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C'est dans ma tête. Tirage au sort à l'entrée des universités

Une circulaire, publiée au Journal Officiel du 27 avril, entérine la pratique du tirage au sort pour départager les candidats dans les filières où il n’y a pas assez de place.

Article rédigé par franceinfo, Claude Halmos
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Etudiantes et étudiants dans un amphithéâtre, ici à Toulouse en faculté de droit économie et gestion. (MAXPPP)

Une circulaire, publiée au Journal Officiel du 27 avril, entérine la pratique du tirage au sort pour départager les candidats dans les filières où il n’y a pas assez de place. Nous revenons aujourd'hui sur les conséquences psychologiques, pour les étudiants, d’une telle mesure avec les précisions de Claude Halmos. 

Les conséquences psychologiques de cette mesure sont très importantes et on sous-estime leur gravité.

De quelles conséquences s’agit-il ?

Il faut d’abord rappeler que cette mesure s’inscrit dans un contexte qui est déjà très lourd : tous les élèves et tous les étudiants sont confrontés aujourd’hui, en plus des problèmes - que l’on peut dire "normaux" - qu’ils peuvent avoir par ailleurs, à des difficultés qui  ne tiennent pas à leur personne  mais à la situation économique.

Il y a 50 ans, la règle du jeu était simple : si un élève travaillait, s’il avait de bons résultats, il était sûr d’avoir de bons diplômes et donc "un bon métier" (comme l’on disait).  Aujourd’hui, du fait de la crise économique, ce n’est plus le cas.  On peut avoir été un très bon élève, un très bon étudiant et ne pas trouver de travail, tout le monde le sait. Et c’est générateur chez tous ces jeunes d’une grande souffrance psychologique qui n’est pas prise en compte comme elle le devrait.

Vous pouvez nous expliquer cette souffrance ?

 Il y a d’abord la question de savoir sur quoi un étudiant peut s’appuyer aujourd’hui pour faire les efforts qu’il doit faire pour travailler. Si l’on sait que les efforts vont mener à la réussite, travailler n’est pas trop difficile. Mais si l’on sait que, même si l’on travaille d’arrache-pied, quelque chose de plus fort que soi est susceptible d’empêcher que l’on atteigne le but que l’on s’est fixé, c’est beaucoup plus difficile.

Et cela va même plus loin parce que la situation actuelle atteint les étudiants dans l’image qu’ils ont d’eux-mêmes. Comment un étudiant peut-il se sentir une valeur s’il a l’impression que la société ne se préoccupe pas de lui faire une place ? C’est très invalidant et très déprimant.

Et le tirage au sort, alors, quel rôle joue-t-il ?

Il en "rajoute une couche", comme l’on dit vulgairement, et même une sacrée couche. Parce que les étudiants, qui savaient déjà que leur avenir dépendait non pas d’eux mais du marché du travail, sont obligés maintenant d’accepter qu’il dépende du hasard : c’est pile ou face. Pile, tu pourras avoir l’avenir que tu voulais. Face, tu ne le pourras pas. C’est vraiment d’une violence insensée.

Comment peut-on aider ces jeunes ? 

Il faudrait d’abord que la société reconnaisse la gravité de ce qu’elle leur fait subir. Et je crois qu’il faut que leurs parents les aident à comprendre ce qui se passe, à réaliser qu’ils ne sont pas responsables de leurs difficultés et à se battre. Non pas dans la violence, bien sûr, mais par un engagement citoyen. Face à des mesures de cet ordre, si l’on veut rester psychologiquement debout, il faut se battre.

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