandale
En 2018, lorsqu'ils apprennent par la presse l'existence de cet accord, les rescapés de la rue des Rosiers et les familles des victimes crient au scandale. Incompréhensible, "immonde", selon eux, de "passer un accord pareil", qui revient à autoriser les auteurs de l'attentat "à circuler librement à condition d'être bien sages".
Cet accord aurait-il offert une forme d'impunité aux auteurs de la tuerie de la rue des Rosiers ? A-t-il ralenti le travail de la justice pour les identifier ? Ces questions qui obsèdent les rescapés et les proches des victimes, les parties civiles pourront les poser lors du procès à venir. L'audience pourrait aussi leur permettre de faire reconnaître un statut de victimes oubliées, dont les vies ont été marquées à jamais par cet attentat.
Extrait de "Rue des Rosiers : le lent chemin vers la vérité ?", une enquête réalisée par Adrian Jaouen, Paul Cabanis, Patrice Caillonneau et Juliette Orcel, à voir le 29 septembre 2024 dans "Affaires sensibles(Nouvelle fenêtre)", une coproduction France Télévisions, France TV presse, France Inter, INA et Capa Presse adaptée d’une émission de France Inter.
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