C'est dans ma tête. La maltraitance des personnes âgées
La ministre de la Santé, Agnès Buzyn, a annoncé l’installation le 19 février, d’une commission destinée à proposer une stratégie de lutte contre la maltraitance des personnes âgées.
La psychanalyste Claude Halmos revient aujourd'hui sur l'annonce le 19 février dernier par la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, de l’installation d’une commission destinée à proposer une stratégie de lutte contre la maltraitance des personnes âgées. Un sujet qui revient trop souvent dans les faits d'actualité.
Comment expliquer ce type de maltraitance ?
Il y a des raisons qui tiennent à des réalités économiques : le fait que les personnels des EHPAD ne soient pas en nombre suffisant, conduit à ce que les résidents ne soient pas traités comme ils le devraient. Mais il y a aussi d’autres raisons. Elles tiennent à la spécificité du travail des personnels auprès des personnes âgées, et à ses difficultés psychologiques.
S’occuper d’une personne âgée, c’est se confronter à la réalité de la vieillesse. Cela peut être difficile, surtout quand il s’agit de s’occuper de son corps, qui réclame les mêmes soins que celui d’un nourrisson. Ce télescopage des âges peut être très angoissant.
D’autant que les soignants peuvent être renvoyés aussi au rapport à leurs parents, à l’idée de leur propre vieillesse, etc.. Ils auraient donc besoin d’un soutien psychologique. Pour parler de ces angoisses et ne pas risquer de les exprimer par la violence et le rejet. Et pour garder des repères éthiques : une personne âgée, qui n’a plus toutes ses toutes ses capacités, a besoin, pour vivre, tout comme un enfant qui ne les a pas encore toutes développées, de respect.
Y a-t-il d’autres raisons à cette maltraitance ?
Il y a des raisons d’ordre sociétal. Notre société vit dans la peur du vieillissement, de la vieillesse et de la mort. Sans se donner les moyens d’une véritable réflexion sur le rôle qu’elle pourrait jouer, face à ces questions. Il faudrait, par exemple, essayer d’apprivoiser l’idée de la mort. Et cela supposerait d’abord d’essayer de la rendre plus humaine. Parce que les gens qui ont peur de la mort, n’ont pas seulement peur que leur vie s’arrête. Ils ont peur aussi des conditions dans lesquelles, trop souvent, la mort se passe.
Pensez-vous que l’on pourrait apprivoiser aussi l’idée de la vieillesse ?
Bien sûr. Quand on fait référence aux personnes âgées, on ne met l’accent, la plupart du temps, que sur ce dont leur âge les prive. Cela donne de la vieillesse une image catastrophique, qui explique que notre société s’accroche à ce que l’on appelle le "jeunisme", et à tout ce qui pourrait donner l’illusion d’une jeunesse éternelle.
Mais cette image est surtout lourde de conséquences pour les personnes âgées qui, très souvent, s’identifient à elle et en concluent que, passé la retraite, elles ne sont plus bonnes à rien. Il faudrait s’attacher à souligner ce que peuvent, malgré leur âge et surtout grâce à leur âge, faire et apporter les personnes âgées. Leur donner un vrai rôle et une vraie utilité. Et cela modifierait certainement le regard que les personnes qui les soignent portent sur elles.
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