: Vidéo "Dry January" : le mois sans alcool, "une bataille quasi impossible à mener dans notre pays", selon l'ancienne ministre de la Santé Agnès Buzyn
Un mois de janvier "sec", comprenez sans boire d'alcool : en 2020, la France a voulu importer ce défi lancé au Royaume-Uni en 2013. Ce "Dry January" semble tomber à point pour éliminer les excès des fêtes de fin d'année... et il aurait des effets bénéfiques réels pour la santé.
Alors pourquoi le ministère de la Santé ne soutient-il pas officiellement l'opération ? En 2019, une campagne de sensibilisation préparée par la ministre de l'époque est même restée dans les cartons. Dans "Envoyé spécial" du 11 janvier, Agnès Buzyn, qui se souvient d'un "combat très difficile" contre l'alcool, révèle les coulisses de cette affaire.
"Trop de vents contraires"
"Il y a eu des campagnes sur les réseaux sociaux, mais nous n'avons pas fait la campagne d'ampleur que nous aurions souhaité faire à l'époque, regrette Agnès Buzyn. C'est une bataille quasi impossible à mener dans notre pays, en réalité. Vous avez trop de vents contraires."
Selon elle, "les arbitrages ont été vraiment en faveur de l'agriculture, de la viticulture, des vignerons", notamment parce que "le président de la République avait une conseillère agriculture qui venait du lobby très connu des viticulteurs qu'on appelle Vin & Société". Et aussi, parce que le vin est un produit "d'exportation, c'est une image de la culture française". Accusée, dit-elle, de "ne pas respecter la culture française", la ministre a donc "perdu partiellement la bataille".
Des pressions du lobby du vin
Pour en savoir plus sur la position de Vin & Société, "Envoyé spécial" a rencontré Krystel Lepresle, la déléguée générale de cette association, qui fédère près de 500 000 viticulteurs. Elle assume s'opposer à toute promotion du "mois de janvier sec" par le gouvernement, depuis son lancement en 2020. "Nous n'étions pas favorables à la mise en place de cette norme d'abstinence portée par l'Etat", reconnaît-elle. Le lobby avait "écrit au président de la République, au Premier ministre, et également aux parlementaires" pour le faire savoir.
La filière est en crise avec une consommation de vin, en France, en recul de 70% en soixante ans. Selon Krystel Lepresle, en raison de cette baisse structurelle, choisir de prôner l'abstinence pendant un mois au lieu de la simple modération, "c'est une trajectoire de santé publique qu'on ne peut pas accepter". Le fait que cette année encore, le gouvernement ne soutienne pas l'opération du mois sans alcool serait donc une victoire pour l'un des principaux lobbies du vin ? "En tout cas, je pense que c'est une victoire pour la convivialité dans notre pays, pour la liberté de tout un chacun de pouvoir consommer comme il le souhaite", se félicite la déléguée générale de Vin & Société.
Extrait de "Un mois sans alcool, ça marche ?", un reportage à voir dans "Envoyé spécial" le 11 janvier 2024.
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