À la recherche de Gabriel Chahine
C’était la fin des années 1970, celles de la parenthèse enchantée, quand dans la foulée de mai 68 la jeunesse avait cru aux lendemains "Peace and Love". Soudainement, le ciel s’obscurcit. Brigades rouges en Italie, Bande à Baader en Allemagne, et Action directe en France : à l’extrême gauche, les marges basculaient dans la violence, jusqu’à revendiquer l’assassinat politique comme moyen d’action légitime.
Les années de plomb à la française
Cette époque, le dessinateur Sébastien Goethals s’en souvient pour une bonne raison.
"J’ai grandi du côté d’Avignon, dans une ambiance baba-cool très heureuse. Une nuit, tous les amis de mes parents se sont retrouvés pour apprendre qu’une des leurs venait d’être arrêtée, pour avoir hébergé deux militants d’Action directe. J’avais 14 ans, c’était la première fois que j’entendais parler de terrorisme."
Le dessinateur Sébastien Goethals,à franceinfo
Comment parler de ces années-là, de ce moment de bascule ? C’est en tournant autour d’un personnage aussi impénétrable qu’inquiétant, et jusqu’alors peu connu, que Sébastien Goethals et le journaliste et historien Philippe Collin vont y parvenir. Il s’appelle Gabriel Chahine et nous le découvrons beau gosse, cheveux longs et jean pattes d’eph, au moment où, à Toulouse, il aborde pour la première fois Jean-Marc Rouillan, qui deviendra bientôt l’une des chevilles ouvrières d’Action directe.
Qui est Gabriel Chahine ?
Les 300 pages de ce livre ne suffisent pas à répondre clairement à la question. A-t-il vraiment été le combattant pro palestinien qu’il revendique avoir été ? Un adulateur du général de Gaulle ? Un vrai-faux militant anticapitaliste ? Un fantastique indic comme tous les flics de France et de Navarre rêveraient d’en connaître un ?
Collin et Goethals multiplient les interviews dans tous les milieux, rencontrent notamment d’anciens fonctionnaires de police. Le récit avance au rythme soutenu des coups d’éclat – vols, braquages, attentats à la bombe – des membres d’Action directe, et de la traque que mènent les Renseignements généraux. François Mitterrand succède à Valéry Giscard d’Estaing, les enjeux politiques brouillent les pistes, et Chahine continue à nager en eaux troubles.
"Une chose fait l’unanimité chez tous ceux qui ont croisé Gabriel Chahine : il avait le pouvoir de vous scanner de la tête aux pieds, et d’immédiatement vous donner ce que vous attendiez."
Sébastien Goethals,à franceinfo
Le polar politique a pour titre L’Escamoteur, aux éditions Futuropolis.
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