: Vidéo 49.3, l'article de la colère
Il y a une semaine, le jeudi 16 mars, la Première ministre Elisabeth Borne a annoncé à l'Assemblée nationale le recours à l'article 49.3 de la Constitution, engageant la responsabilité de son gouvernement sur la réforme des retraites. Ce même soir, place de la Concorde, à Paris, quelques milliers de personnes se rassemblent suite à un rendez-vous donné sur les réseaux sociaux. Dès les premières flammes, les CRS font place nette et les manifestants sont dispersés. Mais ils ne rentrent pas tous chez eux. La grève des éboueurs qui dure depuis onze jours donne du combustible à certains contestataires, qui déambulent dans les rues briquets à la main. La plupart sont jeunes, actifs ou étudiants, qui pensent ainsi "montrer leur colère" et "se faire entendre". Leur ardeur ne va pas s'éteindre, mais au contraire gagner la ville.
Pour Charles de Courson, député centriste de la Marne à l'initiative d'une motion de censure rejetée à neuf voix près le 20 mars, la violence était prévisible après ce recours au 49.3 : "Il n'y a pas seulement un déni démocratique, il y a le problème de la non-écoute de la société française." Dans le territoire rural de Ploërmel, dans le Morbihan, la mobilisation est forte. Le député régionaliste Paul Molac, élu sous l'étiquette Macron il y a six ans et appartenant au groupe LIOT à l'Assemblée, est aujourd'hui très critique. Selon lui, le macronisme n'aurait tiré aucune leçon du mouvement des "gilets jaunes". Dans sa circonscription, il redoute les actions plus radicales de certains manifestants.
Tempête politique et fièvre sociale
Partout dans le pays, on semble proche de la crise de nerfs, et les élus de la majorité présidentielle jouent les équilibristes. Fadila Khattabi, députée Renaissance de la Côte-d'Or et présidente de la commission des Affaires sociales de l'Assemblée nationale, a mené les débats sur la réforme de la retraite. Elle s'inquiète qu'il y ait aujourd'hui "de la haine" et souhaite "maintenir le dialogue avec les concitoyens". Et elle continue à défendre la réforme. Dans le centre-ville de Dijon, après l'annonce du 49.3 le 16 mars, des mannequins à l'effigie d'Emmanuel Macron et Elisabeth Borne ont été brûlés. La veille, sa permanence parlementaire avait été prise pour cible. Fadila Khattabi dit avoir reçu un courrier de menace anonyme et ne plus pouvoir trouver de repos. Elle accuse les parlementaires de gauche de caricaturer les débats et ceux de droite de manquer de courage politique.
Pour François Ruffin, député La France insoumise de la Somme, "la question aujourd'hui, c'est celle de la paix dans le pays. Comment on fait pour avoir la paix sociale et un sentiment de justice ? L'homme du chaos, il est là-haut..." L'adoption définitive de cette réforme après le rejet de la motion de censure le 20 mars n'a pas fait redescendre la tension : de nombreuses manifestations continuent à se tenir dans toute la France, notamment à Paris, parfois émaillées d'incidents, de heurts, avec plusieurs centaines d'interpellations. De nouveaux manifestants se radicalisent, et certains voient désormais la violence comme nécessaire. Cette semaine a fracturé l'Assemblée et réveillé des colères dans la rue, parfois sans rapport avec la réforme. Une tempête politique et une fièvre sociale dont nul ne peut prédire l'issue...
Un reportage de Valérie Astruc, Julien Fouchet, Florian Le Moal, Pierre Monégier, Yannick Sanchez, Clément Le Goff, Olivier Sibille, Arnaud Muller et Olivier Broutin diffusé dans "L'Evénement" le 23 mars 2023.
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