BD bande dessinée. Le souffle de la horde

Le souffle de la SF

C’est un roman de science-fiction à succès, un chant polyphonique mis en musique par l’écrivain Alain Damasio. La Horde du Contrevent raconte une planète balayée par un souffle inexpliqué, puissant, tourbillonnant. Ici, chacun a son statut : il y a les sédentaires et les migrants, ceux qui luttent contre le vent, ceux qui esquivent, ceux qui subissent. Et puis, il y a la horde, un petit groupe qui, génération après génération, se voit confier la mission de remonter en marchant jusqu’à la source des vents, pour les comprendre et les dompter.

Dessinateur de tradition réaliste, grand admirateur de Damasio, Eric Henninot adapte le roman en BD. À priori, un projet fou. Comment, page après page, case après case, mettre en images les sifflements qui vrillent les tympans ? De quelle manière faire éprouver aux lecteurs la souffrance, la pression exténuante ?

Le son a une importance cruciale. Il devient une matière graphique. Je me suis concentré sur les onomatopées, les traits de vitesse, les turbulences et l'inclinaison des corps.

Eric Henninot

Pas plus que le vent, la horde ne s’arrête. Elle marchera ainsi pendant 6 albums intenses et zébrés. Le premier a pour titre Le Cosmos est mon campement, Eric Henninot, aux éditions Delcourt.

Tous les 15 jours, Jean-Christophe Ogier accueille ici la chronique "Info manga" de Laetitia de Germon. Pour vous guider parmi les nombreuses parutions, Laetitia vous livre sa sélection et ses coups de cœur.

Les enfants de l'araignée, de Mario Tamura, chez Sakka

Quasiment inconnu de ce côté-ci de la planète, Mario Tamura est publié pour la première fois en France par les éditions Casterman.

Spécialiste des fables d'anticipation où se mêlent amour et cruauté, pouvoir, oppression et quête de liberté, le mangaka nous entraîne, dans Les Enfants de l'araignée, au cœur de ce qui fut autrefois le Japon, mais qui, 60 ans après une guerre nucléaire, ne ressemble plus à rien. Dans cet univers post-apocalyptique, trois adolescents tentent de survivre et d'échapper aux militaires. L'auteur en profite pour aborder des thèmes politiques contemporains tels que l'écologie, le nucléaire, le manque de ressources naturelles, la pénurie de nourriture, la gestion de la surpopulation.

La mise en scène offre une succession de contrastes : une ville écrasante laisse place au vide quand on en sort ;  l'amour se heurte à l’inceste ; la confiance à la trahison… Autant de contradictions avec lesquelles les protagonistes doivent vivre et essayer de retrouver un semblant de notion de bien et de mal, dans un monde où les valeurs traditionnelles n'existent plus.

On retrouve ces oppositions dans le graphisme de Mario Tamura, avec des planches très sombres, presque noires par moment et parfois très remplies, auxquelles succèdent d'autres plus claires, avec très peu de décors, voire aucun.

Avec ses scènes de violence et de sexe, ce manga n'est pas à mettre entre toutes les mains.