Albius, libre dans sa quête
La Réunion, c’est l’île de cœur de Tehem et Appollo. Le dessinateur Tehem et le scénariste Appollo y ont grandi. Seuls ou à deux, ils ont souvent puisé, pour écrire leurs histoires, dans la mémoire collective de l’île.
Documenter l'histoire de la Réunion
L’un et l’autre appartenaient au collectif Le Cri du margouillat, un fanzine qui témoignait, dans les années 1990, de la vitalité de la bande dessinée sur l’île. Sous le titre Piments Zoizos, Tehem a notamment évoqué les enfants de l’océan Indien, arrachés à leur famille, et transplantés dans la Creuse, entre 1962 et 1984.
Appollo, lui, s’est fait remarquer en racontant dans La Grippe coloniale, le retour au pays de quatre pauvres bougres, sortis des tranchées de 14-18. Ensemble, ils ont déjà signé Chroniques du Léopard, où l’on suit les rejetons de l’élite réunionnaise, pendant la Seconde Guerre mondiale. C’est encore ensemble qu’il signe Vingt-décembre, chroniques de l’abolition.
L’histoire se situe cette fois en 1848. L’année même où, à quelque 9 000 km de là, le gouvernement provisoire de la Deuxième République décrète l’abolition de l’esclavage. Des esclaves, noirs, indiens ou métisses, hommes et femmes à tout faire, La Réunion n’en manque pas. Parmi eux, Edmond Albius.
Un découvreur de génie
Quelques années auparavant, l’orphelin, qui n’a alors que 12 ans, a fait tout seul une découverte qui va changer la face de l’île, et la botanique mondiale. Grâce à son sens de l’observation et à son intelligence, Edmond a compris comment féconder les fleurs de vanille, et obtenir les précieuses gousses que les propriétaires terriens vont vendre à prix d’or.
"C’est un personnage très romanesque. Hors du commun par sa découverte, et en même temps représentatif de la condition de tous ces esclaves. Puisqu’il n’en tire aucun bénéfice, il va connaître le destin commun des 60 000 personnes qui, après l’abolition, vivront libres mais toujours dans des conditions de pauvreté extrême."
Le scénariste Appolloà franceinfo
Le propos n’est pas forcément des plus faciles à mettre en scène. Il y a des passages vraiment durs, où l’on fouette les esclaves, quand on ne leur tire pas dessus. Mais le dessin de Tehem, rond et joliment coloré, permet à la fiction d’exister, et rend aux personnages toute leur humanité. Notamment, Edmond Albius, esclave, prisonnier, botaniste, cuisinier, cultivateur, tailleur de pierre, héros réunionnais.
Vingt-décembre, chroniques de l’abolition, aux éditions Dargaud
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