BD, Bande dessinée. Défiance nationale
Avec "Quatorze Juillet", Bastien Vivès et Martin Quénéhen racontent le stress d’une France confinée dans ses angoisses contemporaines.
Les sommets alpins en toile de fond, une rivière en contrebas de la départementale pour rafraîchir un été bien chaud, un bourg tranquille non loin de Grenoble : le décor disparaîtra bien vite. L’essentiel dans Quatorze juillet, c’est ce qui se passe dans la tête des gens.
Le gendarme Jimmy
Beau gars, bien baraqué, bon gars aussi, élevé dans les valeurs de la République, il est jugulaire-jugulaire, notre gendarme ! Mais néanmoins rassurant dans son envie de rendre service et de protéger.
C’est vraiment l’uniforme qui me plaisait. Et aussi la question des gendarmes et des flics. Il y a cinq ans tout le monde les embrassait. Aujourd’hui, on leur jette des pierres. Ce basculement continue de m’interroger sur l’état de santé du pays.
Bastien Vivès
La France, un pays malade
Entre attentats terroristes hier et coronavirus Covid-19 aujourd’hui, l’époque n’est pas vraiment sereine.
Tout dérape. Le monde entier dérape, l’Europe dérape, la France dérape. Et chacun de nous, on dérape dans nos têtes allègrement. Le plaisir était d’incarner ce dérapage, ces ambiguïtés, ces doutes, ces pulsions aussi, à l’intérieur d’un personnage censé incarné l’ordre et la placidité. La devise de la gendarmerie, c’est 'Pour la patrie, l’honneur et le droit'. Il y a sûrement tout ça dans la vocation de Jimmy. Mais aussi beaucoup d’autres choses : il rêve d’être un chevalier, d’avoir une mission, d’accomplir quelque chose, de sauver. Quoi ? L’ordre ? La France, avec une coloration un peu nationaliste ? Un peu de la beauté du monde ? Il porte sur le paysage un regard amoureux. Il est plein d’espoir et de désir.
Martin Quénéhen
Le paysage réapparaît, un peu brouillé
Pour la première fois peut-être, Bastien Vivès élargit sa palette à un sujet dit "de société". Sur la corde raide, sans point de vue moral, strictement naturaliste, l’histoire hésite longtemps à choisir de quel côté elle va finir par basculer. Comme la France de 2020, qui tient bon. Pour l’instant, du moins.
Quatorze juillet, Bastien Vivès et Martin Quénéhen, aux éditions Casterman.
Sur Youtube, en cherchant un peu vous verrez Bastien Vivès, concentré, dessiner sur sa paltte graphique. C’est très doux.
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BD, bande dessinée du samedi 28 mars 2020
La BD se joue du confinement
Impossible de s'ennuyer avec Lewis Trondheim, Pénélope Bagieu ou Loïc Sécheresse. Les uns et les autres vous invitent à fabriquer vos propres récits en bandes dessinées. Pour cela, il suffit de les suivre sur les réseaux sociaux.
Pour aider chacun - et d'abord les enfants - à passer le temps durant cette période inédite depuis la dernière guerre mondiale en France, les auteurs de BD ne sont pas en manque de bonnes idées.
La BD au temps du coronavirus
Dans ses dessins d'élèves attablés à "la cantoche", Nob demande aux enfants d'imaginer ce que se disent les petits camarades qui partagent leur repas. Au-dessus des têtes, les bulles sont vides. À vous de les remplir.
Loïc Sécheresse invite les enfants confinés à la #Coronabaston. Il faut imprimer et compléter son dessin en inventant de super-combattants prêts à affronter le gros virus qui s'attaque à la ville.
Pénélope Bagieu a inventé la #Coronamaison : un rectangle avec un escalier, comme une pièce vide qui attend d'être meublée, décorée et occupée. À chacun de remplir le dessin à son idée. Sur Twitter, les images complétées s'empilent et deviennent les étages d'un immeuble où chacun vit confiné, seul ou en famille, avec animal de compagnie assoupi sur le canapé.
Sur Twitter encore, Lewis Trondheim, dont le milieu de la bande dessinée salue désormais la légendaire obsession pour les gels hydro-alcooliques, propose un jeu à double contrainte. D'abord, Lewis nous demande de répondre à deux sondages. Souhaitons-nous que sa prochaine histoire ne compte qu'un seul personnage, ou bien deux, ou trois ? Ensuite, où l'histoire doit-elle se dérouler ? Sur une route ? Au cinéma ? Dans le salon du héros ?
Fort des réponses des twittos, Lewis dessine une histoire courte et nous en propose les trois premières cases. Celui d'entre nous qui réussit à trouver et à dessiner - même mal - l'image suivante et le dialogue initialement prévus pour la chute, reçoit une carte personnalisée de la main de l'auteur des aventures de Lapinot.
Et ça marche! Les lecteurs sont formidables, débordent d'imagination, ne manquent pas d'humour et, pour l'instant, il y en a toujours au moins un pour tomber pile-poil sur ce que le facétieux Trondheim avait prévu.
Si vous préférez regarder les professionnels jouer du crayon
Vous pouvez retrouver sur Youtube les leçons de dessins qu'Anne Douhaire a recueillies pour France Inter : de Tom Tom et Nana à Titeuf, en passant par Le Chat de Geluck ou Thomas Pesquet croqué par Marion Montaigne, c'est à chaque fois un miracle dont on ne se lasse pas.
Enfin, plus que jamais en ce printemps confiné, lisez des BD !
Comme on ne peut pas courir à la bibliothèque, Joann Sfar poste chaque jour sur Instagram le prochain album de son héroïne Aspirine. Case après case. Il va falloir être patient. Ca tombe bien : on a le temps.
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