BD, bande dessinée. Banlieue blues
Avec "Jeu d'ombres", Dedola et Merwan font de la banlieue lyonnaise le sujet autant que le décor d'un polar haletant et politique.
Un polar politique
Les cités qui s’enflamment, le communautarisme, le chômage et la religion dans les quartiers, un enfant de la banlieue lyonnaise devenu grand en connaît les ressorts. C’est pourquoi le business de la drogue, les mères qui peinent à tenir leur progéniture, les confrontations avec la police, l’espoir placé dans l’action associative sont au cœur de la bande dessinée Jeu d’ombres que Loulou Dedola, par ailleurs musicien, romancier et documentariste, signe avec le dessinateur Merwan.
Sur fond de chronique sociale un peu noire, Jeu d’ombres est d’abord un polar efficace, haletant, centré autour de deux frères, l’un étudiant en droit, universitaire brillant, l’autre truand, trafiquant, caïd ultra violent. Mais le décor est si présent que l’on sent bien que l’essentiel est ailleurs. Pour Dedola, la question est d’abord politique.
Donnons un sens politique à la question des banlieues. Les questions religieuses et identitaires doivent rester dans la sphère privée.
Loulou Dedola
Le dessinateur Merwan a lui aussi grandi en banlieue. Il a puisé dans ses souvenirs pour mettre en scène ces jeunes toujours en mouvement entre deux barres de béton et le périphérique.
Peut-être que la seule chose qui devrait ressortir de "Nuit debout", c'est que les gens devraient pouvoir réinvestir les places.
Merwan
Ajoutons que cette BD-là offre un héros positif à la banlieue, ce n’est pas rien, et que le scénario réussit le tour de force de coller à une autre actualité, celle de la Turquie, dont sont originaires les principaux personnages, et où se jouent d’autres histoires également très politiques.
Jeu d’ombres, Dedola, Merwan, deux volumes aux éditions Glénat.
Tous les 15 jours, Jean-Christophe Ogier accueille ici la chronique "Info manga" de Laetitia de Germon. Pour vous guider parmi les nombreuses parutions, Laetitia vous livre sa sélection et ses coups de cœur.
Les visiteurs du festival d’Angoulême 2017 se souviennent de l’exposition consacrée au mangaka Kazuo Kamimura. Pour beaucoup, une découverte du travail de cet auteur japonais mort à 46 ans, en 1986. Sens de la composition et de l’épure, noir et blanc subtil ou couleurs pop servent des récits résolument adultes.
Une femme de Shôwa, de Kazuo Kamimura, chez Kana
Au Japon, dans la 18e année de Shôwa (1943), la petite Shoko est livrée à elle-même après le décès tragique de sa mère. Réduite à commettre des vols, elle va tout mettre en œuvre pour survivre dans ce Japon qui se reconstruit. Animée par la vengeance, la jeune fille ne vit que pour punir ceux qui ont fait du mal aux personnes qui l’ont recueillie et aidée.
Kazuo Kamimura (Le club des divorcées, Maria...) et Ikki Kajiwara (Ashita no Joe...) nous livrent un manga où se mêlent le drame, la tendresse, la violence et la cruauté. Rien ne nous est épargné. Le dessin de Kazuo Kamimura traduit parfaitement le trouble et la détermination de ses personnages. Avec Ikki Kajiwara ils retranscrivent la société japonaise et la condition féminine de cette époque.
Une femme de Shôwa est une œuvre inachevée mais l’histoire se termine sur ce que l'on pourrait considérer comme une première partie. A la fin, l'éditeur propose sept pages d’explications sur l’oeuvre, les auteurs et le processus de création.
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